Vous lisez : La fin du bureau personnel?

Encombré de piles de dossiers, de photos de famille et de diplômes, le bureau au travail est souvent un deuxième chez-soi. Dès le début, on prend possession de son bureau. On déplace l’ordinateur, on y dispose une plante verte et on y apporte sa tasse à café.

Cet espace de travail est souvent un reflet du statut de son propriétaire. Qui ne rêve du « bureau avec une porte qui ferme »? Pourtant, une nouvelle tendance émergente risque de bousculer les habitudes dans le monde du travail : le bureau partagé.

On connaît déjà les espaces locatifs partagés par plusieurs travailleurs autonomes qui disposent ainsi de bureaux à moindre coût. En gros, chacun paye une partie des frais de location d’une grande salle et y aménage son coin bureau. Aujourd’hui, certaines entreprises traditionnelles poussent le concept encore plus loin. Plutôt que d’avoir son propre bureau, l’employé s’installe le matin à n’importe quel poste de travail disponible et fait place nette quand la journée est terminée. Avant de se révolter en se disant que, vraiment, les patrons sont devenus incroyablement radins, voyons plutôt à quoi sert réellement ce concept.

Après les salaires, les frais reliés à la construction ou à la location d’espaces de bureau sont les plus grosses dépenses d’une entreprise. Sans compter bien sûr les autres coûts tels que les lignes téléphoniques, le mobilier, le chauffage, l’électricité, etc. Si deux ou trois personnes occupent le même espace de travail, on peut réduire d’autant la superficie des locaux.

Par ailleurs, pourquoi une personne aurait-elle besoin d’un bureau à elle seule? Avant l’arrivée des nouvelles technologies, le bureau personnel était un endroit où se trouvaient un téléphone et une quantité phénoménale de papiers. Les dossiers occupaient, physiquement, une grande partie du bureau! Tout ceci n’est plus nécessaire. On peut être joint à tout moment par cellulaire et un petit disque dur d’ordinateur portable peut facilement loger l’équivalent de vingt-cinq classeurs.

Bien sûr, pour partager un bureau, il ne suffit pas de réduire l’espace physique. Il faut également réduire le temps passé dans le bureau! C’est dire que le bureau partagé s’adresse plutôt aux employés travaillant sur la route, comme les vendeurs et les représentants ou les consultants qui souvent travaillent dans l’entreprise du client.

Avantages et insécurité
Parmi les avantages signalés tant par les gestionnaires que par les utilisateurs de bureaux partagés, on retrouve en tête de liste une plus grande propreté et un sentiment d’efficacité accru. En effet, puisqu’il est impossible de laisser traîner ses affaires et de les accumuler, les stations de travail sont toujours dégagées et ordonnées. C’est d’ailleurs ce qui permet des aménagements à aires ouvertes et lumineuses. Il y a également moins de sources de distractions, comme des décorations, des post-it ou des livres qui traînent. Cela permet aussi de faire la connaissance de nouvelles personnes puisqu’il y a toujours un roulement.

À l’opposé, ce genre d’organisation demande une gestion attentive des ressources humaines pour s’assurer qu’il n’y aura pas une « surpopulation » inattendue certains jours de la semaine. Certaines personnes ont également le sentiment de jouer à la chaise musicale et de ne jamais pouvoir poser leurs valises entre les déplacements, ce qui accentue leur stress et leur fatigue.

Finalement, si le bureau partagé peut s’avérer une source d’économies pour l’entreprise, il est important de s’assurer que les travailleurs s’y sentent à l’aise. Si certains y voient une plus grande autonomie et y trouvent un sentiment de légèreté, il peut en insécuriser d’autres. De menus avantages qui peuvent sembler anodins, tel un endroit pour ranger ses mouchoirs ou ses collations, sont bien appréciés. Il faut éviter que la perte du bureau personnel soit vue comme une dégradation des conditions de travail. En créant au sein de l’entreprise des activités favorisant le sentiment d’appartenance, les contacts humains et la stabilité, on facilite la transition vers ce mode de fonctionnement qui peut s’avérer économique et stimulant.

Stéphanie Lalut, journaliste indépendante

Source : Effectif, volume 11, numéro 3, juin/juillet/août 2008.

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