Vous lisez : L'asthme, une maladie chronique coûteuse

L'asthme est une condition respiratoire fréquente caractérisée par une obstruction variable des bronches qui s'accompagne des symptômes de toux, d'essoufflement, de sifflements allant de très légers à graves, de peu fréquents à continuels. 

L'asthme est une maladie inflammatoire de l'arbre bronchique. On sait maintenant que l'inflammation demeure une caractéristique importante, et ce, même dans l'asthme léger. 

De plus, il existe une relation causale entre la présence de cette inflammation et le développement d'une hyperactivité bronchique. Cette dernière se manifeste par l'apparition de symptômes lorsque les voies respiratoires sont exposées à une variété de stimuli tels que la fumée, l'exercice et l'air froid.

L'asthme affecte 5 à 10 % de la population québécoise. Au Québec, la maladie touche donc entre 300 000 à 600 000 personnes. Même si l'asthme est généralement considéré comme une maladie chronique nécessitant surtout des soins ambulatoires, la majorité des coûts reliés à l'asthme sont associés aux coûts hospitaliers. En 1990 aux États-Unis, on notait que 43 % des coûts totaux reliés à l'asthme étaient associés à l'utilisation des soins en salle d'urgence, aux coûts d'hospitalisation et aux décès. Cette année-là, on recensa 463 500 hospitalisations pour cause d'asthme. La même année au Canada, on estima les coûts totaux reliés à l'asthme à 504 millions pour lesquels 61 % furent attribués aux coûts directs. Par ordre d'importance, on retrouvait dans les coûts directs : le coût de la médication, le coût des hospitalisations et le coût relié aux services des médecins. En 1993-1994, on dénombra au Québec 13 132 hospitalisations, ce qui représente des coûts de l'ordre de 21,5 millions de dollars. 

Plusieurs études rapportent une hausse de la fréquence d'hospitalisation pour cause d'asthme, et ce, malgré une amélioration des connaissances des mécanismes et du traitement de l'asthme. Le taux d'hospitalisation pour l'asthme a augmenté au Canada de 40 % entre les années 80 et 90; ce qui correspond à une augmentation annuelle de 4,3 %. Des augmentations de 37 % et de 46 % furent observées chez les gens âgés de 15 ans et moins et chez les 15 à 35 ans. Outre le fardeau économique relié aux coûts hospitaliers, l'asthme est aussi une cause majeure d'absentéisme à l'école et au travail. Au Canada, l'absentéisme professionnel pour cause d'asthme représente près d'un million de jours de travail perdus par année. Aux États-Unis, la perte de productivité calculée en raison de l'absentéisme représente le coût indirect le plus important, soit un milliard de dollars en 1990. 

Les causes exactes de l'asthme ne sont pas bien définies; plusieurs facteurs de risque ont cependant été identifiés. Des études démontrent une association entre l'exposition aux allergènes et l'apparition d'asthme. Par exemple, on a démontré une corrélation entre le niveau d'exposition aux acariens de la poussière dans la première année de vie et la présence d'asthme à l'âge de dix ans chez les enfants à risque, c'est-à-dire avec une histoire familiale d'asthme. La présence d'animaux domestiques est un facteur de risque reconnu dans le développement et la sévérité de l'asthme. L'exposition à la fumée secondaire de cigarette et le tabagisme durant la grossesse représentent également des facteurs de risque d'apparition d'asthme chez l'enfant. La présence d'infections respiratoires en bas âge (bronchiolites ou autres) est également un facteur de risque reconnu. 

Chez environ la moitié des asthmatiques, l'asthme apparaît avant l'âge de dix ans. Cependant, pour 25 % des asthmatiques, l'asthme n'apparaîtra qu'après l'âge de 40 ans. 

Les facteurs pouvant provoquer une crise d'asthme ou une recrudescence des symptômes sont les infections des voies respiratoires (rhume, grippe, etc.) et le contact avec des allergènes si l'asthme comporte une composante allergique. Les irritants bronchiques comme l'exercice, le froid, les odeurs fortes et la fumée peuvent également provoquer des symptômes chez l'asthmatique. La persistance d'un contact allergique dans l'environnement de l'individu asthmatique (comme la présence d'un animal domestique) peut influencer défavorablement l'état de santé d'un asthmatique et entraîner une aggravation de l'asthme allergique. 

L'évaluation de l'asthmatique comporte le questionnaire des symptômes, l'histoire familiale d'asthme ou d'allergie, l'examen physique. Un examen physique normal, c'est-à-dire l'absence de sifflements ou de bruits respiratoires anormaux au moment de l'auscultation, n'exclut en rien le diagnostic d'asthme puisque, comme nous l'avons déjà mentionné, l'asthme est intermittent. L'investigation de l'asthmatique doit comprendre une mesure objective de l'obstruction bronchique qui peut être faite de deux façons, soit à l'aide d'un petit cylindre portatif appelé débit de pointe ou à l'aide d'un appareil appelé spiromètre. Une variation de plus de 20 % du débit de pointe dans le temps est diagnostic d'asthme; toutefois, cette mesure est moins précise que la deuxième méthode appelée spirométrie. Le test consiste à mesurer le maximum d'air qu'un sujet peut expulser de ses poumons en une seconde (VEMS : volume expiré maximal en une seconde). Cette valeur est ensuite comparée à une valeur de référence obtenue chez des sujets normaux de même âge et de même taille et est exprimée en pourcentage de la valeur prédite. Une valeur inférieure à 80 % est considérée comme abaissée et une amélioration de plus de 12 % après inhalation d'une substance broncho-dilatatrice est diagnostic d'asthme. Quand l'asthme est léger, le VEMS peut très bien être normal; dans ces cas, pour prouver le diagnostic d'asthme, on peut effectuer une provocation bronchique, et ce, afin d'objectiver la présence ou non d'hyperexcitabilité bronchique. L'hyperexcitabilité bronchique se mesure lorsque l'on obtient une chute de 20 % ou plus du VEMS après inhalation d'une substance bronchoconstrictive d'histamine ou de méthacholine. L'hyperexcitabilité bronchique est présente chez tous les sujets asthmatiques en phase active. Enfin, les tests cutanés d'allergie complètent l'investigation. 

L'asthme est une maladie inflammatoire et l'on sait maintenant que l'inflammation bronchique joue un rôle prépondérant dans la chronicité des symptômes. Ces connaissances ont entraîné de nouvelles approches de traitement qui font aujourd'hui l'objet de consensus. Ces consensus ont pour but de standardiser l'approche en ce qui concerne l'évaluation et le traitement de l'asthme, afin de réduire les conséquences de cette maladie. 

Les Canadiens ont-ils un asthme en général bien maîtrisé ? Avant de répondre à cette question, l'on doit connaître les critères d'une bonne maîtrise, telle qu'ils sont définis dans le consensus canadien sur l'asthme. L'asthmatique bien maîtrisé n'a pas de symptômes quotidiens, il ne s'éveille pas la nuit en raison de son asthme ou, du moins, moins d'une nuit par semaine, il peut faire des activités physiques et n'a pas d'épisodes fréquents d'exacerbations. Une bonne maîtrise de l'asthme n'entraîne pas d'absentéisme à l'école ou au travail. Le patient asthmatique bien contrôlé n'utilise que quatre doses par semaine ou moins de son broncho-dilatateur, ce qui ne comprend pas toutefois la dose prise en prévention avant l'effort physique. L'obstruction bronchique ne doit pas être présente ou le patient doit être à plus de 85 % de sa valeur optimale de VEMS. Un sondage récent effectué en 1999 par la firme Angus Reid et comprenant 1000 sujets asthmatiques a démontré que, chez six Canadiens asthmatiques sur dix, l'asthme est mal maîtrisé. En effet 57 % des sujets interrogés dépassaient les normes au moins pour deux critères de maîtrise décrits ci-dessus. Malgré cela, à la question : Pensez-vous que votre asthme soit bien maîtrisé ?, 91 % ont répondu par l'affirmative. Les patients ne sont pas seuls à croire, souvent à tort, que leur asthme est bien maîtrisé. En effet, d'après le sondage, 77 % des omnipraticiens et 90 % des pneumologues estiment obtenir une maîtrise optimale de l'asthme chez leurs patients. Ceci souligne bien que tant les patients asthmatiques que les médecins sous-estiment l'ampleur des lacunes existantes sur le plan de la maîtrise de l'asthme. 

Pourtant, les dernières recommandations canadiennes concernant la prise en charge et le traitement de l'asthme sont claires. La prise en charge de l'asthme est d'abord fondée sur le contrôle environnemental puis sur la prise régulière d'une médication anti-inflammatoire chez les patients dont la maladie est plus sévère. Les corticostéroïdes en inhalations constituent de fait, la pierre angulaire de cette médication anti-inflammatoire. De façon générale, il est recommandé d'établir le traitement sur la prise régulière de corticostéroïdes inhalés en réservant aux broncho-dilatateurs (ß2-agonistes à courte action), un rôle uniquement de dépannage lors de la présence de symptômes incommodants. Les lignes directrices recommandent également qu'on remette aux patients un plan d'action écrit qui fournira au patient asthmatique les outils lui permettant de composer avec les exacerbations ou les crises d'asthme. 

En terminant, mentionnons qu'afin d'obtenir une bonne maîtrise de l'asthme, il est important que la personne asthmatique connaisse bien sa maladie et son traitement. Au Québec, nous sommes chanceux d'avoir un réseau d'éducateurs spécialisés œuvrant dans le cadre du Réseau québécois pour l'enseignement sur l'asthme RQEA. Il existe plus de 90 centres d'enseignement aux asthmatiques (CEA) dans les différentes régions du Québec vers lesquels le médecin peut diriger son patient pour recevoir l'éducation qu'il requiert. C'est un service gratuit et la liste des centres d'enseignement aux asthmatiques est présente sur le site Internet (www.rqea.com). 

Manon Labrecque, est médecin.
En collaboration avec le Bureau d'affaires du Québec de GlaxoWellcome

Source Effectif, volume 4, numéro 1, janvier / février / mars  2001

Ajouté à votre librairie Retiré de votre librairie