Vous lisez : Réduire le risque d'affaires par une planification efficace de la main-d'oeuvre

De manière générale, les organisations font un effort concerté afin d’identifier et de réduire les risques qui pourraient mettre leur réussite en péril. Toutefois, un type de risque est souvent ignoré : le défaut de disposer de la bonne main-d’œuvre pour réaliser sa stratégie d’affaires.

La meilleure des stratégies d’affaires n’aura en effet que très peu de valeur si elle ne peut être exécutée avec succès grâce à une main-d’œuvre qualifiée.

Peu importe les circonstances, il est contreproductif pour une organisation d’utiliser inefficacement ses ressources. Puisque les investissements en main-d’œuvre représentent généralement 40 % du budget d’une organisation, leur optimisation est particulièrement critique.

D’ailleurs, les questions de main-d’œuvre se font plus urgentes aujourd’hui, en particulier pour les organisations misant sur des employés hautement qualifiés et expérimentés. Les changements démographiques, dont une main-d’oeuvre vieillissante, modifient le bassin de talent disponible et bouleversent les relations traditionnelles entre employeurs et employés. De plus, l’environnement d’affaires lui-même est en pleine mouvance, résultant d’un vaste éventail de pressions économiques, opérationnelles et de marché.

Il n’est pas difficile de trouver des preuves tangibles des problèmes grandissants liés à main-d’œuvre. Les entreprises du domaine pétrolier et gazier ont été forcées de reporter de grands projets d’exploration et de production, même en temps de prix records. Les organisations de l’aérospatiale ne sont pas en mesure de répondre à la forte demande. Des entreprises de transport cherchent en vain la prochaine génération d’ingénieurs, de chauffeurs et d’employés de maintenance. Certaines organisations du secteur de l’énergie font face à des processus de formation qui s’échelonnent sur cinq à dix ans pour certains emplois critiques. Et les fournisseurs de soins de santé sont en constante recherche d’infirmières et de techniciens qui, une fois trouvés, sont encore plus difficiles à fidéliser.

Les organisations n’ayant pas fait de prévisions en matière de main-d’œuvre font aujourd’hui face à de réels risques d’affaires. Si elles ne parviennent pas à répondre aux besoins actuels et futurs de main-d’œuvre, elles pourraient perdre du terrain face à leurs compétiteurs et échouer dans l’atteinte de leurs objectifs d’affaires.

La solution : la planification de la main-d’œuvre
La manière la plus efficace de faire face à ces risques est par une planification compréhensive de la main-d’œuvre.

Le terme « planification de la main-d’œuvre » est souvent utilisé pour décrire des tâches opérationnelles, comme les horaires de travail, la gestion de l’absentéisme et le suivi des candidatures. Bien que ces actions soient importantes pour l’efficience opérationnelle d’une organisation, elles ne représentent qu’une partie de l’ensemble.

Lorsqu’elle est examinée dans une perspective stratégique plus large, la planification de la main-d’œuvre est un processus intégré qui identifie et réduit les écarts critiques entre les ressources actuelles de main-d’œuvre et les besoins futurs. Il s’agit d’une partie cruciale d’une stratégie de main-d’œuvre globale conçue pour stimuler la performance d’affaires.

Les organisations ont besoin d’une approche systématique de planification afin de prévoir les risques et de trouver le juste équilibre dans la quantité, la qualité et l’emplacement de la main-d’œuvre qualifiée – au juste coût – afin de maintenir les résultats de l’organisation. La planification de la main-d’œuvre nécessite qu’une organisation se pose les questions suivantes…

Combien?

  • À combien de personnes se chiffre le personnel nécessaire pour que l’organisation continue de fonctionner – et de croître – efficacement? Comment cela se traduit-il par branche d’activité, par fonction et par niveau d’emploi?
  • Dans quelle mesure la main-d’œuvre actuelle répond-elle à ces exigences? De quelle façon sera-t-elle affectée par les embauches, les promotions, les mutations, les départs et les retraites à venir?
  • Quelle est l’étendue des écarts et quand se produiront-ils?

Quelles capacités (qualité)?

  • Quelles sont les habiletés et capacités les plus à risque?
  • Où sont les écarts critiques et quelle est leur étendue?
  • Quelles seront les nouvelles habiletés et capacités requises pour soutenir les changements de technologie, de produits ou de services?
  • Quelle est la trajectoire prévue pour les candidats internes afin de remplir ces rôles? Le développement peut-il être accéléré par endroit? Est-il facile de recruter des candidats externes?
  • Y a-t-il des sources alternatives pour ces habiletés en forte demande?
Où?
  • En quoi les choix géographiques affectent-ils le coût et la livraison des produits ou des services?
  • Quels seront les meilleurs endroits où trouver une main-d’œuvre de talent? Quel sera le coût de cette main-d’œuvre?

En répondant à ces questions, les organisations peuvent prendre de meilleures décisions concernant leur main-d’œuvre et leurs investissements.

Qu’est-ce qu’une stratégie de main-d’œuvre?
Une stratégie de main-d’œuvre repose sur un design d’organisation du personnel qui répond aux besoins d’affaires actuels et futurs. Elle est unique à chaque organisation et doit inclure trois dimensions :
  • un plan de main-d’œuvre qui définit la quantité, la qualité et l’emplacement des talents requis et la façon dont l’organisation prévoit attirer et fidéliser cette main-d’œuvre;
  • une architecture de la main-d’œuvre qui est un plan détaillé de la structure organisationnelle des talents et qui vise à soutenir l’exécution de la stratégie d’affaires de l’organisation; ce plan définit les rôles, les compétences, les responsabilités, les attentes en matière de performance et les opportunités de développement des employés à l’intérieur de l’organisation et énonce clairement la façon d’y parvenir;
  • une proposition d’emploi qui définit la relation qui lie l’employeur et l’employé; elle prend en considération ce que recevra l’employé pour sa contribution en termes de rémunération globale, d’expérience de travail, d’environnement de travail et d’image de marque de l’employeur.



Trouver les bonnes réponses
Les réponses à ces questions seront uniques à chaque organisation. Le processus débute en mettant l’accent sur les impératifs d’affaires et leurs implications. Deux types d’analyses s’avèrent alors nécessaires pour une planification optimale de la main-d’œuvre : une analyse des besoins fondée sur les exigences du plan d’affaires permettant d’identifier les aptitudes futures nécessaires et leur localisation, ainsi qu’une analyse de l’offre de la main-d’œuvre portant sur la disponibilité interne et externe des talents.

Le résultat est une analyse d’écarts qui identifie et priorise les écarts en termes de main-d’œuvre – incluant les occasions où l’organisation se trouvera à court des talents nécessaires et en quels endroits elle peut trouver cette main-d’œuvre. L’étape suivante est de déterminer quelles pratiques et politiques sont les plus aptes à contribuer au rétrécissement de ces écarts et d’identifier de nouvelles pratiques et politiques pouvant potentiellement rétrécir encore davantage ces écarts. Le design et l’implémentation de ces nouvelles pratiques et politiques suivent ensuite.

Qu’est-ce qu’un plan de main-d’œuvre?
Le plan de main-d’œuvre résultant de ce processus est une feuille de route détaillée traitant des écarts actuels et futurs de main-d’œuvre. Bien qu’il soit vrai qu’une analyse complexe aide à quantifier les écarts critiques et à prioriser les investissements en main-d’œuvre, les plans les plus efficaces doivent être concis et faciles à comprendre. Si l’on ne parvient pas à ramener le processus et l’analyse de la planification de la main-d’œuvre à un plan concis, il sera difficile pour les unités administratives d’adapter ce plan à leur situation, de préserver la responsabilité et de mesurer le progrès. Le premier cycle de planification de la main-d’œuvre est le plus difficile, mais, lorsqu’il est fait correctement, il peut facilement être reproduit lors du cycle suivant.

Un plan de main-d’œuvre contient généralement :

  • les objectifs de planification de la main-d’œuvre;
  • les principaux défis;
  • l’état de la main-d’œuvre actuelle et les perspectives d’avenir;
  • les écarts dans les emplois critiques et non critiques;
  • les solutions envisagées au niveau de l’organisation et/ou des unités administratives;
  • la liste des actions à entreprendre;
  • la responsabilité de l’ensemble des acteurs du processus;
  • les mesures de succès et le calendrier des actions.

Un plan de main-d’œuvre bien construit met en lumière les particularités d’une organisation relativement à ses exigences et à sa proposition d’emploi, lui permettant ainsi d’attirer et de fidéliser les talents requis de manière plus efficace que ses compétiteurs.

L’impact par industrie

Bien que toutes les industries ressentent les impacts des changements démographiques au sein de la main-d’œuvre et des nouvelles dynamiques d’affaires, certaines sont plus affectées que d’autres. De façon spécifique, les problèmes liés à une main-d’œuvre vieillissante créent des écarts critiques dans les industries misant sur une main-d’œuvre expérimentée et possédant des connaissances techniques spécialisées. Par exemple :

  • Aviation, aérospatiale et défense
  • Santé
  • Assurances
  • Mines
  • Gaz et pétrole
  • Transport
  • Commodités

Conclusion
L’incertitude liée au contexte économique actuel plaide en faveur d’une saine planification de la main-d’œuvre au sein des organisations. En effet, il ressort de l’enquête En ces temps sans précédent de Mercer, menée à l’échelle mondiale en novembre 2008, que la grande majorité des organisations comptent continuer à embaucher les talents nécessaires pour combler les lacunes dans les domaines de compétences clés, même si elles envisagent des réductions d’effectifs à d’autres postes. Un plan de main-d’œuvre bien ancré autour des compétences clés actuelles et futures nécessaires à la pérennité d’une organisation lui permettra d’identifier ses meilleurs talents et de mettre en œuvre des programmes ciblés de fidélisation.

Marie-Christine Piron, CRHA, conseillère principale, et David Ward, conseiller, Mercer (Canada)

Source : Effectif, volume 12, numéro 4, septembre/octobre 2009.

Ajouté à votre librairie Retiré de votre librairie