ressources / revue-rh / archives

Les leviers pour mener une carrière dans la fonction publique

La fonction publique offre une multitude d’opportunités professionnelles dans une grande variété de contextes de travail et de cultures organisationnelles. Elle est composée de plus de 90 000 personnes travaillant dans dix-huit ministères et plus de soixante-dix organismes publics, sans compter le réseau de la santé et de l’éducation.

4 juillet 2013
Stéphane Hardy, CRHA

Les professionnels de la gestion de ressources humaines qui y travaillent offrent des services à des clients internes, au sein d’une direction des ressources humaines, et exercent un rôle-conseil auprès de gestionnaires et d’employés. Beaucoup offrent des services directs à la population, à titre de conseillers auprès d’individus ou d’entreprises. Même si elles partagent un ensemble de valeurs, une réglementation et une culture commune du service public, toutes les organisations ont leur couleur, parfois un mode de financement particulier et leur propre histoire. Pour y performer et avoir un impact significatif, ces professionnels doivent maîtriser certaines compétences particulières. Chacun souhaite que son travail ait plus de sens, lui permette vraiment d’avoir une influence. Chacun veut s’épanouir, sentir cette étincelle qui fait qu’on ne compte pas les heures, mais que le travail accompli compte.

Le contexte global, une approche systémique
Comme pour toute organisation, la fonction publique a besoin d’une vision globale, qui est définie par le Secrétariat du Conseil du trésor (SCT), offrant ainsi aux citoyens une image intégrée de la fonction publique. De par son rôle de gouverne, le SCT établit les grandes orientations en matière de gestion des ressources humaines pour l’ensemble des ministères et organismes, leur permettant ainsi de mener à bien, et de façon cohérente, leur action à cet égard.

Cette nécessité d’une vision globale, des principes de transparence et d’équité pose des défis intéressants. Prenons la réglementation entourant les processus de dotation. Bien qu’ils doivent répondre aux défis de l’administration tel un besoin urgent de main-d’œuvre, ils ont aussi pour but d’assurer des processus équitables et uniformes sur l’ensemble du territoire, alors que les réalités économiques et les bassins de main-d’œuvre sont fort différents d’une région à l’autre. La capacité de traiter plusieurs priorités devient utile pour aborder des situations paradoxales.

Dans un système démocratique, l’élection d’un nouveau gouvernement constitue habituellement un moment clé où certaines orientations gouvernementales sont appelées à changer. L’appareil administratif peut avoir à répondre au choix des électeurs. Dans ce contexte, le professionnel en ressources humaines doit s’adapter à la fois à des décisions managériales et à des choix politiques. Les gestionnaires doivent eux aussi s’adapter aux orientations gouvernementales, manœuvrer dans des situations complexes et prendre des décisions qui répondent aux attentes de la population. Pour le professionnel, être attentif à ces facteurs facilite la recherche de sens pour soi, et par conséquent le rend disponible pour exercer un rôle-conseil auprès de ses clients. C’est la notion de contrat psychologique (implicite) qu’il doit explorer pour lui-même et chez ses clients internes.

La fonction publique se caractérise aussi par une volonté d’adapter ses pratiques managériales en termes d’efficience et d’efficacité. C’est un milieu en constante évolution. Elle le fait souvent en s’inspirant des grands courants du management des grandes organisations : reddition de comptes, gestion par résultats, approche Lean, centralisation ou décentralisation. Comme elle doit offrir des services à l’ensemble de la population, et non seulement à une clientèle spécifique, elle doit innover, ajuster et adapter ces concepts aux impératifs du secteur public. Il faut interpréter ces mouvements non pas comme des hésitations ou des retours en arrière, mais plutôt comme un processus constant d’adaptation ou d’évolution.

Les programmes de gestion des ressources humaines sont eux aussi soumis à plusieurs facteurs environnementaux. Au-delà de la performance attendue des programmes communs à toutes les organisations, ils doivent répondre aux attentes variées de la population. Les programmes de reconnaissance, de rémunération, de relève, de dotation et autres doivent être rigoureux afin de trouver justification auprès de l’opinion publique et des différents groupes qui la composent. Mentionnons finalement le respect du cadre budgétaire de l’État, un impératif pour toutes décisions.

Et rappelons que les organisations qui composent la fonction publique traversent les mêmes cycles que toute organisation, soit des phases de croissance, de décroissance, de transformation, de fusion. Il faut savoir développer sa propre résilience par rapport aux changements…

Pour bâtir sa crédibilité
On le voit, la fonction publique présente un environnement diversifié, composé de nombreuses parties prenantes, qu’il faut savoir appréhender dans un contexte historique et politique. Le rôle du professionnel en ressources humaines y évolue dans le même sens que pour l’ensemble de la profession. Pour avoir une influence, pour bâtir sa crédibilité, il doit être plus qu’un spécialiste de son domaine, il doit :
  • s’intéresser aux personnes, mais également aux priorités gouvernementales et aux grands enjeux de la société, tant économiques que sociaux;
  • s’intéresser aux programmes des partis politiques afin de voir venir et de donner du sens;
  • bâtir sa crédibilité sur son expertise, mais aussi sur sa connaissance des besoins et des enjeux du client;
  • démontrer de l’ouverture d’esprit dans ses relations interpersonnelles, connaître les différents profils personnels et savoir composer avec ceux-ci;
  • avoir une pensée stratégique, savoir présenter son dossier en fonction des personnes, mais également de l’agenda du client, de ses enjeux d’affaires et des coûts;
  • avoir des compétences en planification et de l’initiative, faire preuve de créativité, habileté nécessaire dans la complexité;
  • acquérir un sens du service client très développé axé sur la qualité des services offerts, car les attentes des gestionnaires ou des clients externes ont évolué;
  • sortir de son cadre de référence, adopter une approche de partenariat, de coaching et de facilitateur;
  • avoir un sens politique et une aptitude pour la concertation et la gestion de divergences;
  • bien connaître ses valeurs et reconnaître celles des autres;
  • comme pour tout travail d’intervention et de rôle-conseil, s’associer avec ses collègues dans une approche multidisciplinaire tout en gardant le leadership;
  • démontrer une grande capacité de raisonnement critique et de résolution de problèmes.

La fonction publique, c’est une multitude de contextes de travail. Les professionnels en ressources humaines qui y performent et qui ont un impact significatif ont bien compris la complexité de leur milieu de travail et savent qu’une approche renouvelée de la gestion des ressources humaines y est encore plus importante. Ils comprennent les enjeux d’affaires de leur organisation, mais ils savent aussi saisir les enjeux du client et adapter leur langage en conséquence. Être professionnel en ressources humaines dans un ministère ou un organisme public, c’est désirer relever les défis stimulants que l’avenir réserve à la fonction publique.

Stéphane Hardy, CRHA, Ps. Ed., M.A.P., conseiller en gestion des ressources humaines*

* Depuis plus de dix ans, Stéphane Hardy, CRHA, intervient comme conseiller dans divers organismes du secteur public. Il a notamment oeuvré à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, au ministère des Transports et au ministère des Ressources naturelles.

Source : Effectif, volume 16, numéro 3, juin/juillet/août 2013.


Stéphane Hardy, CRHA