Vous lisez : ÉTUDE DE CAS – Civilité au travail et harcèlement
Le Code civil du Québec (C.c.Q.) établit les règles applicables au contrat de travail, et ce, peu importe qu’il s’agisse d’un employé syndiqué ou non.

 Tout employé est assujetti à l’article 1434 C.c.Q., lequel prévoit que « Le contrat valablement formé oblige ceux qui l'ont conclu non seulement pour ce qu'ils y ont exprimé, mais aussi pour tout ce qui en découle d'après sa nature et suivant les usages, l'équité ou la loi. »

- L’article 2088 C.C.Q. précise que « Le salarié, outre qu'il est tenu d'exécuter son travail avec prudence et diligence, doit agir avec loyauté et ne pas faire usage de l'information à caractère confidentiel qu'il obtient dans l'exécution ou à l'occasion de son travail.

Ces obligations survivent pendant un délai raisonnable après cessation du contrat, et survivent en tout temps lorsque l'information réfère à la réputation et à la vie privée d'autrui. »

L’obligation de civilité au travail découle de l’obligation de prudence et de diligence qui se rattache au contrat de travail.

Le harcèlement au travail est considéré comme un manquement à cette obligation.

Dans TCA — Québec, section locale 1849 (FTQ) et Thales Optronique Canada (Line Lafond), SOQUIJ AZ-50700988, l'employeur a congédié la plaignante pour avoir manqué à l'obligation de civilité à l'égard de ses collègues et de ses supérieurs ainsi que pour avoir fait preuve d'insubordination continue.

L’arbitre qui a tranché le litige, Me Denis Provençal, explique bien les principes qui s’appliquent lorsqu’un employé manque de respect ou tient des propos injurieux à l’égard de ses supérieurs ou de ses collègues.

L’arbitre précise d’abord que même si elle n'est pas précisément mentionnée à l'article 2088 C.c.Q., l’obligation de civilité, appelée également obligation de convivialité par la doctrine, provient du devoir général de prudence et de diligence découlant de la nature du contrat de travail en vertu de l'article 1434 C.c.Q., de l’article 4 de la Charte des droits et libertés de la personne, lequel énonce que toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation, et de l’article 6 C.c.Q. précisant que toute personne est tenue d'exercer ses droits civils selon les exigences de la bonne foi.

Conformément à l’article 2087 C.c.Q., l’employeur a l'obligation de prendre les mesures appropriées afin de protéger la dignité du salarié et il doit, suivant la Loi sur les normes du travail, prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique.

Aussi, l’obligation de civilité impose à chacun de faire un effort raisonnable afin de maintenir un climat de travail harmonieux et agréable.

L’arbitre précise ensuite qu’il ne s’agit pas de décider si la plaignante a contrevenu aux dispositions prohibant le harcèlement psychologique prévues à la Loi sur les normes du travail.

Toutefois, il conclut que les conduites vexatoires de cette dernière envers ses collègues et ses supérieurs contreviennent à son obligation de civilité. L’arbitre considère que l’attitude froide de la plaignante à l’endroit de ses collègues constitue de l'indifférence et du mépris, alors qu’elle avait l'obligation de collaborer.

Selon lui, le fait de ne pas leur adresser la parole, ses propos grossiers prononcés à l'endroit de son supérieur, le fait de crier l'annonce de ses déplacements aux toilettes, ses insubordinations, le dénigrement de sa collègue ainsi que le fait d'avoir frappé sur le bureau de cette dernière sont des manquements à l'obligation de civilité.

L’arbitre conclut que le congédiement ne peut être annulé, car la plaignante n'a présenté aucune excuse ni démontré qu'elle désirait modifier son comportement.

Il est intéressant de noter la mention faite par l’arbitre dans l’ouvrage Le droit de l’emploi au Québec[1]. Les auteurs y décrivent comme suit l’obligation de civilité qu’ils désignent comme celle de convivialité : « II-104 - L’obligation de convivialité – Bien que l’article 2088 C.c.Q. n’y fasse pas directement allusion, il existerait néanmoins une autre qualité exigible relative au comportement du salarié et que nous croyons pouvoir qualifier d’obligation de convivialité! Il s’agit d’un ensemble d’attitudes propres à favoriser la communication, le commerce, le dialogue et la coopération entre les membres de l’entreprise. Nous le répétons, la relation d’emploi n’est pas une robinsonnade; chaque salarié travaille pour et avec les autres ou en raison de ces derniers et, à ces fins : […] »

On comprend donc que les employeurs et les employés ont tout intérêt à favoriser un bon climat de travail.

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Source : VigieRT, mars 2012.


1 MORIN, Fernand., Jean-Yves BRIÈRE, Dominic ROUX et Jean-Pierre VILLAGI. Le droit de l’emploi au Québec, 4e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2010, p 361-362.
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