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En période de croissance : développer les compétences en gestion

Percy Miller, une société de conseil spécialisée dans la mise en relation des entreprises en recherche de solutions informatiques, faisait face à un sérieux problème de rétention au moment même où ses activités étaient en pleine croissance. Le taux de roulement devenait inquiétant. Le remplacement des employés démissionnaires ou promus dans la hiérarchie imposait à l'entreprise de donner constamment une formation technique au nouveau personnel. Cette situation engendrait inévitablement des coûts.

1 avril 2015
Entrevue avec Laurent Vorelli, CRHA

Percy Miller a décidé de faire appel à un consultant spécialisé en ressources humaines, M. Laurent Vorelli, CRHA, fondateur de Propulsion RH.

Intervenir comme consultant externe en PME demande tact et humilité. « Au départ, ce n'était pas vraiment une entreprise vendue aux interventions externes en ressources humaines, concède M. Vorelli. Il fallait souvent y aller par étape. » Il rappelle que, dans toute intervention externe, se faire accepter est une condition de base pour assurer le succès du projet. « Il faut vraiment proposer des solutions adaptées aux enjeux du moment. »

Selon lui, un consultant externe doit toujours prendre conscience des règles informelles qui régissent l'entreprise, même lorsqu'il n'y a pas de politiques ou de règlements établis. M. Vorelli a rencontré les membres de la direction pour comprendre ce qui se passait dans l'entreprise. Il a effectué plusieurs observations en poste (shadowing) pour analyser les méthodes de travail des employés et les interventions des gestionnaires auprès d'eux. Il a aussi fait parvenir des questionnaires à des employés et à des gestionnaires afin de mieux évaluer la situation et de trouver ensuite les solutions appropriées.

Après ce travail d'écoute et d'observation, M. Vorelli a posé un diagnostic : les gestionnaires possédaient une solide expertise technique, mais n'avaient pas suffisamment développé leurs compétences en gestion de personnel. En raison de la croissance rapide du nombre d’employés dans l'entreprise, davantage de personnes se sont vu conférer des responsabilités de supervision. « C'est une entreprise qui était très orientée vers la performance et les résultats. Et, effectivement, elle avait obtenu d'excellents résultats, raconte-t-il. Bien qu’elle ait déjà travaillé un peu sur la mobilisation d'équipe par des activités ciblées tout en favorisant une meilleure ambiance de travail, elle avait besoin d’insister sur la gestion des employés. » Alors que l’entreprise était en voie de doubler le nombre de travailleurs sous sa direction, il était devenu urgent de se consacrer à cette tâche.

M. Vorelli a ensuite mis en place des programmes de formation. Alors que toutes les activités de formation portaient sur la gestion du personnel, leur contenu variait selon le niveau hiérarchique des personnes à qui elles s'adressaient. Auprès des membres de la direction, les interventions se concentraient sur le leadership dans la gestion du personnel en abordant les questions de mission, de valeurs et de mobilisation des équipes. Avec les superviseurs, M. Vorelli a plutôt abordé des notions pratiques de gestion du personnel, relatives entre autres à l'animation de réunions ou à l'évaluation de la performance des employés. En ce qui concerne les superviseurs adjoints, la démarche visait surtout à leur enseigner des approches pour mieux développer les compétences de leurs employés.

La méthode pédagogique a été adaptée pour mieux rejoindre la réalité de ces travailleurs. « Les participants n’étaient pas habitués à s'asseoir pour écouter quelqu'un parler. Donc, on a organisé des mises en situation ainsi que des ateliers et on a administré de courts tests. Enfin, on a mis en place des plans d'action afin que les participants s’engagent réellement dans certaines actions spécifiques, raconte M. Vorelli. »

Chaque formation était suivie de séances de coaching individuelles. « Les employés n'étaient pas familiers avec le coaching. Il a fallu les habituer, parce que ça demande un engagement de part et d'autre », explique M. Vorelli. Au départ, le coaching consistait surtout en un « transfert » de contenu adapté à la personne selon son contexte. « Depuis le mois dernier, on a commencé du véritable coaching individuel. On aborde uniquement les enjeux individuels. »

Puisque M. Vorelli éprouvait de la difficulté à trouver des plages horaires pour réaliser ses interventions auprès de tous les participants, la plupart des formations ont été séparées en deux séances d'une demi-journée, plutôt que de s'étendre sur une journée entière. « Pour une PME, mobiliser tous les directeurs pendant une journée, ça peut être compliqué, rappelle-t-il. On ne pouvait pas retirer tout le monde de son poste de travail en même temps. »

L'entreprise avait aussi comme défi de mobiliser les employés. L'entreprise a beaucoup misé sur l'organisation des activités pour consolider les équipes en y investissant environ 4 % de sa masse salariale. Des tables de baby-foot et de ping-pong ainsi que des jeux vidéo ont été installés dans les nouveaux bureaux du centre-ville de Montréal, rendant l’environnement de travail plus agréable. De plus, les tâches, généralement effectuées au téléphone, pouvant s'avérer routinières ; « les caractéristiques des postes sont en train d'être redéfinies, indique M. Vorelli. Dans un souci de rétention, les postes sont enrichis. »

Selon le consultant, l'un des premiers résultats de toutes ces démarches fut « une prise de conscience, à travers l'organisation, comme quoi c'est important de se doter d'outils de gestion des ressources humaines ». Le taux de roulement a baissé d'au moins 50 % après le début de ses interventions.

« Dans un contexte où l'entreprise est en expansion, c'est particulièrement important, dit M. Vorelli. Cela évite beaucoup de recrutement, alors que les gestionnaires en ont déjà beaucoup à faire. » Bien que le nombre d'employés ait doublé en deux ans, passant de 30 à 60 personnes, Percy Miller n'a pas été forcé d'effectuer plus d'activités de recrutement que ce qu'une croissance en exige normalement, en raison de la bonne rétention du personnel en place. M. Vorelli en tire la conclusion que l'un des leviers sur lequel on peut miser pour mobiliser les employés dans une PME est le développement des compétences. « Ce cas d’entreprise en est la preuve par l’exemple », affirme-t-il.


Entrevue avec Laurent Vorelli, CRHA