Proposons d’abord une définition de l’introspection. Voici le définition qu’en donne le référentiel du candidat viscéral, un guide en sélection : « Capacité à prendre conscience de ses perceptions, de ses sentiments et de ses particularités individuelles, ainsi que des effets qu’ils ont sur son entourage ».
À première vue, il semble donc difficile de considérer la capacité d’introspection du candidat comme un comportement performant à mesurer dans le cadre d’un processus de sélection. En effet, prendre conscience de ce que nous sommes et ressentons ne se traduit pas dans l’action de manière concrète. Il est d’ailleurs rare est rare de voir une référence à l’introspection à l’intérieur d’un descriptif d’emploi. Pourtant, l’introspection est à l’origine d’un grand nombre de comportements déterminants dans de nombreuses situations de travail. Par exemple, le candidat sait-il retirer des leçons de ses erreurs? Est-il capable de bien distinguer ses forces et ses limites caractéristiques? Fait-il preuve d’humilité?
L’introspection est souvent à l’origine du développement de l’ensemble des compétences reliées au savoir-être. Pour qu’une personne évolue, elle doit forcément commencer d’abord par une certaine prise de conscience.
On peut comparer cette aptitude à bien se connaître aux racines d’un arbre : elles ne sont pas la partie la plus visible, mais elles en déterminent néanmoins la base et la solidité. Pour cette raison, l’introspection devrait être beaucoup plus présente parmi les critères de sélection, surtout si le poste est de nature stratégique, comportant des enjeux complexes et des défis risquant de mettre à l’épreuve la personnalité du candidat.
Toutefois, même si on est convaincu que cette qualité est essentielle, on peut avoir de la difficulté à la mesurer dans un contexte d’entrevue. Par exemple, il apparaît plus facile de poser une question comportementale sur la capacité à gérer un projet que d’en poser une qui est reliée à l’introspection. Cela demande d’aller au-delà d’un comportement observable et de s’interroger plutôt sur le processus de réflexion du candidat. Comment y arriver? Dans un premier temps, on peut demander au candidat comment il définit et perçoit l’introspection, et quelle utilité il lui attribue au travail. La réponse procure déjà certains indices. On peut ensuite demander au candidat s’il pense faire preuve d’introspection et de quelle façon cela se manifeste au quotidien.
L’idée est de partir d’une conception théorique pour parvenir à une illustration concrète dans laquelle le candidat aura davantage à parler de lui.
- Parlez-moi d’une situation qui a généré une réflexion importante et un changement dans vos façons concrètes de faire? Décrivez bien la situation, la réflexion et le changement.
- Choisissez un événement qui vous a amené une prise de conscience sur vous-même.
- Parlez-moi d’un moment où vous avez eu à faire preuve d’humilité.
- Êtes-vous en mesure de nommer clairement vos forces et vos points de vigilance? Nommez-moi trois forces et trois points de vigilance accompagnés d’un exemple spécifique que vous avez vécu à un moment précis pour les illustrer.
- Que faites-vous pour vous assurer de recourir davantage à vos forces au travail?
- Que faites-vous pour améliorer vos points de vigilance ou faire en sorte de limiter les désagréments reliés à ces points?
Le recruteur qui souhaite intégrer l’introspection à son processus de sélection a tout intérêt à s’interroger lui aussi sur sa capacité d’introspection. S’il veut être bien en mesure d’évaluer cette composante, il lui sera bénéfique de faire ce type de réflexion au préalable.
Références
Guénette, Mathieu et Catherine Bédard. Le candidat viscéral, un guide pratique en sélection pour un regard approfondi sur le candidat, Éditions Yvon Blais, 2017
Page Facebook : Le candidat viscéral
À propos de l’auteur
Mathieu Guénette, CRHA, est consultant et conseiller d’orientation organisationnel chez BrissonLegris et Gauthier, Murtada & Partenaires. Conseiller d’orientation depuis 1998, il œuvre également en pratique privée. Passionné de dotation, il conçoit des outils d’évaluation misant sur l’innovation et les enjeux humains. En 2017, il publie en compagnie de Catherine Bédard, le guide en sélection Le candidat viscéral qui remporta le prix professionnel de l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec. Chargé de cours à HEC-Montréal depuis 2010 (cours « Psychologie et gestion des personnalités difficiles »), il est l’auteur de « Déjouer les attitudes kamikazes en recherche d’emploi » (2000) et « Orientation et confidences » (2003). On peut le joindre via son site web : www.leschercheursdesens.com.