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Le transfert des apprentissages – Partie 1

Ce texte en deux parties présente des moyens simples et concrets pour favoriser le transfert des apprentissages dans le quotidien.
15 février 2022
France Lefebvre, CRHA

Le transfert vers le travail des apprentissages réalisés en formation ou autrement a toujours été, et demeure à ce jour, un enjeu de taille. Le scénario est typique : la participante s’absente du quotidien, et à son retour au travail elle retombe dans la course folle, tente de récupérer les « heures perdues » et finalement se dit qu’elle y reviendra dès qu’elle aura une minute – ce qui n’arrive à peu près jamais.

Que de belles opportunités manquées tant pour la personne et pour l’équipe que pour l’organisation, considérant que la formation devrait permettre à tous et à toutes de grandir en savoir, en savoir-faire et en savoir-être. En appliquant de nouvelles connaissances, en les partageant avec ses collègues, on multiplie l’investissement pour le bien de la collectivité.

Tout le monde le sait, ça va vite, on manque de ressources, la pression est au maximum dans tous les environnements de travail.

  • Qui a le temps de prendre du recul face à sa pratique professionnelle pour s’améliorer?

En fait, la question est mal posée.

  • Qui a le luxe de ne pas prendre du recul face à sa pratique professionnelle pour s’améliorer?

S’améliorer, ça prend du temps, de la concentration et des efforts. Or, l’organisation a un rôle essentiel à jouer pour que les personnes qui participent à des formations puissent mettre en pratique leurs apprentissages.

Dans Gérer la formation – Viser le transfert (2011), Jean-François Roussel nomme les cinq principales caractéristiques propres au climat de transfert[1] :

  1. Le soutien perçu du gestionnaire
  2. Le soutien perçu des pairs
  3. La rétroaction
  4. L’ouverture au changement
  5. La perception positive qu’a l’apprenant des impacts produits par l’utilisation des nouveaux apprentissages

Que l’on intervienne en présence ou à distance, ces cinq éléments méritent qu’on s’attarde à eux pour « s’octroyer le luxe » de réfléchir à ses apprentissages et d’identifier des moyens de les intégrer au quotidien.

L’importance d’apprendre

Approfondir ses connaissances, en développer de nouvelles, avoir la possibilité d’essayer, de se tromper, de recommencer et d’intégrer de meilleures façons de faire, c’est motivant pour la majorité des gens.

C’était vrai par le passé, et ce l’est encore plus aujourd’hui. Les dernières générations qui sont entrées sur le marché du travail en font d’ailleurs de plus en plus un critère sine qua non de condition d’emploi.

  1. Le soutien perçu du gestionnaire

    Au retour d’une formation, combien de gestionnaires prennent le temps de demander à leur employée ce qu’elle a appris et comment elle pourrait utiliser cette connaissance dans son travail?

    Pourtant si simple, mais malheureusement sous-utilisé, ce questionnement démontre l’intérêt et le soutien de la gestionnaire envers les apprentissages réalisés, et ouvre la porte à des améliorations valables pour la personne, l’équipe et l’organisation.

  2. Le soutien perçu des pairs

    Lorsque partagés avec les collègues, les apprentissages deviennent autant d’occasions de s’améliorer ensemble. Divers moyens sont à la disposition des équipes.

    Au retour d’une formation, on peut inviter la participante à partager ses apprentissages lors de la réunion d’équipe et à manifester son engagement à les mettre en pratique[2]. On peut ensuite amorcer une discussion sur ce que l’équipe pourrait faire pour intégrer ces apprentissages dans son fonctionnement.

    Une entreprise avait pour pratique de demander à un membre de l’équipe des ventes d’apprendre en profondeur le fonctionnement d’un de ses produits et de le démontrer à ses collègues.

    Les bienfaits d’une telle approche sont triples :

    • La personne devient une référence pour ce produit auprès de ses collègues.
    • Tous les membres de l’équipe haussent leur niveau de connaissance.
    • Le vendeur affine des habiletés de présentation qui lui seront très utiles avec ses clients.
  3. La rétroaction

    Une citation attribuée à Cal Ripken Sr., joueur de baseball et ancien coach des Orioles de Baltimore (1976-1992), va comme suit : Practice doesn’t make perfect. Perfect practice makes perfect[3].

    Dans un contexte de transfert des apprentissages, la mise en pratique des nouvelles connaissances ou habiletés permet une rétroaction formelle ou informelle venant de la gestionnaire ou des pairs, ce qui favorise leur intégration, l’amélioration des pratiques, et, qui sait, l’atteinte de la perfection.

  4. L’ouverture au changement

    Ça semble évident, et pourtant ce n’est pas toujours le cas. Pour transférer des apprentissages en emploi, les parties prenantes – l’apprenante, bien sûr, mais aussi la gestionnaire et l’ensemble de l’équipe – doivent faire preuve d’ouverture au changement.

    L’ouverture au changement signifie entre autres de consentir au droit à l’erreur commise de bonne foi, et d’ainsi créer un climat qui permet de faire des essais en se sentant en sécurité.

  5. La perception positive qu’a l’apprenant des impacts produits par l’utilisation des nouveaux apprentissages

    Bien entendu, si le transfert des apprentissages suscite de la reconnaissance de la part de l’organisation, qu’elle soit monétaire, reliée à l’avancement de carrière ou autre, les chances de multiplier les apprentissages augmentent et l’entreprise en sort alors grandie.

Conclusion

Le transfert d’apprentissage ne requiert pas nécessairement de grands projets ou des investissements énormes : des actions toutes simples, qui relèvent par exemple d’une culture organisationnelle qui reconnaît l’importance de l’apprentissage et favorise son intégration dans le quotidien, peuvent jouer un grand rôle.

Lorsque le milieu de travail donne une place au transfert, il crée un goût pour l’apprentissage.

À la deuxième partie de cet article, nous approfondirons deux moyens de favoriser le transfert des apprentissages, soit le codéveloppement professionnel et le coaching.


Author
France Lefebvre, CRHA Formatrice-coach, consultante en développement organisationnel et gestion Technologia

Coach d’affaires certifiée, formatrice, conférencière et consultante axée sur la consolidation des compétences des gestionnaires d’équipe, France accompagne les clients de Fortuna depuis 2009. Elle est reconnue pour ses approches concrètes qui placent le gestionnaire de proximité au cœur du succès des organisations. Sa conviction profonde que chaque humain possède en lui les solutions à ses enjeux fait d’elle une coach qui insuffle le gout d’agir. Certifiée Profil NOVA, France a également co-écrit le guide pratique pour implanter des groupes de codéveloppement professionnel, Collaborer et agir | Mieux et autrement (2017).


  1. ROUSSEL, Jean-François (2011). Gérer la formation – Viser le transfert. Montréal, Canada : Guérin, éditeur ltée, p. 118.
  2. PHILLIPS, Jac. J. (1997). Return on Investment in Training and Performance Improvement Programs, Houston, Texas: The Gulf Publishing Company.
  3. NDLR : S’exercer ne rend pas parfait. S’exercer parfaitement rend parfait.