Vous lisez : Notions essentielles en matière de main-d’œuvre étrangère

L’importance grandissante de l’espace occupé par la main-d’œuvre étrangère sur le marché du travail place la plupart des dirigeants d’entreprise devant cette nouvelle réalité, qu’ils y soient préparés ou non. Cet article fait un bref survol de quelques notions essentielles concernant les travailleurs étrangers, que tout bon gestionnaire des ressources humaines devrait connaître dans le contexte actuel.

Travailleur étranger et travail au Canada : définitions
Un travailleur étranger n’est pas citoyen ou résident permanent du Canada. Les personnes dont le numéro d’assurance sociale (NAS) débute par le chiffre 9 sont des résidents temporaires du Canada. Ces NAS temporaires ont une date d’échéance, la même que celle du permis de travail. Donc, pour savoir si des ressortissants étrangers travaillent au sein de votre entreprise, vérifiez leur NAS.

Pour qu’un immigrant temporaire ait besoin d’un permis de travail, ses occupations au Canada doivent donner lieu au paiement d’un salaire ou d’une commission ou être en concurrence directe avec les activités des Canadiens sur le marché du travail. Donc, soit il y a rémunération, soit il y a pénétration du marché du travail, mais dans la plupart des cas, les deux éléments seront présents. Toutefois, la présence d’un seul suffit pour engendrer la nécessité d’obtenir un permis.

Diligence de l’employeur et documents requis
Selon l’article 124(1) c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (Canada), la personne qui embauche un étranger non autorisé à occuper l’emploi en vertu de cette Loi commet une infraction. Sur déclaration de culpabilité, l’auteur d’une telle infraction est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 50 000 $ et d’un emprisonnement maximal de deux ans.

Les employeurs ont donc tout intérêt à s’assurer qu’ils agissent en conformité avec cette Loi. De plus, le paragraphe (2) du même article leur impose un devoir de diligence, en prévoyant que celui qui engage un étranger non autorisé à travailler au Canada sans avoir pris les mesures voulues pour connaître sa situation est réputé savoir que ce dernier n’était pas autorisé à occuper l’emploi.

Avant d’embaucher un ressortissant étranger, il faut donc effectuer la vérification d’au moins une de ses pièces d’identité officielles tel le passeport, puis obtenir une copie de son permis de travail, laquelle sera classée par l’employeur dans le dossier de l’employé. L’original doit demeurer en possession de l’immigrant temporaire. Il est nécessaire de vérifier les conditions du permis imposées par les autorités émettrices (ex. s’il est ouvert ou non) ainsi que la profession et le lieu d’emploi mentionnés et de s’assurer de les respecter. Lorsque le travailleur demande une modification aux conditions de son permis, celle-ci n’entrera en vigueur qu’au moment où elle aura été accordée et que le nouveau permis aura été délivré. Entre-temps, il faut continuer d’observer les conditions qui figurent sur le permis.

Procédure pour l’embauche de main-d’œuvre étrangère
L’employeur qui désire embaucher un travailleur étranger doit obtenir un avis relatif au marché du travail (AMT) auprès du ministère des Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) et démontrer que l’embauche projetée n’aura pas de répercussions négatives sur le marché du travail local. Depuis l’an dernier, le RHDCC exige que les employeurs prouvent qu’ils ont déployé des efforts de recrutement minimaux. Les normes varient selon la province d’emploi et la profession visée.

Au Québec, il faut également faire valider l’offre d’emploi par le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles. L’immigrant temporaire doit aussi obtenir de ce dernier un certificat d’acceptation du Québec (CAQ) en démontrant qu’il possède les compétences requises pour le poste offert.

De nombreuses exemptions s’appliquent relativement au processus d’AMT et à l’obtention d’un CAQ. L’employeur et le travailleur étranger doivent donc s’assurer qu’ils ne peuvent se prévaloir d’aucune d’entre elles avant d’entreprendre ces longues démarches.

Cessation d’emploi avant la fin du permis de travail
Les règles habituelles en matière de cessation d’emploi sont applicables aux immigrants temporaires de la même façon qu’elles le sont aux travailleurs canadiens.

L’employé étranger qui perd son emploi n’est pas obligé de quitter le Canada immédiatement, car son statut demeure valide tant que son permis de travail n’est pas expiré. Il doit continuer de respecter les conditions qui y sont prévues, notamment celle de ne travailler pour nul autre employeur que celui y figurant, à moins d’obtenir un permis amendé. Cette question ne se pose toutefois pas dans les cas où la personne détient un permis de travail ouvert, c'est-à-dire qui lui permet d’être embauchée par n’importe quel employeur.

Renouvellement du permis
Le délai de traitement en vue du renouvellement d’un permis de travail au Canada peut être très long : plus de trois mois peuvent parfois s’écouler entre le dépôt de la demande et la décision. Il faut donc s’y prendre à l’avance.

Néanmoins, la législation prévoit un statut implicite à la personne qui a déposé une telle demande et sur laquelle une décision n’a pas encore été rendue. En effet, cette personne peut continuer de travailler pendant le traitement de sa requête aux mêmes conditions que celles qui figurent sur son permis de travail qui vient d’expirer. Dans ce cas, l’employeur prudent verra à obtenir une preuve que la demande a bel et bien été reçue par les autorités canadiennes à Vegreville en Alberta, et que les frais exigés ont été acquittés, à moins que le travailleur ne bénéficie d’une exemption.

Modifications à venir
Le gouvernement fédéral a déposé l’automne dernier un projet de règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés qui propose plusieurs amendements au programme des travailleurs temporaires. Quoique le texte ne soit pas encore définitif et que la date de son entrée en vigueur ne soit toujours pas arrêtée, le législateur a déterminé certains problèmes auxquels il veut s’attaquer. Il faut donc rester aux aguets, car ces modifications auront une incidence importante sur les employeurs de tous les horizons, qu’il s’agisse de ceux d’une multinationale ou d’une PME ou même d’un particulier qui embauche une aide à domicile.

Passage du statut temporaire au statut permanent
Les autorités fédérales et provinciales ont multiplié leurs efforts au cours des dernières années pour faciliter le passage du statut de travailleur temporaire à celui de résident permanent. Dans ce contexte, le Québec a récemment instauré le Programme de l’expérience québécoise. Ainsi, depuis le 14 février 2010, une personne qui travaille au Québec dans une profession de niveau O, A ou B de la Classification nationale des professions depuis au moins 12 des 24 derniers mois et qui possède une connaissance du français oral de niveau intermédiaire (niveau B1 du Cadre européen commun de référence) ou plus élevé peut obtenir un certificat de sélection du Québec et faire une demande de résidence permanente. Ce programme comprend aussi un volet pour les étudiants étrangers diplômés du Québec ou en voie de l’être.

Le processus est donc grandement facilité et accéléré pour cette clientèle cible et permet la rétention de la main-d’œuvre à long terme.

On retiendra de l’examen de ces sept notions concernant l’emploi de ressortissants étrangers qu’il est important pour tous les employeurs de se renseigner sur ce sujet, d’être vigilants et de bien connaître les lois et les restrictions qui régissent et restreignent l’embauche de main-d’œuvre étrangère. En ne laissant rien au hasard, les deux parties bénéficieront de cette expérience.

Nadine Landry, avocate chez Lavery

Source : VigieRT, numéro 46, mars 2010.

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