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Groupe St-Hubert - Livrer du bonheur

L’entreprise a pignon sur rue depuis plus de soixante ans et les Québécois de 0 à 99 ans reconnaîtraient ses célèbres boîtes jaunes entre mille. Pour Jean-Pierre Léger, président et chef de la direction de Groupe St-Hubert, la notoriété acquise prend sa source dans le souci accordé aux êtres humains : les clients tout autant que les employés. C’est que, laisse-t-il entendre, l’un comme l’autre assurent la force de la marque et sa pérennité. Bienvenue dans l’univers de St-Hubert.

12 janvier 2014
Guylaine Boucher

À l’extérieur, aucun logo en façade ni affiche permettant de deviner la présence du siège social de l’une des plus grandes chaînes de restauration au Québec. Interrogé à ce propos, Jean-Pierre Léger élude rapidement la question : « S’exposer serait inutile; nous préférons laisser toute la place à nos restaurants. » Anecdotique en apparence, la réponse reflète en fait très bien le respect du Groupe envers la soixantaine d’entrepreneurs indépendants et les quelque 115 rôtisseries qui portent sa marque à titre de franchisés. Le même respect teinte d’ailleurs l’ensemble de la philosophie de gestion de l’entreprise. « Dès la fondation de l’entreprise en 1951, mes parents accordaient beaucoup d’importance aux gens qui travaillaient avec nous. C’était très important pour eux. Ils savaient qu’ils étaient au cœur de nos activités. Évidemment, à l’époque, nous n’avions qu’un petit restaurant de 75 places sur la rue Saint-Hubert. Aujourd’hui, nos activités sont beaucoup plus vastes, mais nous considérons toujours que les ressources humaines sont fondamentales », résume Jean-Pierre Léger.

La place accordée à la fonction ressources humaines dans la stratégie de l’entreprise illustre les dires du président. La vice-présidente, ressources humaines, Ginette Longchamp, CRHA, siège notamment au comité de direction du Groupe, en plus de piloter le comité Ressources humaines et gouvernance du conseil d’administration. Acquisitions, nouveaux modèles d’affaires, excellence organisationnelle, développement web, communications internes… Quels que soient les enjeux, en sept ans chez St-Hubert, madame Longchamp soutient avoir été mise à contribution dans chacune des grandes décisions de l’entreprise. « Nous n’avons pas à nous battre pour convaincre les gens de nous suivre. Chaque fois, dit-elle, la contribution des ressources humaines est bienvenue et notre valeur ajoutée est reconnue. » Des propos soutenus par le président de l’entreprise qui avoue ne pas être en mesure d’imaginer «un comité de direction sans l’apport stratégique des ressources humaines».

Le Groupe St-Hubert en chiffres
62 ans d’histoire
2 divisions:
    - St-Hubert Restauration
    - St-Hubert Détail
67 franchisés
13 restaurants corporatifs
3 usines de fabrication agroalimentaires
9 500 employés, incluant ceux des franchisés
33 conventions collectives

Des réalisations concrètes
Si l’importance des ressources humaines est reconnue d’emblée dans l’organisation, les réalisations de l’équipe RH au cours des dernières années ont aussi contribué à consolider son influence. L’intégration harmonieuse des trois équipes de la division St-Hubert Détail dans un seul site est au nombre de ces réussites.

En 2011, le Groupe se portait en effet acquéreur de Maître Saladier, une entreprise de transformation alimentaire à l’origine notamment des produits À table distribués dans les supermarchés. L’acquisition venait consolider la position de St-Hubert dans l’industrie du détail et s’ajoutait à la filiale Épices et sauces de l’entreprise et au distributeur Meilleures Marques/Best Brand acquis en 2003. Mais un tel ajout ne se fait pas sans certains ajustements. « Les équipes étaient partagées entre plusieurs sites et nous voulions les regrouper, notamment pour créer une meilleure synergie », explique Jean-Pierre Léger.

L’agrandissement de l’usine de Boisbriand, construite au coût de 22 millions de dollars, a servi de fondement à l’intégration. Selon le président, « le défi était grand parce que les gens partaient d’environnements auxquels ils étaient habitués et dans lesquels ils disposaient très souvent de bureaux fermés pour aller dans un lieu à aire ouverte où ils allaient devoir apprendre à se côtoyer. Or, affirme-t-il, grâce aux efforts qui ont été investis par les ressources humaines, la transition s’est faite tout en douceur. C’est un énorme succès. Il suffit d’aller là-bas pour le sentir. Les gens sont contents de faire partie de la grande famille St-Hubert et ils apprécient l’environnement de lumière qui leur a été offert. » Pour Ginette Longchamp, les nombreuses activités de gestion du changement qui ont été effectuées sont à l’origine du succès. « Le mot d’ordre que nous nous sommes donné était clair. Il ne fallait rien laisser au hasard. Tous les écueils possibles devaient être pris en compte et traités pour éviter d’avoir à les gérer une fois les équipes déménagées. Honnêtement, les résultats obtenus sont au-delà de nos attentes. »

Les gains effectués en matière de rétention de personnel figurent aussi au palmarès des réalisations dignes de mention, selon Jean-Pierre Léger. « Chez nous comme ailleurs, le taux de roulement des employés est un enjeu important, particulièrement dans le secteur de la restauration. À l’heure actuelle, plus que jamais auparavant, plus de travailleurs quittent le marché du travail en raison des départs à la retraite. Par conséquent, argue le président, il devient très important de penser à la fidélisation des employés. Le service des ressources humaines a pris les choses en main et, à l’heure actuelle, les statistiques relatives au taux de roulement sont en baisse dans les rôtisseries et il y a aussi eu une amélioration du côté des usines. C’est très positif et il faut continuer dans ce sens. À terme, je suis persuadé que c’est ce qui nous permettra de relever le défi de la main-d’œuvre et de nous imposer comme employeur de choix. »

Ginette Longchamp est d’autant plus fière de l’amélioration notée que, pour y arriver, son équipe a dû convaincre et mobiliser le réseau des franchisés du Groupe. « Les franchisés sont des entrepreneurs indépendants qui gèrent eux-mêmes leur main-d’œuvre. Il a donc fallu les convaincre de la pertinence de suivre le taux de roulement pour mieux pouvoir agir. » Entre les nombreuses présentations sur le sujet, l’implantation d’un système informatisé de gestion du taux de roulement et la réalisation d’un premier diagnostic à titre d’employeur de choix, la vice-présidente a relevé son pari. À son avis, rien de tout cela n’aurait cependant été possible sans le soutien indéfectible du président et sa participation aux divers forums d’échanges. Le travail assidu des conseillers en ressources humaines sur la route a aussi compté pour beaucoup. « Nous sommes très sélectifs sur les gens qui composent l’équipe des ressources humaines. Nos conseillers comprennent bien les affaires et sont capables de tenir un discours près des opérations qui est particulièrement crédible auprès des franchisés. Ils savent démontrer le lien entre le roulement de personnel et la qualité du service à la clientèle. En fait, la philosophie interne insiste sur le fait que l’expérience client passe inévitablement par l’expérience employé, intimement liées. Les conseillers ont su être à l’écoute et soutenir les équipes de gestion en diffusant les bonnes pratiques et en se faisant les ambassadeurs du Programme d’excellence en ressources humaines. »

Des défis importants
Pour la vice-présidente, ressources humaines, la capacité d’écoute et l’agilité sont non seulement à la base des plus importantes réalisations RH du Groupe à ce jour, mais elles sont aussi la clé pour les projets à venir. « Les choses évoluent tellement rapidement qu’il faut être capable de s’ajuster rapidement, de comprendre les enjeux d’affaires et de leur apporter des réponses adaptées. Il faut avoir de la profondeur, mais aussi être passionné à l’égard du milieu dans lequel on évolue, et surtout des gens. »

Il faut dire que les défis ne manquent pas. Jean-Pierre Léger ne s’en cache pas... Si, depuis cinq ans, son entreprise est parvenue à maintenir une certaine croissance, la division Restauration a été plus affectée par la crise économique. Confiant, le président croit cependant en la capacité de son entreprise à tirer son épingle du jeu. Après avoir misé pendant des décennies sur l’élargissement de son réseau de franchisés, l’entreprise – qui admet avoir atteint son point de saturation au Québec du moins – met le cap sur la croissance organique.

Or, qui parle de croissance organique parle très souvent d’efficience et d’amélioration continue. Jean-Pierre Léger le confirme, « pour connaître de la croissance, il faut sans arrêt améliorer la prestation de service tant en ce qui a trait à la qualité de l’accueil et du service, que de l’exécution en cuisine. C’est un défi important, mais nous avons une bonne équipe et les ressources humaines sont encore une fois au cœur du virage que nous avons entrepris. »

Pour y parvenir, l’équipe de Ginette Longchamp compte notamment sur l’apport de l’Université St-Hubert. Orienté sur le développement des gestionnaires, le programme de l’Université est imposé à tous les nouveaux gestionnaires qui joignent le Groupe. Il permet d’explorer non seulement la gestion de personnel, mais aussi la relation client. Développés et offerts en très grande majorité par des gens de l’interne, les cours de l’Université permettent aussi de partager les savoirs et de préserver les expertises, en plus de valoriser et de mobiliser les troupes.

Parallèlement, l’entreprise déploie divers programmes de gestion de la compétence et de développement, notamment pour la relève. Elle met aussi la touche finale au renouvellement de sa marque employeur, notamment dans le domaine du recrutement en ligne.

Plus significatif encore, la fonction ressources humaines s’est vu octroyer un tout nouveau mandat: celui de l’excellence organisationnelle et de l’amélioration continue dans l’organisation. « Nous allons accompagner de façon concrète l’ensemble de l’organisation dans sa quête d’amélioration et d’excellence. Notre défi sera de bien mesurer nos actions en fonction des besoins réels et des objectifs d’affaires de St-Hubert. C’est un volet hautement stratégique et ce sera notre plus importante contribution au plan d’affaires et à la croissance organique attendue de l’entreprise », explique la vice-présidente, ressources humaines.

Chose certaine, ce nouveau mandat confirme plus que jamais l’importance accordée à la vision ressources humaines dans l’entreprise. « Les valeurs humaines– la confiance, le respect et l’écoute–ont jusqu’à présent bien servi notre croissance. Les gestionnaires des ressources humaines sont les gardiens de ces valeurs, ceux qui font en sorte que les clients, comme les employés, aiment l’expérience St-Hubert. Leur rôle est fondamental et les défis qui pointent à l’horizon, notamment en ce qui a trait à la main-d’œuvre, confirment l’importance de ce rôle. »

Pour Ginette Longchamp, un slogan interne résume en quelques mots la philosophie de Groupe St-Hubert. « Notre mission, dit-elle, c’est livrer du bonheur. Ce slogan s’applique tant dans la division Détail que dans la division Restauration, tant pour les clients que pour les employés. » Si les gens heureux avaient une histoire…

Guylaine Boucher, journaliste indépendante

Source : Effectif, volume 16, numéro 5, novembre/décembre 2013.


Guylaine Boucher Rédactrice Agence Médiapresse