Vous lisez : Étiquette en affaires : au-delà de la bienséance et de la tenue vestimentaire

La bienséance est de retour dans le monde des affaires. Réaction au laisser-aller ambiant ou nouvelle opération de charme? Quoiqu’il en soit, on n’a plus qu’à bien se tenir. Les apparences ne sont plus trompeuses et contribuent à l’image professionnelle. Désormais, la tenue à table est tout aussi importante que le maintien en entrevue. Telle est la leçon des nouveaux spécialistes du savoir-vivre : l’étiquette en affaires.

Pour inspirer confiance, on doit faire bonne impression. Maîtriser l’art de la conversation renforce la confiance en soi, améliore le pouvoir de persuasion et ajoute à la crédibilité. Il ne suffit plus d’arborer son plus beau sourire pour faire bonne figure… Loin de là! L’étiquette en affaires n’est pas une mince affaire. La maîtrise des règles de l’étiquette comme l’éloquence en public est un savoir-faire qui s’acquiert et se pratique. Dégager une belle impression, améliorer son apparence, s’exprimer sans verbiage exigent davantage que l’apprentissage des « mots magiques » de notre enfance, le maniement habile de la fourchette ou le port distingué de la cravate (ou de la jupe). Dans le quotidien des affaires, il faut connaître le moment propice pour remettre sa carte professionnelle ou l’instant privilégié pour discuter d’un contrat. Il faut savoir entamer une conversation ou conclure un entretien.

Le prélude aux affaires!
L’ignorance des règles de l’étiquette peut coûter cher en affaires. « Les maladresses peuvent perturber vos affaires et faire échouer vos négociations », affirme Ginette Salvas, présidente fondatrice de l’École internationale d’étiquette et de protocole. La maîtrise des règles de l’étiquette non seulement profite à l’image de la personne ou de l’équipe, mais elle reflète aussi le professionnalisme de l’entreprise par l’entremise de son personnel. « Nous n’insisterons jamais assez sur l’importance de l’image que vous offrez, car c’est aussi l’image de l’entreprise. Si vous savez de quelle façon et à quel moment agir, vous avez un avantage marqué sur vos concurrents », poursuit madame Salvas.

Pour Chantale Lacasse, spécialiste de l’étiquette en affaires et de l’image, huit petites secondes suffisent pour faire bonne ou mauvaise impression. Ainsi, « 85 % de vos succès en affaires vont de pair avec vos habiletés sociales », souligne cette diplômée de l’École du protocole de Washington. Ce savoir-faire jouerait un rôle crucial dans le développement d’une carrière professionnelle. « L’étiquette des affaires est l’outil idéal pour réussir le marketing de soi », assure-t-elle.

Hisser l’image de soi à son meilleur
L’objectif avoué des spécialistes de l’étiquette en affaires est d’aider une personne à se démarquer de la concurrence par des habiletés sociales et une image professionnelle hors du commun. À côté des subtilités des conversations d’affaires, l’étiquette des affaires se présente comme un service parmi une panoplie d’autres services se rapportant à la gestion de l’image de soi : apparence personnelle (coupe, maquillage, style vestimentaire, accessoires appropriés), communication verbale (intonation de la voix, style de langage), attitude gagnante (comportement positif, présentation dynamique). À cet égard, il existe d’ailleurs une association internationale des experts de l’image qui se nomme Association of Image Consultants International (AICI).

Leçons de présentation
Parfois, les règles d’étiquette en affaires peuvent s’éloigner des règles du savoir-vivre en société. Si les conventions sociales exigent de donner la priorité à la femme, en affaires, il est convenu (donc mieux vu) de faire passer son supérieur en premier ou de s’adresser prioritairement au client. Rien ne doit être négligé dans l’art des présentations. Il faut dire « bonjour » en regardant son interlocuteur et tendre la main en se déplaçant vers lui. Les cocktails d’affaires sont le meilleur terrain de jeux pour se familiariser avec cet exercice. Un abord chaleureux et la maîtrise de quelques phrases d’introduction devraient mettre à l’aise les personnes les plus embarrassées de leur personne. « Venez-vous souvent à ce genre d’activités? Dans quel domaine travaillez-vous? »

Toute personne du genre à semer ses cartes professionnelles à tout vent doit aussi savoir que ce n’est pas la meilleure façon de se démarquer… Pour ne pas que sa carte se perde dans le lot des cartes oubliées sur un coin de table, il faut la distribuer avec modération, à ceux qui manifestent le désir de garder le contact. Prendre le temps de l’échange rapporte plus que de multiplier les échanges.

Le Casual Friday, encore actuel?
Après l’émergence du style décontracté au travail (le fameux Casual Friday), le style vestimentaire strict redeviendrait-il la norme? Les opinions sont partagées. Pour les uns, les journées style relax, c’est du passé. Le retour de balancier est à l’allure classique. Le conformisme de l’employeur pèserait moins lourd dans cette tendance que les attentes des clients. Pour les autres, la liberté vestimentaire est toujours de rigueur pourvu qu’on n’entre pas au bureau en jeans, avec chaussures de sport ou sandales. Un décontracté chic sous toutes ses coutures vaudra mieux qu’un look guindé et inapproprié. Dans le doute, on doit privilégier une tenue classique et confortable!

L’étiquette à table
Bien des contrats se règlent autour d’une bonne table. Pour éviter de se « mettre les pieds dans le plat », l’hôte aura pris soin de choisir un restaurant qui offre de préférence un menu varié et de qualité et de confirmer la veille le rendez-vous avec son invité. L’hôte ne prendra pas d’apéritif ou de boisson alcoolisée avant l’arrivée de son invité à qui il réservera le meilleur siège, soit la banquette ou celui qui offre une vue. Les chaises en bout de table ne sont pas une place de choix.

L’accueil autant que le confort comptent aussi dans l’art d’inviter. L’hôte doit demander à son invité s’il souhaite un apéritif avant que le serveur ne le demande, sinon suggérer un vin pour accompagner le plat. Si on ne dispose que d’une heure, il faut éviter les menus à trois plats. Si le budget est limité, on peut recommander un ou deux plats à son invité afin de le guider vers un plat d’un prix équivalent.

Même si le temps presse, il est important de ne pas bousculer la conversation en abordant d’entrée de jeu la proposition d’affaires. L’entrée en matière devrait plutôt servir à susciter un climat de confiance. Les conditions du contrat ou les tarifs du consultant devraient se négocier au bureau plutôt qu’au restaurant.

Quelques exemples de faux pas dont il faut absolument se préserver durant le repas : parler la bouche pleine, déposer son cellulaire sur la table ou le laisser allumé, poser les coudes sur la table, changer sa fourchette de main, manger son pain sans le briser, s’affaler dans sa chaise.

À chaque culture son étiquette
Il faut aussi savoir qu’il y a des différences culturelles dans l’art de se saluer. Un client européen pourrait être froissé de se faire tutoyer par le premier venu. En effet, le vouvoiement est de mise dans nombre de cultures. Aussi, il faut mettre un frein à l’habitude de faire la bise ou de pratiquer l’accolade au risque de heurter son partenaire d’affaires. Une ferme poignée de main n’est pas du goût de l’interlocuteur provenant d’Asie ou du Moyen-Orient. En outre, une décontraction « à l’américaine » impressionnera peu les clients qui proviennent d’ailleurs sur la planète. Pour négocier avec des gens d’affaires venant d’Asie, d’Afrique ou d’Europe, il est préférable de se renseigner sur l’étiquette en usage dans leur culture. Heureusement, les sources d’information sont accessibles. Ainsi, le Projet des profils culturels de Citoyenneté et Immigration Canada fournit des renseignements utiles sur la culture et les coutumes de nombreux pays.

Entre posture corporelle et disposition d’esprit
En conclusion, disons que toute l’élégance d’une personne ne sera jamais contenue dans une tenue soignée. Répondre avec tact est une élégance de l’esprit qui dépasse le simple respect de l’étiquette. Sans doute les faiseurs d’images trouvent-ils ici une limite à leur savoir-faire. Au-delà des règles impersonnelles de la bienséance, on doit se faire une règle personnelle de toujours traiter son interlocuteur avec bienveillance et d’éviter toute forme d’arrogance. Et si un atout insoupçonné de l’étiquette en affaires était d’introduire un peu d’humanité dans nos rapports d’affaires?

Myriam Jézéquel, journaliste indépendante

Source : Effectif, Volume 11, numéro 5, novembre/décembre 2008

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