Vous lisez : L’efficacité dans le rôle-conseil : une question d’initiative

Au cours des dernières semaines, Cindy a effectué des entrevues de départ avec trois employés de Michel, son client gestionnaire. Cela l’a amenée à lui recommander diverses mesures correctives pour améliorer le climat de travail, qui est une cause d’insatisfaction majeure dans ce groupe.

Or, elle constate que ses recommandations n’ont pas été appliquées et que le climat de travail continue de se détériorer. Elle en éprouve de la contrariété, car selon elle, Michel manque à son devoir de gestionnaire en n’agissant pas. Elle est tentée de se dire : « Qu’il s’arrange, moi j’ai fait ce que je pouvais pour l’aider! ». Par ailleurs, elle s’inquiète aussi de sa compétence à intervenir efficacement auprès de ce client. 

La responsabilité de l’intervenant
Lorsqu’il exerce un rôle-conseil, l’efficacité du professionnel en ressources humaines dépend en grande partie de sa capacité à gérer adéquatement ce genre de situation. Il doit parfois être déterminé et combatif pour mettre en place un cadre d’intervention efficace à la fois pour lui et pour son client.

La séquence ERVA
La séquence ERVA (écouter-réfléchir-valider-agir) rappelle à l’intervenant qu’il ne faut pas réagir impulsivement ou céder à la tentation de porter un jugement rapide. Comme il y a toujours deux côtés à une médaille, il doit prendre soin de valider ses hypothèses avant de tirer des conclusions.

Pour être un intervenant efficace, le professionnel RH doit démontrer de la curiosité et de l’intérêt pour les enjeux inhérents à la situation, plutôt que de se limiter aux premières informations disponibles. Il ne peut prétendre bien conseiller son client s’il se contente de la seule version de ce dernier... ou de la sienne propre.

L’intervenant doit donc ouvrir le dialogue avec son client pour bien comprendre son contexte et ses résistances. Cela exigera de sa part de ne pas bousculer son client, d’être attentif à ce qu’il tente d’exprimer au-delà des mots. Il doit mettre l’accent sur la collecte d’informations pertinentes pour éclairer sa compréhension de la situation telle qu’elle est vécue par le client.

Les trois composantes de l’efficacité 
Pour assurer la qualité de sa relation avec son client, l’intervenant sera attentif aux trois composantes suivantes :

1. la finalité recherchée, qui repose sur une compréhension et une adhésion commune aux objectifs de la relation entre le conseiller en ressources humaines et son client;
2. les exigences et les contraintes de cette relation, ce qui inclut leur capacité respective à consacrer le temps nécessaire à l’atteinte des objectifs;
3. le lien de confiance qui existe entre le client et son conseiller en ressources humaines, qui s’appuie sur la crédibilité mutuelle qu’ils veulent bien s’accorder.

Améliorer la relation  
Si la relation entre le client et l’intervenant est boiteuse ou insatisfaisante, c’est qu’il y a une de ces trois composantes qui fait défaut. Dans la fonction de rôle-conseil, c’est au conseiller en ressources humaines de prendre l’initiative d’améliorer la relation, et non pas à son client.

En effet, en gestion des ressources humaines, il faut assumer un rôle d’influence et non pas d’autorité auprès de la clientèle. Le conseiller RH aurait donc beaucoup à perdre s’il baissait les bras et renonçait à prendre l’initiative d’améliorer la qualité de la relation alors que c’est son principal outil de travail!

Dans notre exemple, la démarche de Cindy consistera donc à rencontrer son client et à lui faire mention de l’inconfort qu’elle perçoit. Elle abordera chacune des trois composantes avec Michel, pour identifier avec lui les ajustements qui pourraient être apportés pour améliorer la qualité de leur relation. Voici comment elle pourrait ouvrir le dialogue.

1. La finalité recherchée

  • Comment percevez-vous le rôle et l’utilité d’une intervenante comme moi dans notre entreprise?
  • Y voyez-vous une valeur ajoutée pour votre propre efficacité comme gestionnaire?

2. Les exigences et les contraintes

  • Jusqu’à maintenant, notre relation a-t-elle été une contrainte pour vous dans l’organisation de votre temps et de votre agenda? 
  • Y a-t-il eu des recommandations, des choses à faire qui vous ont mis mal à l’aise? 

3. Le lien de confiance

  • Y a-t-il quelque chose qui vous déplaît dans ma façon de m’exprimer et de me comporter envers vous et les autres?
  • Qu’est-ce que c’est pour vous, un bon conseiller en ressources humaines?

L’objectif de cette discussion n’est évidemment pas de répondre aveuglément aux attentes de Michel. Il est plutôt de tenter de cerner la source de l’inconfort qui s’est installé dans la relation entre le client et l’intervenant. Par son écoute attentive et son ouverture aux commentaires du client, l’intervenant trouvera l’espace pour exprimer aussi son point de vue, calmement et en toute simplicité.  

L’accord entre les parties
Pour conclure cette rencontre, le conseiller en ressources humaines fera une synthèse objective de la discussion et s’entendra avec son client sur les éléments significatifs qu’il faut en retenir, c’est-à-dire les ajustements à apporter de part et d’autre pour que la relation soit aussi efficace que possible.

C’est seulement à cet instant que Cindy aura la satisfaction d’avoir été une intervenante efficace auprès de son client. Plutôt que de remettre en cause sa compétence dans son rôle-conseil, elle aura pris l’initiative d’aller vers son client pour améliorer la qualité de leur relation, ce qui constitue son outil de travail le plus déterminant.

Références

BÉDARD, Isabelle. Gérer le personnel, 2e édition, I.Q. éditeur, 2011, 163 pages.
BÉDARD, Isabelle. Communiquer pour susciter la collaboration, Bookboon.com (téléchargement gratuit), 2014.
GAMASSOU Claire, Edey et MOISSON-DUTHOIT, Virginie. « Le travail des professionnels de la relation d’aide », Gestion, vol. 37 no 2, 2012.


À propos de l'auteure
Isabelle Bédard, CRHA, MBA, ADM.A, C.M.C. est présidente-directrice générale chez CIB Développement organisationnel

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