Vous lisez : L'intelligence émotionnelle au travail Quand le pensé et le ressenti s'harmonisent

Depuis cinq ans, une expression s'est ajoutée au vocabulaire des adeptes de nouvelles tendances. Il s'agit de l'intelligence émotionnelle. Son impact reviendrait presque à dire : «Bye bye Q.I., bienvenue Q.É.»!

Pour connaître la genèse de ce phénomène, il faut remonter en 1995, lors de la sortie du livre Emotional Intelligence, de Daniel Goleman. Ce psychologue et chroniqueur au New York Times ne se doutait alors pas que son ouvrage, écrit en réplique aux partisans du quotient intellectuel, recevrait un accueil retentissant et que, deux ans plus tard, Ail serait amené à rédiger une suite. 

Dans le second tome, également best-seller, l'auteur s'attarde à la place qu'occupent les émotions dans la sphère du monde du travail. La raison: un urgent besoin s'était fait sentir du côté des gestionnaires. Si, si. Ils souhaitaient en savoir plus sur les compétences émotionnelles que sont la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation, l'empathie et les aptitudes sociales. Le tout, dans un contexte professionnel. 

Mais attention! Goleman n'a rien inventé. Ni l'appellation «intelligence émotionnelle» ni ce que cette nouvelle étiquette véhicule. En fait, les psychologues industriels savent que, sous ce terme, se cache un regroupement de concepts. Nous y reviendrons. 

Mais d'abord, qu'en est-il de l'intelligence émotionnelle dans le domaine de la gestion des ressources humaines? Et plus particulièrement au niveau de la dotation? Est-il réaliste de croire que l'on peut recruter des individus en se basant sur le concept de l'intelligence émotionnelle? 

Comme l'explique Shimon Dolan, professeur titulaire en psychologie du travail et en gestion des ressources humaines à l'Université de Montréal, la réponse nécessite quelques nuances. «Quoique intéressant, le concept de l'intelligence émotionnelle n'est pas une panacée qui va régler les problèmes de sélection du personnel. Il y a déjà beaucoup de problèmes à régler au niveau des méthodes plus traditionnelles. L'ajout d'éléments nouveaux, complètement neufs et encore loin d'être valides et pertinents, comme c'est le cas pour les tests de dépistage de l'intelligence émotionnelle, me rend perplexe. Enfin, je ne suis pas contre l'habileté à contrôler ses émotions, mais je demeure plutôt prudent.» 

Il n'existerait donc pas encore d'études empiriques et concluantes démontrant la validité, en terme de mesure, des tests d'intelligence émotionnelle, comme c'est le cas avec les tests de Q.I. Aussi, un recruteur qui voudrait utiliser de tels tests qui se retrouvent par exemple dans Internet, se devrait de combiner les réponses obtenues à celles des autres tests psychométriques, valides ceux-là, qu'il aurait fait passer. Ces derniers pouvant mieux prédire le succès d'un candidat, une fois qu'il serait en poste. 

Le professeur Dolan met également en doute la pertinence d'évaluer presque exclusivement l'intelligence émotionnelle des candidats sans tenir compte du poste qu'ils souhaitent obtenir. Peut-être ce poste exige-t-il aussi de fortes aptitudes reliées à l'intelligence rationnelle? Prenons l'exemple d'un directeur général d'entreprise. Ce dernier a besoin d'être motivé et de maîtriser ses émotions, mais il doit aussi être en mesure de prendre des décisions logiques, faculté qui relève de la raison. 

En fait, nous devrions tous, fondamentalement, tirer parti de notre intelligence émotionnelle. Par contre, ce sont surtout ceux qui occupent un poste élevé dans la hiérarchie d'une organisation ou qui ont continuellement à traiter avec des personnes - au service à la clientèle, par exemple - qui en ont manifestement le plus besoin.

Les avantages

Personne ne sera surpris d'apprendre que l'intelligence émotionnelle consiste tout simplement en l'utilisation intelligente de ses émotions. À ce propos, l'auteur de Emotional Intelligence at Work, Hendrie Weisinger, explique qu'il existe un nombre quasi infini d'applications de l'intelligence émotionnelle au travail. 

Ce psychologue, qui enseigne à des cadres supérieurs et au programme de M.B.A. de cinq grandes universités américaines, a en effet remarqué, au cours de ses vingt dernières années de pratique, que le manque d'intelligence émotionnelle nuit à la croissance et à la réussite à la fois des individus et des entreprises. 

Dans le contexte économique au sein duquel elles se trouvent actuellement, c'est-à-dire l'obligation de faire plus avec moins, les entreprises ont donc avantage à employer un personnel clé doté d'une grande intelligence émotionnelle. Par exemple, ces personnes s'adaptent plus rapidement aux changements organisationnels, travaillent mieux en équipe, aident les autres à se fixer des objectifs et à les atteindre, choisissent le niveau de communication approprié à la situation, résolvent un problème épineux avec un collègue, concluent une vente avec un client difficile, déploient l'énergie nécessaire pour effectuer l'ensemble d'une tâche. En d'autres termes, ils fournissent un rendement plus productif.


La définition

Globalement, l'intelligence émotionnelle se compose de quatre éléments fondamentaux et se manifeste par différents comportements personnels (pour s'aider soi-même) et interpersonnels (pour aider les autres). Ces sont les aptitudes à :

  • percevoir, évaluer et exprimer des émotions avec précision;
  • aller chercher des sentiments au besoin, lorsqu'ils peuvent nous aider à mieux nous comprendre ou à mieux comprendre une autre personne;
  • comprendre les émotions et ce qui s'en dégage;
  • gérer ses émotions pour favoriser le développement affectif et intellectuel.

Évaluer et développer son intelligence émotionnelle

Dans Emotional Intelligence at Work, Hendrie Weisinger suggère à ses lecteurs un questionnaire visant à évaluer, sur une échelle de 1 à 7, leur aptitude à employer, dans une contexte professionnel, l'aptitude décrite. Si le répondant n'obtient pas un résultat de 5 ou plus par catégorie d'énoncés, qui se rapportent aux compétences personnelles et interpersonnelles, il lui faudra alors songer à développer les aptitudes de son choix et à préciser les tâches qui l'aideront dans sa démarche. Voici quelques-uns de ces énoncés.

COMPÉTENCES PERSONNELLES 

Conscience de soi

  • Je reconnais quelle information influe sur mes interprétations.
  • Je sais quel impact a mon comportement sur autrui.
  • Je sais quand ce que je communique est différent de ce que je ressens.

Gestion de émotions

  • Je me relaxe dans les situations stressantes.
  • Je reste efficace dans des situations qui provoquent l'anxiété.
  • Je sais reconnaître que je suis en colère.

Motivation

  • J'acquiers de nouveaux comportements plus productifs.
  • Je me ressaisis rapidement après un échec.
  • Je fais suivre mes propos d'actions concrètes.

COMPÉTENCES INTERPERSONNELLES 

Établir de bonnes relations

  • Je sais quel impact a mon comportement sur autrui.
  • Je fournis des conseils et apporte un soutien aux autres, au besoin.
  • Je démontre de l'empathie envers les autres.

Agir comme guide 

  • J'aide les autres à se sentir bien.
  • J'aide un groupe à gérer ses émotions.
  • Je décèle les différences entre les émotions ou les sentiments des autres et leurs comportements.

Formation pour développer l'intelligence émotionnelle au travail

Les entreprises peuvent envoyer leur personnel suivre des cours sur le développement de l'intelligence émotionnelle. Mais, elles ne sont pas légion à le faire. Selon le formateur et concepteur d'Actualisation, Jacques Lalanne, 90 % de sa clientèle vient d'elle-même. «Les personnes à qui l'on recommande de suivre un tel cours, sous prétexte qu'elles en ont besoin, vont démontrer beaucoup moins d'intérêt que les autres, c'est-à-dire celles qui en ont entendu parler ou qui ont lu sur le sujet et qui se sont rendu compte qu'elles pouvaient aller chercher de nouveaux outils. Elles se disent presque : "Enfin, je peux participer à une formation sur ce sujet-là parce que ça m'intéresse et que ça peut m'être vraiment utile". »

À titre d'exemple, les personnes qui s'inscrivent à son cours peuvent, à partir de résultats obtenus à un questionnaire d'auto-évaluation (issu de l'ouvrage de Weisinger), évaluer les différents aspects de leur intelligence émotionnelle. Ainsi, pendant deux jours, elles échangent entre elles, expérimentent des situations vécues, effectuent des exercices d'autoanalyse, observent et évaluent leurs comportements en action. 

Les deux tiers de ces personnes sont habituellement des femmes qui, pour la plupart, disent venir chercher un langage compréhensible et une façon d'agir qui collent à la réalité du monde des affaires afin de pouvoir y véhiculer les valeurs de l'intelligence émotionnelle. Aussi, 85 % de la clientèle d'Actualisation est constituée de cadres supérieurs, intermédiaires et de premier niveau, tandis que l'autre portion se compose de leaders qui n'occupent pas un poste cadre. 

Idéalement, si l'on choisit d'envoyer son personnel en formation, il est souhaitable, comme pour n'importe quel cours, de s'assurer de la compétence des formateurs, du contenu même de la formation ainsi que des méthodes pédagogiques qui sont utilisées. «Il ne faudrait pas retomber dans des dynamiques de groupes comme ce fut la mode il y a quelques années, prévient la psychologue industrielle, Danielle Melanson, du cabinet Melanson, Girard, Maletto et associés Inc. C'est-à-dire se regarder soi-même et ses émotions et regarder ce que l'on vit, avant de pouvoir être capable de le faire avec les autres. Je pense qu'une bonne formation devrait à la fois combiner des contenus théoriques et pratiques. Un suivi mensuel peut aussi être envisagé, le cas échéant.»


Point de vue des recruteurs

Nous avons déjà mentionné que Daniel Goleman n'avait moussé, de l'intelligence émotionnelle, que sa dénomination propre, qui chapeaute des notions de psychologie connues depuis plusieurs années. Nous avons tout de même voulu savoir si, du côté des recruteurs, ce phénomène nouveau avait une quelconque influence sur leur pratique.

Q «Depuis l'apparition du concept de l'intelligence émotionnelle, quel en a été l'impact sur vos activités de recrutement et d'évaluation de votre personnel ?»

R «Ce concept est à la mode, mais la réalité a toujours existé, affirme Claude Gaudreault, psychologue organisationnelle chez Perspective psychologie organisationnelle. Par exemple, pour un cadre, l'aptitude à entretenir des relations avec une variété de personnes, à gérer avec facilité une équipe, à créer des alliances et à favoriser l'adhésion ont toujours été importantes. 

Mes clients ne me demandent pas d'évaluer l'intelligence émotionnelle des candidats, mais de les évaluer, tout simplement. Je crois qu'il faut aller au-delà des influences passagères reliées à des buzz words. Un client souhaite recruter un comptable créatif ? D'accord. Mais est-ce parce que c'est à la mode d'être créatif qu'il me demande cela? En fait, mon client souhaite tout simplement embaucher un comptable qui ne se limitera pas qu'à une application bête et méchante de ses pratiques habituelles et qui puisse remettre un peu en question les systèmes pour les améliorer. Ce profil est déjà plus précis et plus conforme à ce que l'on attend, plutôt que de demander simplement un comptable créatif. C'est comme mettre l'accent sur le Q.I. C'est bien beau le Q.I., mais c'est ce que l'on fait avec qui est important.»

R «J'ai toujours pris en compte le savoir-être des candidats dans mon processus de recrutement, tout comme leur savoir et leur savoir-faire, soutient Gaetane C. Hains, directrice des ressources humaines de la région de l'est du Canada pour A & T. Si une entreprise dit ne pas connaître ce qu'est l'intelligence émotionnelle, c'est qu'elle ne sait pas ce que le terme sous-entend exactement. Car il n'y a pas une compagnie qui, jusqu'à un certain point, n'en tient pas compte. Elle n'utilise peut-être pas cette nouvelle dénomination parce que ce n'est pas encore passé dans son salon. 

Pour ce qui est de quantifier l'intelligence émotionnelle - un terme aujourd'hui plus chic que aptitude ou comportement, suis-je portée à dire - d'un candidat, c'est très difficile. C'est d'ailleurs là où l'on obtient le plus d'erreurs dans le recrutement. Par exemple, il se peut que l'on ne pose pas les bonnes questions. Et puisque je considère que cela va dans les deux sens, il faut soi-même être doté d'intelligence émotionnelle quand on recrute.»

R «Pour nous, l'évaluation des candidats s'effectue à partir de critères bien spécifiques qui couvrent, selon les postes à pourvoir, les trois «savoir», explique Manon Pelletier, conseillère en ressources humaines chez Danone. Nous n'avons pas adopté de politiques particulières en ce qui concerne le concept de l'intelligence émotionnelle au travail. Aussi, nos candidats sont évalués globalement. Nous voulons savoir qui est devant nous, si la personne possède les aptitudes techniques pour occuper le poste et, dans le cas d'un cadre, nous voulons connaître sa façon intrinsèque de gérer au quotidien. Il s'agit là en fait d'une évaluation psychologique de ses compétences de gestion. Cela revient un peu à la même chose que la prise en compte des différentes composantes de l'intelligence émotionnelle. 

Les gestionnaires des ressources humaines sont sensibilisés à ce concept. Ils vont lui accorder une certaine importance que ce soit dans le recrutement, le développement organisationnel ou la formation. Toutefois, ils ne lui apposent pas le terme qu'on lui connaît désormais. Aussi, ils ne transmettent pas nécessairement au personnel qu'ils les envoient suivre, par exemple, un cours parce qu'il s'intitule Développement de l'intelligence émotionnelle. Peut-être pour éviter les préjugés.»

R «Indépendamment de ce que véhicule l'intelligence émotionnelle, nous continuons à recruter sur la base des résultats scolaires ou universitaires», souligne pour sa part Lyn Sachs, directrice nationale des ressources humaines du service de vérification et de comptabilité chez Ernst & Young. «Quelque 80 % de nos nouvelles recrues en sont à leur première expérience sur le marché du travail. Ce qui compte, pour nous, c'est leur intérêt, leur enthousiasme et leur capacité à s'adapter dans un environnement professionnel. Les tests de personnalité sont plus utiles pour une fonction supérieure. Et même là, on privilégie la discussion aux tests pour savoir comment la personne gère sa vie professionnelle. 

Ce qui distingue nos vérificateurs entre eux, c'est toutefois leur compétences émotionnelles. Mais, nous aurons toujours un gourou technique ou deux qui ne sera pas mature sur ce plan. Et nous choisissons de vivre avec les conflits que ça implique. Ce n'est pas assez pour revoir nos formules d'évaluation ou de recrutement. Nous sommes dans un domaine de services et il y un savoir que nous ne pouvons nous procurer aisément. Par ailleurs, j'ajouterais que les promotions viennent avec le savoir-être.»


Malgré la façon dont une entreprise véhicule l'idée de l'intelligence émotionnelle dans le cadre de ses activités, certains employés souhaitent effectivement découvrir par eux-mêmes de quoi il retourne. En novembre dernier, Élaine C., adjointe administrative dans l'industrie de l'importation, et Raymond G., informaticien dans le domaine de l'aérospatiale et de la défense, ont suivi un cours pour renforcer leurs compétences émotionnelles au travail. Pour eux, cette démarche servait surtout à satisfaire leurs besoins professionnels. 

Plus sensible 
«Je me disais qu'il me fallait garnir mon coffre d'outils, explique Raymond G., retiré des Forces armées depuis 1993, après 21 ans de service. Notamment parce que j'occupe un poste de niveau supérieur comme recruteur. Par exemple, je dois être en mesure de comprendre la motivation des gens qui se présentent à une entrevue, que je puisse bien lire ce qui passe par le non-dit. Très souvent, je m'arrêtais à ce que je voyais, sans plus. Maintenant, je suis aussi plus sensible à la façon dont j'interagis avec mes pairs.» 

Il est dommage, croit-il, que nombre d'entreprises au sein desquelles il a ouvré aient trop souvent misé sur la formation technique uniquement. «L'être humain, c'est important. Aussi, il est curieux de constater qu'aussitôt que l'on s'y intéresse de façon particulière, on soit perçu comme une personne voulant corriger un problème.» C'est d'ailleurs pourquoi il a choisi de ne rien confier de sa démarche à ses collègues. Il lui aurait alors fallu, comme ce fut le cas avec ses proches, expliquer qu'il n'allait pas suivre une thérapie. 

Éclairage nouveau 
«Le cours m'a apporté un éclairage nouveau sur la façon dont je gérais mon stress au quotidien et dont je travaillais avec les autres employés, explique Élaine C. Ce qui m'amène aujourd'hui à donner un peu plus de rendement.» En ce qui la concerne, la direction de l'entreprise et ses collègues ont démontré une grande ouverture d'esprit au moment où elle s'est dite intéressée à suivre un cours sur le développement de l'intelligence émotionnelle. «Mon patron est en faveur de cet aspect. Il s'agit là d'un avantage. Car j'ai pu remarquer à la lumière des commentaires d'autres participants que, dans beaucoup d'entreprises, ce n'est pas nécessairement le cas. Aussi, à mon retour, j'ai pu partager mon expérience et expliquer comment mettre en application des compétences telles l'écoute active, la perception et la gestion des conflits. Tranquillement, cela a un effet boule de neige.»

Conclusion

Enfin, à la lumière de ces explications, peut-on croire que le concept de l'intelligence émotionnelle est là pour rester? " Dans les années 60, deux consultants ont fait fortune avec leur grille destinée à évaluer les facteurs dominants du comportement des leaders. Cette grille est demeurée à la mode pendant près de vingt ans. L'idée de l'intelligence émotionnelle ressemble à cela, croit le professeur Shimon Dolan. Mais, y a-t-il encore beaucoup de personnes qui, aujourd'hui, parlent encore de Blake et Mouton?

Bibliographie 

Goleman, Daniel. L'Intelligence émotionnelle,comment transformer ses émotions en intelligence, (traduit de l'américain par Thierry Piélat), Éditions Robert Laffond, Paris, 1997, 422 pages. 
Goleman, Daniel. L'Intelligence émotionnelle. Cultiver ses émotions pour s'épanouir dans son travail, (traduit de l'américain par Daniel Roche), Éditions Robert Laffond, Paris, 1999, 385 pages. 
Weisinger, Hendrie. L'Intelligence émotionnelle au travail. Gérer ses émotions et améliorer ses relations avec les autres, (traduit de l'américain par Jacinthe Lesage), Les Éditions Transcontinental inc., 1998, 229 pages

Marie-Claude Petit est journaliste indépendante et étudiante à la maîtrise en Gestion de projet, à l'École des sciences de la gestion de l'Université du Québec à Montréal.

Source : Effectif, volume 3, numéro 1, janvier / février  / mars 2000

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