Cette étude est inspirée de plusieurs rencontres avec des candidats au cours d'un processus de sélection accompagné de tests. Les tests psychométriques ont un impact différent selon les gens. Certains y voient l'occasion de mieux se connaître et de s'améliorer et d'autres les perçoivent comme une menace pour l'accès au poste convoité. Néanmoins, les tests de performance intellectuelle et de compétences, les mises en situation de gestion ou les questionnaires et inventaires de personnalité, de valeurs et de champs d'intérêt sont de plus en plus utilisés pour faciliter la décision des gestionnaires. Ce qu'on désire savoir, c'est si la personne a des chances de succès à un poste donné dans un contexte particulier. On veut vérifier l'adéquation entre les caractéristiques de la personne et les exigences du poste et de l'environnement.
Jean-Guy est contremaître de production d'une usine de fabrication depuis plus de dix ans. Il ne peut plus supporter son supérieur actuel. Chaque fois qu'il fait un bon coup, son patron en prend le crédit. Chaque fois qu'il fait une erreur, son patron signale le fait devant tout le groupe. Il se sent diminué et veut quitter son emploi le plus rapidement possible.
Depuis quelques mois, Jean-Guy envoie son curriculum vitæ chaque fois qu'il voit un poste de contremaître de production annoncé dans un quotidien. Il veut continuer à travailler au niveau de la production, car il aime rester en contact les opérations, même qu'il met un peu la main à la pâte à l'occasion. Il adore les urgences et il aime travailler coude à coude avec l'équipe. Il apporte régulièrement un soutien sur le plan technique. Les gars ne lui en veulent pas, car c'est un bon "père de famille". Il les écoute et les comprend. Il n'insiste pas pour que tout le monde soit à son poste en tout temps pourvu que le travail soit fait. C'est un bon gars qui sait se montrer juste envers chacun.
Un vendredi soir où son découragement est au maximum, Jean-Guy se dit qu'il faut que son tour vienne. Il ne peut plus endurer son patron. Le lendemain, il trouve le poste de ses rêves dans la section Carrière et profession de son quotidien préféré. Il s'agit d'un poste de superviseur de production dans une grande entreprise de réputation internationale. Il se dit que sa chance est venue et qu'enfin il pourra accéder à d'autres fonctions. Il pourra être sur le plancher avec une équipe et, pourquoi pas, contremaître général dans deux ou trois ans. Il voit réapparaître ses ambitions et, avec elles, son espoir de transformer son avenir. Contrairement à ce qu'il a connu jusqu'à maintenant, l'entreprise est syndiquée et il se dit qu'il apprendra le fonctionnement de nouvelles règles de travail. Le travail consiste à gérer une équipe de quinze employés en rotation des postes de travail tout comme dans son poste actuel. Selon l'annonce, l'entreprise est stable et sa clientèle est établie. Ça semble être une bonne affaire. Par ailleurs, il n'aime pas trop l'ambiguïté générée par la croissance rapide et les changements constants. Jean-Guy envoie son curriculum vitæ par télécopieur dès le lundi matin et il attend des nouvelles avec impatience.
Il est appelé en entrevue deux semaines plus tard. Il rencontre le directeur de la production et la directrice des ressources humaines, puis le directeur d'usine. Pendant l'entrevue, on lui parle du désir de l'entreprise de mettre en place des équipes autonomes de travail et de la résistance au changement que manifestent les employés. Ils s'opposent à toute forme de responsabilisation pour le moment. On lui fait visiter l'usine et il rencontre les employés. Jean-Guy trouve le contact un peu froid, mais il se dit qu'il en a vu d'autres. Après la visite, la directrice des ressources humaines demande à Jean-Guy d'attendre un peu à la réception.
Les deux directeurs constatent que Jean-Guy a une expérience tout à fait pertinente en gestion opérationnelle. Il a démontré sa capacité à aider ses gars dans les difficultés et à mettre la main à la pâte quand il le faut. Il pourra établir sa crédibilité dans la gestion du quotidien. De plus, son côté "bon père de famille" leur plaît, car il pourrait apaiser et rassurer les gars dans l'implantation du changement. Par contre, les deux directeurs s'inquiètent de la capacité de Jean-Guy à favoriser des changements comme l'implantation de groupes autonomes. Il a peu de connaissance du fonctionnement des équipes autogérées et il n'a pas implanté de changement significatif dans le passé.
Après avoir délibéré, ils s'entendent pour faire passer aux deux candidats encore en lice une batterie de tests qui leur permettront de trancher entre les deux. Ils feront appel à un cabinet de psychologues industriels avec qui ils ont l'habitude de travailler et qui connaissent bien les exigences relatives à ce poste. Ils mettront l'accent sur les critères suivants: un style de gestion humain et soutenant, la capacité à implanter le changement tout en gérant les opérations quotidiennes, la capacité à être ferme et juste dans la gestion du personnel. La directrice des ressources humaines informe Jean-Guy des prochaines étapes de la sélection: passation de tests et vérification de références. On lui explique qu'il devra passer des tests pendant une demi-journée dans un bureau de psychologues et qu'il aura une réponse rapidement. «Un psychologue ? des tests ?» Jean-Guy ne sait plus où donner de la tête et quelle question poser.
Quand Jean-Guy arrive pour passer ses tests, il est gonflé à bloc. Mais il n'a pas très bien dormi. Il s'est questionné toute la nuit sur ce que ça pouvait bien être que de passer des tests psychométriques, sans pouvoir trouver de réponse. Il s'est demandé ce que l'entreprise cherchait. C'était clair, on voulait un superviseur ferme et directif pour imposer les groupes de travail. Le syndicat devait plier aux demandes de la gestion. C'était une nouvelle orientation et tout le monde devait démontrer son bon vouloir.
Perdu dans ses réflexions, il est accueilli au cabinet conseil et on lui demande de remplir des formulaires : une fiche d'identification et un consentement. Le psychologue lui explique l'objectif de l'évaluation, tente de le rassurer sur l'analyse des résultats des tests, puis l'informe sur le déroulement de la journée et les modalités de transmission des données à l'organisation. Il mentionne l'importance d'être soi-même, car ce qu'on veut évaluer à l'aide des tests et des questionnaires, c'est l'adéquation entre son style professionnel et les exigences du poste à pourvoir. À la simple évocation du mot test, Jean-Guy se sent mal à l'aise. Il a l'impression de retourner quinze ans en arrière lorsqu'il était à l'école : ça ne représente rien de bien positif pour lui, mais il n'en dit rien. Ce niveau de tension qu'il ne peut contrôler commence à créer un malaise chez lui. Le psychologue tente de le rassurer et de démystifier les tests psychométriques en parlant de leurs forces et de leurs limites. Jean-Guy a hâte de commencer afin qu'on en finisse au plus vite.
La première étape consiste à répondre à un questionnaire d'auto-évaluation. On lui pose des questions sur ses expériences de travail, ses performances et ses réalisations, son style de gestion, sa façon de travailler. Jean-Guy se dit qu'il doit donner une image positive et forte de lui-même. Partant de cette notion, il se décrit comme quelqu'un de compétitif, de dominant, un «dur à cuire», agissant ainsi à l'encontre des conseils reçus plus tôt que de rester lui-même.
Ensuite, on passe à un questionnaire de personnalité et on explique à Jean-Guy l'importance de se décrire spontanément et honnêtement au mieux de ses connaissances. On insiste sur le fait qu'il n'y a ni bonne ni mauvaise réponse et que chacun a des préférences et des valeurs différentes. Il en est à son deuxième questionnaire et il commence à trouver difficile de se décrire comme quelqu'un d'autre. Il fléchit et prend une autre tangente. Il ne sait plus très bien quoi répondre et il se sent de plus en plus mal à l'aise face à ces questionnaires sur sa personnalité. Il trouve qu'il y a de l'ambiguïté dans chaque question et qu'il est difficile de se positionner de façon claire et définitive.
Une fois ces deux questionnaires remplis, on lui offre de prendre une pause de quinze minutes avant de poursuivre, mais Jean-Guy mentionne qu'il préfère terminer. On insiste pour qu'il se donne un moment de repos. Il abdique.
Une fois de retour, le psychologue précise qu'on veut maintenant mesurer sa capacité à faire face à de nouveaux problèmes de gestion. Jean-Guy a un malaise et demande s'il peut aller aux toilettes avant de poursuivre son test. Pendant ce temps, il se dit qu'il est bien mal parti et qu'il est en train de rater son coup et qu'il n'aura jamais ce poste, mais qu'il ne peut plus arrêter le train. Il prend une bonne respiration puis retourne à sa salle de test. On lui dit qu'il a une heure pour résoudre les problèmes présentés et que ce sont des problèmes similaires à ceux qu'il rencontre dans son travail. Il tente de se concentrer, mais ça lui semble difficile. Pourtant, il a déjà fait face à ce type de problème dans son travail : une machine brisée, un opérateur qui s'absente trop fréquemment, un patron insatisfait, une décision difficile à prendre. Il a l'impression de ne pas écrire assez vite et qu'il manquera de temps. Mais après une vingtaine de minutes, il se sent plus à l'aise et embarque dans le jeu.
La dernière étape consiste à passer un questionnaire de valeurs professionnelles. Jean-Guy se sent fatigué et répond du mieux qu'il peut. Il commence à ne plus être gêné par les tests, mais il se demande à quoi pourra bien ressembler le résultat final.
Enfin, le psychologue termine le processus par une brève rencontre. Jean-Guy lui mentionne que tous ces tests n'ont pas été faciles. Il dit qu'il se sentirait plus à l'aise s'il avait à recommencer maintenant.
Les tests psychométriques sont terminés. Il ne se rappelle plus très bien, mais le psychologue lui a dit qu'il donnerait une rétroaction à l'entreprise et qu'il aurait la réponse ensuite. Il lui semble avoir compris qu'il pourrait avoir de l'information sur son dossier après la décision. Loin de lui l'idée de savoir ce qui se cache derrière tous ces tests.
Jean-Guy retourne chez lui avec un mal de tête carabiné. Il est déçu de sa performance, de son attitude et il voit ses chances de succès fondre... Pour une deuxième nuit, il ne dort pas très bien. Il reçoit la réponse une semaine plus tard.
ÉPILOGUE
Lors de la présentation des résultats de Jean-Guy, le psychologue a communiqué à la directrice des ressources humaines et au directeur des opérations que l'ensemble des données montrait peu de consistance. Dans son auto-évaluation, Jean-Guy se décrivait comme un gestionnaire très ferme, directif et autoritaire et, dans ses tests de personnalité, il paraissait plus aidant, ouvert et humain. Jean-Guy semblait chercher à donner la bonne réponse aux questions plutôt que de se décrire tel qu'il est. Ses résultats aux problèmes de gestion établissaient quant à eux sa difficulté à prendre des décisions dans un contexte inconnu. Jean-Guy avait démontré une certaine gêne, en situation ambiguë, à donner des orientations claires de même qu'un inconfort face au changement. Par conséquent, les résultats de Jean-Guy ne prouvaient pas clairement qu'il pourrait remplir avec aisance le mandat proposé par l'entreprise.
QUESTIONS
Comment Jean-Guy aurait-il pu se préparer avant de passer les tests psychométriques?
Est-ce que les deux directeurs de l'entreprise auraient pu informer davantage Jean-Guy sur les tests psychométriques ?
Qu'est-ce que Jean-Guy aurait dû faire pendant la passation des tests ?
Que devrait-il faire lors de sa prochaine entrevue et de sa prochaine expérience en matière de tests psychométriques ?
Conseilleriez-vous à Jean-Guy de retourner voir le psychologue pour connaître sa rétroaction sur les résultats de ses tests ?
Sylvie Jourdain, M.Ps. est psychologue industrielle/organiationnelle chez Société Pierre Boucher inc.
L'ANALYSE...
Peu importe la catégorie de personnel qui fait face à de tels tests, la réaction que les tests psychométriques suscitent chez des candidats dans un processus de recrutement est peu prévisible. La situation vécue par Jean-Guy est donc loin d'être unique.
Comment Jean-Guy aurait-il pu se préparer avant de passer les tests psychométriques?
Pour un candidat, la meilleure façon d'éviter une telle expérience est sans aucun doute de se préparer adéquatement au processus de sélection. Ceci part d'une analyse de l'emploi présent et des raisons qui poussent l'individu à le quitter. Jean-Guy a certes fait le constat que la relation avec son nouveau patron ne fonctionnait pas. En plus de ce premier constat, une analyse de ses forces et faiblesses dans le contexte l'aurait aidé à bien évaluer si le poste en question convenait à ses attentes et capacités, dès le début. En étant plus conscient de son potentiel et de ses champs d'intérêt, il n'aurait pas eu à jouer un jeu lorsque les tests ont commencé.
Dans la même veine, Jean-Guy aurait également eu avantage à poser, lors de l'entrevue, des questions plus précises sur le poste, soit sur les enjeux importants reliés au poste, sur les approches favorisées par l'entreprise dans la gestion de changements majeurs, bref sur les attentes quant au nouveau contremaître. Ceci aurait sans doute permis à Jean-Guy de s'évaluer après les entrevues quant à la possibilité de répondre aux attentes du poste et à être plus confiant face à son potentiel lors des tests.
De plus, dans une telle situation, le réseau de contacts devient également un outil précieux. Ce réseau pourrait comprendre des gens qui ont déjà passé des tests, des professionnels de la gestion des ressources humaines, des gestionnaires ayant déjà un tel outil dans leur processus de recrutement, des tests psychométriques en ligne, etc. En discutant avec ces gens, Jean-Guy aurait sans doute pu démystifier une partie du processus et comprendre en quoi consisterait la journée, comment seraient utilisés les résultats, ce que l'on peut apprendre d'une telle expérience, en tant que candidat, etc.
Est-ce que les deux directeurs de l'entreprise auraient pu informer davantage Jean-Guy sur les tests psychométriques?
Il revient aux candidats de poser des questions aux différents intervenants lors d'un processus de sélection, mais il fait également partie intégrante du rôle des gestionnaires et professionnels en ressources humaines impliqués dans le dossier de renseigner les candidats sur le processus. Les directeurs qui ont rencontré Jean-Guy auraient d'abord pu lui demander s'il avait déjà passé de tels tests, ouvrant donc la porte aux questions de Jean-Guy sur ce sujet, entre autres sur les raisons les poussant à utiliser cet élément prédictif. Dans le cas présent, la réponse à cette question semble assez simple; Jean-Guy ne possédait aucune expérience passée lui permettant d'appuyer sa capacité à gérer des changements majeurs. Dans une telle situation, les tests psychométriques semblent tout indiqués.
Les directeurs auraient également pu lui expliquer que, lors d'un processus de sélection, les gestionnaires ont avantage à utiliser plus d'un élément prédictif pour assurer la meilleure validité possible des résultats et donc, la meilleure concordance entre le poste et le candidat.
Finalement, pour faciliter la démarche, ils auraient pu expliquer au candidat qui était ce cabinet de psychologues industriels, quelle était leur expérience avec ces personnes, quel type de tests était utilisé et quel type de résultats était produit. Finalement, et probablement la plus importante des informations, comment les résultats allaient influencer leur décision (était-ce simplement pour valider ce que les interviewers avaient déjà observé ou si les tests étaient une partie importante de l'information nécessaire pour prendre la décision).
Qu'est-ce que Jean-Guy aurait dû faire pendant la passation des tests?
Jean-Guy a considéré le processus avec énormément de sérieux. Ne sachant pas trop où cela allait mener, il semble y être entré avec l'impression que les résultats ne seraient de toute évidence pas reliés à ce qu'il est vraiment. Un peu comme si quelqu'un décidait de son avenir sur la base d'une image dans une boule de cristal.
Dès le début, soit avant le premier test, il aurait pu signifier au psychologue son malaise quant à ce mode d'évaluation. Ceci lui aurait donné le droit à l'erreur et aurait fait baisser le niveau de stress qu'il ressentait au fur et à mesure que la session avançait.
En cours de tests, il aurait également pu dire au psychologue qu'il se rendait compte qu'il était en train de biaiser volontairement les résultats et qu'il ne croyait pas que les résultats seraient valides. Il aurait peut-être encore été temps de recommencer le premier test et d'éviter la discordance que son profil faisait ressortir.
Que devrait-il faire lors de sa prochaine entrevue et de sa prochaine expérience?
Combien de temps cela prendra-t-il avant que Jean-Guy se réengage dans un processus de sélection ? Suite à cette expérience, il devra faire un bilan de la situation et examiner pourquoi il s'est senti si mal pendant le processus de tests. Un élément important, mais non le seul de son examen, sera la rétroaction de l'entreprise sur les raisons pour ne pas avoir retenu sa candidature. Ceci pourra lui servir de base de réflexion.
En entrevue, il devra questionner davantage les interviewers sur leurs attentes quant aux comportements et à l'approche de gestion souhaités du candidat recherché. De plus, il pourra poser des questions reliées à ses attentes. En posant des questions sur ce qui est primordial pour lui, il adoptera une approche tout à fait différente, proactive plutôt que réactive. Finalement, il devra considérer les avantages d'avoir vécu une telle expérience, plutôt que de voir cette expérience comme un échec. Ses proches et, de nouveau, son réseau de contacts joueront un grand rôle dans cette analyse.
Conseilleriez-vous à Jean-Guy de retourner voir le psychologue pour connaître sa rétroaction sur les résultats?
Tout à fait, mais seulement une fois qu'il croira fermement que l'expérience était une occasion d'apprendre et qu'il réagira positivement à la pensée de la prochaine expérience. Il est primordial que Jean-Guy puisse apprendre des résultats des tests et qu'il expose au psychologue comment il a vécu le processus. Ce dernier saura sans doute mettre en relief l'impact sur les résultats des tests. Ceci permettra peut-être à Jean-Guy de réaliser que les résultats reflètent la réalité.
La situation présente révèle beaucoup sur le degré de confiance des candidats quant à la validité des différents outils de recrutement. Les professionnels de la gestion des ressources humaines ont un impact certain sur la perception qu'ont les candidats de ces tests. Avec l'utilisation de plus en plus fréquente de tels tests, les gestionnaires et les candidats peuvent en tirer beaucoup plus qu'un outil de recrutement. En effet, une fois en poste, l'employé qui a été évalué peut se servir des résultats des tests comme base pour élaborer son plan de développement et de formation, bâtir son plan d'action pour attaquer ses nouveaux mandats, établir son réseau de contacts chez son nouvel employeur en connaissant maintenant un peu mieux son profil... Bref, tant l'employeur que le candidat peuvent s'en servir comme d'un outil de gestion.
Le fait que Jean-Guy ait agi de la façon mentionnée dans le cas au cours du processus démontre beaucoup, en soi, sur la façon dont il se comporte face à l'inconnu. On peut en dégager également des constatations sur sa façon d'évaluer certains enjeux telles l'approche à adopter en gestion du changement et la facilité à avouer les obstacles. Bref, les gestionnaires ont probablement pu valider certains aspects observés en entrevue.
Marie-Claude Lamothe, CRHA est chef divisionnaire adjoint des Ressources humaines, chez Bell Nexxia.
Deuxième analyse
Dans ce cas, les deux directeurs auraient pu préciser davantage la nature même des tests à passer.
Faire savoir à un candidat qu'il doit passer des tests chez un psychologue n'est pas très rassurant pour lui. Si le candidat avait su au préalable que les examens seraient composés de questions d'auto-évaluation, de tests de personnalité, de mises en situation ainsi que de questions sur ses valeurs professionnelles, il aurait sans doute été en mesure de mieux se préparer à l'évaluation. En effet, il aurait pu faire une revue de ses forces et de ses faiblesses et voir dans le quotidien quelles seraient les actions qui lui permettraient de s'améliorer. Par la suite, il aurait pu définir ses grandes valeurs et s'assurer qu'elles pouvaient concorder avec le poste convoité et cadrer avec l'organisation en question.
Mais pour être en mesure d'en arriver là, certaines données doivent être disponibles. Quelle est la mission de l'entreprise, quelle place y occupent ses employés, la qualité, l'ingénierie, le service à la clientèle... Connaître plus que le simple nom de l'entreprise, le nombre d'employés ou l'année de sa fondation devient donc primordial. Avec ces informations et même plus encore, il sera plus facile d'orienter ses réponses dans la direction recherchée. Attention, il demeure toujours important de rester soi-même, de ne pas chercher à répondre en vue d'être le candidat idéal. Il faut se remémorer quelques situations récentes et valider quelle serait sa réaction face à chacune d'entre elles et l'intervention souhaitable. On doit aussi envisager également une solution de rechange dans le cas où un employé ne réagirait pas comme prévu ou que la solution initiale ne serait pas autorisée ou appréciée.
Pendant l'examen, Jean-Guy devait tout faire pour demeurer le plus possible en confiance et ne pas s'affoler. Donc, il devait évaluer le temps disponible pour chacune des sections, lire la question attentivement, prendre son temps pour élaborer son opinion le plus clairement possible, utiliser un vocabulaire correct, mais sans plus, et passer à une autre question si aucune idée ne lui venait à l'esprit, pour y revenir par la suite si le temps le permettait. Pour les questions de personnalité où les réponses spontanées sont les plus représentatives, il ne fallait pas revenir en arrière pour modifier une réponse, ne pas insister trop longuement entre deux choix de réponses et ne pas répondre en fonction des critères recherchés pour le poste. La clé du succès dans ce genre de tests, c'est d'être soi-même en répondant comme si le correcteur était un ami et non un évaluateur. Il est évident que le facteur stress a joué un rôle déterminant pour ce candidat, mais s'il s'était conformé aux directives, cela aurait d'autant diminué sa nervosité. Le psychologue aurait également pu lui mentionner que les résultats ne se donnent pas en pourcentage, mais bel et bien selon une évaluation subjective que chacun des gestionnaires en fait. En effet, l'appréciation d'un critère par les gestionnaires est variable et fait en sorte que la sélection ou non d'un candidat est fonction de l'ensemble de ses critères.
Il serait important pour Jean-Guy de retourner voir le psychologue pour obtenir une rétroaction afin de s'améliorer et de vérifier si les faiblesses qu'il perçoit chez lui sont bien les mêmes qui sont ressorties de l'évaluation. Si tel est le cas, cela démontrera qu'il se connaît très bien, mais il risque fort de découvrir qu'une divergence existe entre les deux. Il sera alors de mise de clarifier plus en détail dans quelles situations il risque de réagir comme cela et finalement quels sont les outils qui lui permettront de s'améliorer. Ces examens servent à sélectionner un candidat, mais sont très utiles également pour mieux comprendre la personnalité, les valeurs et la façon de gérer d'un individu. Jean-Guy devra travailler à ces aspects d'ici sa prochaine évaluation, mais il devra surtout garder en mémoire d'être lui-même...
Isabelle Perreault, CRHA est conseillère, des ressources humaines chez Novabus, Division de Prévost Car.
Source : Effectif, volume 3, numéro 5, novembre / décembre 2000