Vous lisez : Quelques outils pour appuyer la gestion de l’absentéisme

La gestion de l’absentéisme est un défi auquel se butent régulièrement les professionnels de la gestion des ressources humaines.

Le problème est particulièrement délicat lorsque le salarié invoque des problèmes de santé pour justifier ses absences. Comment réagir alors? Le premier réflexe est d’exiger de l’employé qu’il présente un certificat médical pour justifier son absence. Malheureusement, dans plusieurs cas d’espèce, le recours à une telle exigence ne permet pas toujours d’effacer les doutes qui persistent dans l’esprit du gestionnaire relativement à la validité des motifs invoqués par le salarié.ans plusieurs cas d’espèce, le recours à une telle exigence ne permet pas toujours d’effacer les doutes qui persistent dans l’esprit du gestionnaire relativement à la validité des motifs invoqués par le salarié.

Le certificat peut en effet présenter des lacunes : il ne comporte aucun diagnostic, il est émis lors d’une visite postérieure à la date du début de l’absence, il est émis par un professionnel de la santé autre qu’un médecin ou encore il ne confirme aucune incapacité. Que faire dans de telles circonstances? L’employeur peut-il se permettre d’être plus exigeant et quelles sont ses chances de succès si le salarié conteste sa décision?

Une décision récente d’un arbitre de griefs apportera certainement de l’aide aux gestionnaires qui font face à de tels problèmes. En effet, le 11 novembre 2010, Me Robert Choquette rendait une décision dans un dossier impliquant Les Aliments Cargill Ltée et les Travailleurs et Travailleuses Unis de l’Alimentation et du Commerce, TUAC, Local 500 D.T.E. 2010T-817. Dans ce dossier les parties avaient soumis à l’arbitre une série de papiers médicaux concernant une douzaine de salariés qui avaient vu leur attestation médicale d’absence refusée par l’employeur pour différents motifs dont les suivants :

  • le médecin a vu le salarié le 11 avril pour informer qu’il a été malade le 9 avril; l’employeur considère qu’il s’agit d’un billet de complaisance;
  • le médecin attestait d’une incapacité ayant débuté trois jours avant sa rencontre avec le salarié sans expliquer ses motifs pour reconnaître une incapacité ayant débuté à ce moment pour se prolonger ensuite trois jours après sa rencontre;
  • l’arrêt de travail est survenu le 9 avril et le billet médical porte la date du 19 avril;
  • le billet médical a été remis trois jours après le retour au travail;
  • le billet médical a été signé par l’inhalothérapeute qui donnait des traitements au salarié;
  • le billet médical a été signé par un chirurgien dentiste qui attestait d’une incapacité suite à une douleur de la mâchoire lorsque le salarié travaillait au froid;
  • le billet médical ne faisait qu’attester de la visite du salarié au bureau du médecin et ne comportait aucun diagnostic et aucune confirmation d’une incapacité quelconque;
  • le billet médical ne comportait aucune mention de la nécessité d’un arrêt de travail;
  • le billet médical ne comportait pas la mention d’un diagnostic.

Les parties demandèrent donc à l’arbitre de rendre une décision déclaratoire sur toutes les questions qui lui étaient soumises. Les points importants qui ressortent de cette décision arbitrale sont les suivants...

  • À moins d’une disposition précise d’une convention collective qui restreindrait un tel droit, l’employeur est en droit d’exiger que le salarié remette un certificat médical à son retour au travail, pour autant qu’une telle pratique ne soit pas déraisonnable ou abusive.

    Bien que l’arbitre n’explique pas ce qu’il considère comme des cas relevant de cette exception, on peut imaginer qu’une telle exigence devant une absence d’une journée, dans le cas d’un salarié qui n’a présenté dans le passé aucun problème d’absentéisme et quand l’employeur n’a aucune motif raisonnable de douter de la validité du motif allégué, pourrait être comprise dans cette exception.
     
  • L’employeur peut exiger qu’un certificat médical soit remis de façon contemporaine au retour au travail pour assurer un contrôle et un suivi efficace de l’assiduité du salarié.

    Toutefois, le retard du salarié à remettre le papier médical ne peut, en soi seulement, justifier un employeur de refuser de reconnaître l’invalidité du salarié. La demande vise en effet à faire confirmer l’incapacité du salarié lors de ses jours d’absence. L’employeur serait donc mal venu de refuser un certificat qui répond à cette question même s’il a été remis en retard, à moins que ce retard n’empêche l’employeur de faire les vérifications nécessaires. Dans le cas qu’il avait à analyser, le salarié s’absentait de façon répétitive et retardait à chaque fois la remise du billet médical, même après avoir été averti par l’employeur. L’arbitre a alors conclu que l’employeur était justifié de refuser le billet médical remis par le salarié.
     
  • L’employeur est justifié d’exiger que le certificat médical fasse plus que d’attester uniquement de la visite du salarié chez le médecin et qu’en conséquence, il comporte soit un diagnostic, soit une confirmation de l’incapacité du salarié de travailler. Le fait que le salarié se rende chez un médecin ne veut pas nécessairement dire que son état de santé justifie son absence. Cette décision relève de l’expertise du médecin qui devra donc porter un jugement sur la situation.
     
  • L’employeur est justifié de refuser un papier médical émis plus de 24 heures émis suite à une visite chez un médecin plus de 24 heures après le début de l’absence, à moins que le médecin puisse confirmer objectivement l’existence de l’incapacité depuis le début de l’absence. Même si la visite est postérieure au début de l’absence, il existe évidemment des situations où la nature de la maladie ou de l’incapacité constatée le lendemain permet tout de même au médecin de confirmer que cette incapacité existait le ou les jours précédents la visite. C’est ce que le médecin doit confirmer.
     
  • Pour être valable, un certificat médical d’incapacité doit provenir d’un médecin du fait qu’un tel acte est une activité réservée au médecin en vertu des dispositions de l’article 31 de la Loi médicale (L.R.Q., chapitre M-9). Cette loi prévoit que :
    « 31. L'exercice de la médecine consiste à évaluer et à diagnostiquer toute déficience de la santé de l'être humain, à prévenir et à traiter les maladies dans le but de maintenir la santé ou de la rétablir.
    Activités réservées.

    Dans le cadre de l'exercice de la médecine, les activités réservées au médecin sont les suivantes :
  • diagnostiquer les maladies;
  • prescrire les examens diagnostiques;
  • utiliser les techniques diagnostiques invasives ou présentant des risques de préjudice;
  • déterminer le traitement médical. »
  • L’arbitre a conclu que, sauf exception, « seul un médecin ou membre de l’Ordre des médecins du Québec peut donner un diagnostic de toute déficience de la santé de l’être humain ». Dans le cadre particulier qu’il avait à l’étude, il avait accepté un certificat émis par un chirurgien dentiste du fait qu’il considérait que la nature des problèmes du salarié relevait tout autant de la spécialisation d’un chirurgien dentiste que de celle d’un médecin.

Ces éléments, bien qu’ils ne donnent pas une solution à tous les problèmes rencontrés dans la gestion quotidienne des problèmes d’absentéisme, devraient donc tout au moins permettre aux gestionnaires des ressources humaines d’exercer une certaine forme de contrôle sur l’assiduité des salariés et d’intervenir plus facilement en cas d’abus.

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Source : VigieRT, février 2011.

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