Vous lisez : Recruter à l’étranger

Au cours de la dernière décennie, le monde professionnel canadien a grandement évolué. Avec la mondialisation, l’ouverture des frontières, l’augmentation du commerce international et le recrutement global, les employeurs ont vite réagi en élargissant leurs frontières lorsqu’il s’agissait de recruter la personne idéale pour un poste au sein de leur entreprise. Il n’est toutefois pas toujours si simple pour un individu de venir au Canada et il est nécessaire de penser aux exigences des autorités canadiennes en matière d’immigration.

Visite au Canada pour une entrevue
Un employeur désirera généralement rencontrer le candidat avant d’arrêter son choix. Bien que l’employeur puisse décider de se déplacer pour rencontrer le candidat, il est souvent préférable que le candidat lui-même se déplace, ne serait-ce que pour établir un premier contact avec la ville, l’entreprise et l’environnement. Participer à une entrevue dans le cadre de la recherche d’un emploi au Canada est une activité permise pour un visiteur. Ainsi, bon nombre d’individus peuvent simplement se présenter au Canada pour y rencontrer un employeur potentiel. Dans de nombreux cas, le candidat n’aura pas l’obligation d’obtenir une autorisation préalable avant de venir au Canada pour l’entrevue. Les points suivants seront cependant importants à noter dans le cadre de la préparation d’une telle rencontre :

  • le candidat désirant venir au Canada pour assister à une entrevue doit être muni d’un passeport valide;
  • les candidats de nombreux pays doivent préalablement obtenir un visa de résident temporaire; ce document est émis par une ambassade, un consulat ou un haut commissariat canadien et les délais d’obtention peuvent varier de 24 heures à plus de six semaines; la liste des pays dont les citoyens doivent requérir un visa pour venir au Canada se trouve dans le site de Citoyenneté et Immigration Canada     
  • un individu ayant un casier judiciaire, même si ce dernier date de plusieurs années, pourrait se voir refuser l’admission au Canada;
  • le candidat doit démontrer son intention de quitter le Canada à la fin du séjour autorisé.

Il est tout à fait légitime pour un candidat de rencontrer les membres de l’équipe qui l’accueillera, de visiter les lieux, de rechercher un appartement, de s’informer auprès des écoles et d’effectuer toutes les démarches préliminaires à son intégration dans ce nouvel environnement, alors qu’il se trouve au Canada à titre de visiteur. Le candidat ne peut cependant pas commencer à travailler, ni même recevoir une formation au sein de l’entreprise, avant d’obtenir l’autorisation requise sous la forme d’un permis de travail.

Permission de travailler
Le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le Règlement) prévoit qu’un étranger ne peut travailler à moins d’y être spécifiquement autorisé. Ainsi la majorité des individus qui ne sont pas citoyens ou résidents permanents du Canada doivent obtenir un permis de travail avant de pouvoir occuper un emploi au Canada. Il existe une multitude de façons d’obtenir un permis de travail et chaque cas doit être évalué individuellement. La procédure courante d’émission d’un permis de travail exige d’abord l’obtention par le travailleur étranger d’un avis sur le marché du travail, fourni conjointement par Service Canada et le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC). Cette première étape a pour objectif de vérifier si l’offre d’emploi répond à divers critères énumérés par la loi. Ainsi, l’employeur doit démontrer que l’offre répond aux critères de l’article 203 du Règlement, soit :

  1. le travail est susceptible d’entraîner la création directe ou le maintien d’emploi pour des citoyens canadiens et/ou des résidents permanents;
  2. le travail est susceptible d’entraîner le développement ou le transfert de compétences ou de connaissances au profit des citoyens canadiens et/ou des résidents permanents;
  3. le travail est susceptible de résorber une pénurie de main-d’œuvre;
  4. les salaires et les conditions de travail offerts sont suffisants pour attirer et maintenir dans ce travail des citoyens canadiens et/ou des résidents permanents;
  5. l’employeur a fait ou accepté de faire des efforts raisonnables pour recruter ou former des citoyens canadiens et/ou des résidents permanents;
  6. le travail de l’étranger n’est pas susceptible de nuire au règlement d’un conflit en cours ou à l’emploi de toute personne touchée.

Ainsi, l’employeur devra démontrer qu’il a fait des efforts raisonnables pour recruter au Canada ou qu’il est en mesure de démontrer les raisons particulières pour lesquelles il est nécessaire pour lui d’aller recruter à l’étranger. Il est ainsi fortement recommandé de conserver des preuves de toute démarche effectuée (annonce dans les journaux ou sur Internet, recours aux services de chasseurs de têtes, programme de récompense interne, etc.). L’employeur devra également s’assurer d’offrir des conditions de travail et un salaire compétitifs. Une fois les autorités satisfaites, une lettre conjointe sera émise à l’effet que l’avis sur le marché du travail est positif. Avec cet avis en main, le candidat peut présenter une demande de permis de travail. Cette demande peut être déposée directement au point d’entrée (soit à l’arrivée du travailleur à l’aéroport ou à la frontière) s’il est citoyen d’un pays ne requérant pas de visa de résident temporaire. Si toutefois le candidat doit obtenir un visa, sa demande de permis de travail devra être déposée au consulat, à l’ambassade ou au Haut Commissariat dans son pays de citoyenneté ou de résidence.

Outre cette procédure générale d’obtention d’un permis de travail, il existe plusieurs cas où l’avis sur le marché du travail n’est pas requis. En effet, un candidat peut obtenir un permis de travail au Canada grâce à des ententes internationales, tels l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et l’Entente France-Canada, ou en fonction d’exemptions présentes dans le Règlement, comme la mutation dans l’entreprise, le permis de travail pour étudiant et les avantages significatifs pour le Canada. Il existe en effet près d’une soixantaine d’exemptions qui exigent chacune une évaluation plus approfondie de la situation particulière du candidat et de son employeur canadien potentiel. Bénéficier d’une exemption de l’obligation d’obtenir un avis sur le marché du travail facilite toutefois l’obtention du permis de travail, puisque la demande peut être effectuée directement auprès de Citoyenneté et Immigration Canada sans avoir au préalable à s’adresser à Service Canada et au MICC.

Lorsqu’une entreprise décide d’engager un travailleur à l’étranger, elle doit s’attendre à faire face à des délais additionnels avant que l’employé en question ne puisse occuper son emploi. L’obtention d’un permis de travail peut prendre entre dix jours et huit semaines, en fonction de la voie à suivre pour obtenir le permis de travail, du pays de citoyenneté du candidat et des délais de traitement des divers services gouvernementaux.

Résidence permanente
Il est important de noter que le permis de travail est un document qui est octroyé uniquement pour une période temporaire pouvant varier entre six mois et trois ans. Ce permis est renouvelable, mais demeure temporaire. Un travailleur étranger pourrait obtenir la résidence permanente canadienne en déposant dans un premier temps une demande auprès des Services d’immigration du Québec afin d’être sélectionné par la province. La sélection est effectuée en fonction de nombreux critères tels que l’âge, les diplômes obtenus, l’expérience de travail y compris celle au Québec, la connaissance de l’anglais et du français, les liens avec le Québec, la présence de membres de la famille accompagnant le travailleur et les possibilités d’adaptabilité du candidat.

Citoyenneté
Il est intéressant de savoir qu’un résident permanent ayant accumulé 1095 jours de présence physique au Canada au cours des quatre dernières années peut demander la citoyenneté canadienne. Le Canada n’exige pas que l’individu renonce à sa citoyenneté actuelle et accepte la présence d’une double citoyenneté.

En conclusion, il est clair que la décision de faire appel à un travailleur étranger implique la nécessité d’y investir de nombreuses ressources, qu’elles soient financières ou humaines, mais le processus peut certainement être fort bénéfique, tant pour le travailleur que pour l’entreprise.

Malgré les difficultés procédurales, les travailleurs étrangers possèdent souvent une expertise unique et une expérience internationale fort avantageuse pour l’entreprise et sont donc une ressource fort intéressante pour combler les besoins de main-d’œuvre de toute entreprise canadienne.


Chantal Arsenault, avocate pour le cabinet Ogilvy Renault

Source : VigieRT, numéro 26, mars 2008.

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