Pourquoi n’y a-t-il pas d’analystes financiers spécialisés en RH?
Voilà une question qui n’a toujours pas trouvé de réponse encore aujourd’hui! Pourtant, la principale dépense d’exploitation d’une grande majorité d’organisations est justement sa masse salariale. Elle peut représenter jusqu’à 60 % de l’ensemble des coûts.
Les états financiers d’une organisation présentent rarement une analyse financière pour cette valeur. Disons que vous avez une petite entreprise en R&D et que quatre de vos employés travaillent au développement d’un produit. À combien évaluez-vous leur contribution? Parmi vos actifs, particulièrement au chapitre de l’intangible, quelle est la valeur de vos personnes clés? Quel est votre risque d’affaires si vous perdez ces personnes? Il est consternant de noter que nous accordons une valeur en fonction des heures de travail effectuées sur un projet, mais que nous ne tenons pas compte de ce que représente la perte de l’actif intellectuel. Le coût de renonciation, ça vous dit quelque chose?
Analyser pour comprendre comment gérer mieux nos actifs
Nous évaluons rigoureusement nos inventaires, mais ce qui leur donne une valeur ajoutée, la valeur humaine, n’est pas mesuré avec tous les facteurs ou toutes les analyses fines requis. Par exemple :
- Mesurer l’absentéisme ne vise pas à coincer pour punir par des mesures disciplinaires, mais bien à établir les causes et les profils des absences. L’analyse permet d’accoler un chiffre à chaque raison afin d’établir des mécanismes de prévention.
- Disons que vous décidiez d’offrir un salaire plus élevé au lieu de mettre en place un programme d’assurances collectives. Quel sera le point de rupture économique pour l’employé qui préfère un salaire moins élevé, mais des conditions plus avantageuses?
- Plusieurs études ont permis d’établir, à partir de l’analyse empirique, des probabilités comportementales et leurs effets sur la motivation. Malheureusement, l’analyse financière qui s’y rattache n’a pas été complétée. Quelles sont les mesures qu’une entreprise devrait adopter pour suivre financièrement les vrais coûts reliés à la main-d’œuvre?
On analyse presque tout… sauf l’essentiel
Les organisations embauchent des analystes financiers pour mesurer leurs risques sur le marché monétaire, pour décortiquer leurs coûts de frais bancaires et de financement. Les universités offrent des programmes très étoffés sur ces sujets. Par contre, dès qu’on cherche un professionnel des chiffres pour aider à établir la valeur économique du comportement humain au travail, alors là, il n’y a pas grand-chose! Pourtant, l’évolution des mathématiques et de l’informatique permet aujourd’hui d’analyser ce qui n’était pas possible il y a de cela 20 ans.
« … à la différence du calcul des probabilités, qu’on peut considérer comme étant le traitement mathématique de la notion intuitive du hasard, les processus stochastiques fournissent des modèles mathématiques de phénomènes aléatoires dont la dépendance du temps (ou d’un autre paramètre) joue un rôle prépondérant [1]. »
Aujourd’hui, la Dre Geneviève Gauthier enseigne à HEC Montréal cette méthode de calcul appliquée au secteur de la gestion (Plan de cours HEC 2011) aux étudiants en ingénierie financière. Il est grandement temps de mettre nos connaissances au diapason et de faire évoluer notre analyse de la plus importante valeur qu’une organisation possède, « ses ressources humaines ».
Si les Finances ont adopté les mathématiques stochastiques, à quand cette application dans notre domaine pour évaluer nos risques financiers reliés aux comportements humains? Quand soutiendrons-nous nos affirmations par des moyens chiffrés qui permettent de prévenir et de planifier, sur des bases solides, dans l’intérêt financier et de la productivité de nos organisations?
À propos des auteurs
Jean-Marc Léveillé, CRIA, Distinction Fellow est maintenant consultant en gestion d’entreprise et soutien aux gestionnaires après plus de vingt ans à diriger des entreprises spécialisées dans les secteurs de la pharmacie, de la santé, de la maintenance industrielle et des services professionnels. Il peut être joint par téléphone au 450 640-0090 et par courriel au jml@dotemtex.ca.
France Lefebvre, CRHA, RCCTM est présidente de Fortuna Groupe Conseil, cabinet qui se spécialise dans l’accompagnement du développement des gestionnaires par la formation, le coaching d’affaires, le coaching par les pairs et le codéveloppement professionnel. Elle peut être jointe par téléphone au 514 573-4383 et par courriel. Site web : Cliquez ici.
