Au moment où Gaz Métropolitain devenait Gaz Métro – un nom intime, plus moderne –, l’entreprise adoptait un nouvel emblème : la petite flamme bleue. Mais avant de procéder à une telle évolution de l’image d’entreprise, des changements internes s’imposaient. Ces transformations ont suivi une chronologie prévue dans tous ses détails. Au cœur de cette évolution, le secteur Employés et culture.
Dès son arrivée à la présidence, en 1998, Robert Tessier, aujourd’hui président du conseil d’administration, avait identifié plusieurs changements à effectuer. « Le nouveau président sentait qu’il y avait, au sein de l’organisation, une capacité latente. L’équipe de direction a pris alors la décision de retourner vers le marché résidentiel. Pendant de nombreuses années, ce secteur avait été modulé au bénéfice des marchés commerciaux et industriels. Le retour vers le marché résidentiel demandait toutefois une nouvelle approche dirigée vers le grand public, ce marché de détail requérant une approche totalement différente d’un marché de gros. Cela nécessitait une modification profonde de nos façons de faire », relate madame Sophie Brochu, l’actuelle présidente et chef de la direction de Gaz Métro.
Principal distributeur de gaz naturel au Québec, Gaz Métro dessert aujourd’hui près de 167 000 clients, soit plus de 97 % des consommateurs de gaz naturel de la province. Gaz Métro détient de nombreuses participations financières dans des entreprises de transport, d’entreposage, dans le domaine gazier et dans les infrastructures souterraines.
Aujourd’hui, les industries comptent pour 57,3 % des ventes et les clients commerciaux et institutionnels pour 31,1 %; la clientèle résidentielle représente pour sa part 11,6 % des ventes.
La carte maîtresse : les ressources humaines
Ce vent de changement a d’abord engendré de l’incertitude chez les employés. Et pourtant, ces derniers faisaient partie intégrante du plan. « Robert Tessier abordait les employés en leur demandant : “Est-ce qu’on est bon?” Les gens répondaient : “Oui, nous le sommes.” Mais, comment le vérifier et comment se comparer? Ce fut l’un des premiers constats du président de l’époque, celui de conscientiser l’organisation au fait que ce qui se mesure s’améliore », indique madame Brochu.
Monsieur Serge Régnier, CRHA, vice-président aux employés et à la culture, s’est joint à l’entreprise en 1998, en pleine vague de changement. « Nous avons instauré, en 1999, le Défi Excellence visant à faire de Gaz Métro une entreprise commerçante et performante qui fonde ses actions sur trois piliers : le client, l’employé et l’investisseur. Nous avons commencé à nous mesurer de façon plus systématique. Nous nous sommes assurés de faire profiter nos gestionnaires d’un meilleur soutien dans leur rôle de gestion. Parallèlement, nous avons amorcé une démarche de partenariat avec les deux unités syndicales (CSN et FTQ). Le tout s’est mis en place graduellement et de façon évolutive », raconte-t-il.
« Des efforts furent consacrés à établir des mesures, des comparatifs, puis à mettre sur pied des programmes visant à nous améliorer. Nous avons fixé des objectifs à atteindre. Au terme de cet exercice, avec les mêmes effectifs, environ 1300 employés, Gaz Métro réalise six à sept fois plus de branchements d’immeubles qu’avant la mise en place de ces mesures. Le gain de productivité est important », poursuit monsieur Régnier.
Aujourd’hui, cette plate-forme est bien intégrée dans tous les segments. Les décisions se prennent de façon pratiquement spontanée en considérant les trois piliers : client, employé, investisseur.
« Suivant un principe d’amélioration continue, des évaluations se font tous les vingt-quatre mois, grâce au QUALImètre, explique monsieur Régnier. Cette évaluation permet d’obtenir un bulletin sur notre façon de faire au niveau organisationnel. Avec les années, cela nous a permis de mettre en place une série de plans d’action qui nous ont valu un Grand Prix québécois de la qualité en 2006. Tout le monde est mis à contribution.
« C’est beaucoup l’approche des petits pas afin de conscientiser les gens aux améliorations réalisées, poursuit-il. C’est par contamination que nous avons réussi à faire nos plus grands changements. À mon arrivée, en 1998, les gens contactaient les ressources humaines lorsqu’ils éprouvaient un problème. Aujourd’hui, ils demandent davantage de soutien. Nous sommes moins sollicités pour l’urgence et davantage pour la prévention et la mise en place d’initiatives. Nos gestionnaires deviennent de plus en plus autonomes dans leur gestion des ressources humaines.
« Mon rôle se situe entre le “quoi” et le “comment”. Le conseil de gestion, qui rassemble tous les vice-présidents autour d’une même table, a généralement bien défini le quoi. On a identifié une problématique et le rôle de mon équipe consiste à soutenir la gestion dans l’implantation du changement, de la bonne manière», résume monsieur Régnier.
De plus, un sondage mesurant le niveau de mobilisation des employés est mené tous les deux ans. La dernière fois, l’exercice a obtenu un taux de participation de 90 % d’entre eux. Ce sondage nous permet de prendre le pouls des employés, un des trois piliers.
« Ce sondage vient parfois ébranler des convictions. Lorsque nous avons pris la décision de nous mesurer, nous avons aussi pris la décision de ne pas cacher les résultats. C’est une question de transparence, tant pour les bons coups que pour les moins bons », fait valoir monsieur Régnier.
Toutes ces étapes ont permis de mettre la table. « Nous pouvions dès lors attaquer le marché résidentiel », lance madame Sophie Brochu.
Changement d’image
Finie l’époque des camions orange et du logo carré. De là est née la campagne « la vie en bleu ». Selon la présidente, lorsque vient le temps de changer l’image d’une entreprise, mieux vaut y inclure les premiers ambassadeurs : « nos gens ». Gaz Métro a donc procédé au lancement promotionnel à l’interne d’abord, afin que les employés voient vers quoi l’entreprise se dirigeait. « Les coûts rattachés à cette campagne de lancement interne furent, sans contredit, le meilleur investissement que nous ayons pu faire. Les employés ont embarqué avec nous, avec fierté. Ce fut un succès instantané », témoignent nos deux interlocuteurs.
À cette même période, le secteur Employés et culture a rapatrié le service des communications internes, autrefois rattaché aux relations publiques. « Ce fut, encore une fois, un élément fort positif afin d’intégrer la stratégie de marque. Il était ainsi plus facile de transmettre les orientations de l’entreprise auprès de nos employés », fait remarquer monsieur Régnier.
On connaît la suite, la vie en bleu et la petite flamme bleue sont entrées dans les salons par le truchement de la publicité à la télévision. « L’image à laquelle les gens s’identifient facilement est très importante pour une entreprise de service public comme la nôtre », maintient madame Brochu.
Coût ou valeur ajoutée?
Lorsque madame Brochu a accédé au poste de présidente et chef de la direction de Gaz Métro, elle a changé le titre du poste « ressources humaines » pour celui d’« employés et culture ». « Le terme ressources humaines possède une certaine connotation. Mais employés et culture, selon moi, est plus englobant et plus spécifique. La culture d’une entreprise demeure la base et ce sont les employés qui la font. Souvent, les gens vont parler de Gaz Métro, de notre culture, plus facilement que nos employés peuvent le faire. En changeant la dénomination des ressources humaines, je voulais ancrer cette notion de culture d’entreprise », illustre-t-elle. Pour avoir côtoyé d’autres présidents d’entreprise, elle sait pertinemment que « les ressources humaines peuvent être perçues sous deux angles : certains les considèrent comme un coût, d’autres comme une valeur ajoutée. » Inutile de préciser à quelle enseigne se loge notre interlocutrice!
Puis, elle se livre à un véritable plaidoyer : « Les ressources humaines dépassent le simple cadre de l’embauche et de la gestion de convention collective. Si ça s’arrête là, tu vas être dans le trouble. Cela est trop réducteur comme approche. Il ne faut pas évacuer l’aspect stratégique des ressources humaines, soutient madame Brochu. Je crois que la nouvelle génération de gestionnaires est particulièrement sensible au fait que cette fonction est aussi fondamentale que les finances pour la réalisation d’un plan stratégique », insiste-t-elle.
Éventail de compétences
Gaz Métro emploie des personnes aux métiers et aux compétences très diverses. Allant des employés de bureau, aux ingénieurs, techniciens, etc., les effectifs sont concentrés dans une proportion de 75 % à 80 % dans le secteur du Grand Montréal. Le secteur Employés et culture comporte trois directions :
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Développement des compétences – Puisqu’il n’existe aucun bassin de main-d’œuvre spécialisée dans le domaine du gaz au Québec, il faut former les gens. Une école de formation a été mise sur pied à Boucherville. Elle forme d’abord les employés de Gaz Métro, mais procure aussi tout un éventail de formations à une clientèle externe variée qui a à travailler avec le gaz naturel (installateurs d’appareils, techniciens à l’entretien d’appareils à gaz, pompiers, etc.). L’École de technologie gazière prépare aussi la relève en donnant une formation de niveau secondaire aux finissants de programmes professionnels du ministère de l’Éducation. Les volets formation en emploi et formation des gestionnaires sont aussi assumés par cette direction.
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Performance et mobilisation – On retrouve sous cette direction les volets développement organisationnel, dotation, gestion de la relève et gestion de la qualité. La direction a aussi pour mission d’être à l’affût des nouvelles tendances en gestion de ressources humaines et en gestion du changement. Les membres de la direction « Performance et mobilisation » conçoivent des programmes adaptés à la culture de Gaz Métro en favorisant la mobilisation et la gestion efficace de la performance.
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Performance et relations employés – Cette direction englobe toutes les fonctions de soutien et d’intervention auprès de la gestion, des syndicats et des employés en général. On y retrouve les relations du travail, la santé et sécurité du travail, la gestion des avantages sociaux et de la rémunération ainsi que la sûreté corporative. Ses membres sont déployés auprès des différentes clientèles internes et apportent un appui aux gestionnaires tout en se collant à la réalité opérationnelle de ces derniers.
Le secteur Employés et culture regroupe une soixantaine de personnes, incluant l’École de technologie gazière.
En conclusion, monsieur Serge Régnier attribue le succès des changements amorcés au sein de l’entreprise en grande partie à l’harmonisation des relations entre les divers intervenants.
Alain Perron, journaliste indépendant
Source : Effectif, volume 10, numéro 4, septembre/octobre 2007.