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Conjuguer assurances et êtres…

Il y a un an, Desjardins Groupe d’assurances générales (DGAG) se classait au premier rang des employeurs de choix de Hewitt et associés au Québec et au douzième au Canada. Mais lors du dévoilement du nouveau sondage en janvier 2008, DGAG était absente. Qu’est-ce que cela signifie? Tout simplement que DGAG travaille à se rapprocher de la première place au Canada en 2009 et qu’elle se sert de cette démarche pour pousser plus loin le dialogue et la mobilisation de ses employés! Entrevue avec Jude Martineau, président et chef de l’exploitation, et Yves Bouchard, CRIA, vice-président principal aux ressources humaines.

26 février 2008
Amélie Daoust-Boisvert

Yves Bouchard, nommé à son poste en l’an 2000, indique que DGAG participe tous les deux ans à ce sondage afin de « se donner, dans l’intervalle, la possibilité d’améliorer les éléments qui sont ressortis comme plus faibles ». Par exemple, en 2005, DGAG se situait sous la moyenne des employeurs de choix pour la reconnaissance non pécuniaire. « Nous avons choisi ce créneau et nous sommes allés à fond de train pour l’améliorer », poursuit monsieur Bouchard. Le succès n’a pas tardé à se faire sentir. Lors du sondage 2007, DGAG avait entièrement rattrapé son retard. Le président, Jude Martineau, est particulièrement fier de ces résultats, « surtout que l’élément reconnaissance est difficile à équilibrer. Trop, c’est comme pas assez! »

Pour y arriver, Yves Bouchard raconte que lui et ses troupes « sont retournés dans les équipes pour mieux saisir l’enjeu en cause. Nous nous sommes rendu compte que les employés n’avaient pas toujours l’impression que leurs efforts étaient appréciés. De fait, notre culture axée sur la performance faisait en sorte qu’on reconnaissait de manière tangible les résultats obtenus par opposition aux efforts fournis. » Pour augmenter leur sentiment de reconnaissance, la direction et le service des ressources humaines se sont dotés sans tarder d’un plan d’action. Par l’entremise d’activités de sensibilisation et de formation, « nous avons démontré aux gestionnaires les résultats qu’ils peuvent obtenir avec leurs équipes en modifiant leur approche quelque peu. Le message que nous voulions faire comprendre était que la reconnaissance non pécuniaire est un puissant outil de motivation », explique le vice-président. Des pratiques de reconnaissance éparpillées existaient déjà, mais il fallait faire mieux et nous assurer que cela fasse partie de nos bonnes pratiques. Avec la collaboration de quelques gestionnaires doués en la matière, nous avons colligé et mis à la disposition de tous un répertoire regroupant des éléments clés de la reconnaissance.

Compétence
Selon Jude Martineau, DGAG, filiale du Mouvement Desjardins, surfe sur une haute vague de croissance. Les résultats du troisième trimestre 2007 le confirment : l'apport de DGAG aux résultats du Mouvement était de 46,4 millions de dollars, en hausse de 64,3 % comparativement à la même période en 2006. Avec un chiffre d’affaires de 1,4 milliard de dollars et près de 1,8 million de polices d’assurance en vigueur, DGAG se positionne parmi les chefs de file des assureurs de dommages au Canada et est au premier rang des assureurs de dommages en direct au Québec. L’entreprise doit pouvoir compter sur ses 3400 employés au Canada, dont 2500 au Québec.

Au cours des derniers mois, DGAG s’est sérieusement intéressée à la relève des postes de gestion et de recrutement. « Ce sont des préoccupations constantes, par notre problématique de rareté des ressources », explique Yves Bouchard, au siège social de Lévis. Il suffit en effet de se promener sur la Grande Allée et sur le boulevard Laurier pour s’en convaincre, Québec est une ville d’assurances. Plus de dix enseignes se côtoient et sollicitent les mêmes actuaires, agents de ventes et gestionnaires. Les onze compagnies d’assurances employaient en 2005 quelque 8250 personnes dans la région de la Capitale nationale, à qui elles versaient 408 millions de dollars en salaires.

Aux bureaux de Mississauga, même portrait, rapporte Jude Martineau : « Au nord, au sud, à l’est, à l’ouest, partout à l’horizon, les plus grandes compagnies d’assurances ont pignon sur rue ». Et que dire de Montréal, où DGAG occupe d’autres bureaux!

Aussi, on peut comprendre pourquoi chaque employé, qu’il se nomme Songa, Gagnon, Kyle ou Labarre, compte pour la direction. En plus de la rareté annoncée de la main-d’œuvre et de l’omniprésence de la compétition, le président de DGAG anticipe d’ici cinq à huit ans de nombreux départs à la retraite. « Il faut être de plus en plus performant au niveau de l’attraction et identifier les talents », explique-t-il. Pour cela, il mise sur une vigilance en cascade, de la direction en allant vers les équipes, à tous les niveaux. Des critères et des grilles simples fournies aux gestionnaires mettent en lumière les individus prometteurs. « Nous ne promettons rien à personne, poursuit monsieur Martineau; nous véhiculons plutôt le principe voulant que l’individu est le premier responsable de son cheminement de carrière, mais qu’il y a beaucoup de place pour ceux qui veulent participer activement à notre progression. Mais, comme entreprise, nous nous soucions de son développement et nous nous investissons pour aider chacun à cheminer et à atteindre son plein potentiel. » La réussite du président, comptable agréé formé à l’Université Laval, en inspirera sans doute quelques-uns, puisque qu’il s’est vu attribuer le Prix Hermès de carrière de la Faculté des sciences de l’administration de son alma mater en 2000 et le Prix CA émérite décerné par les Comptables agréés de la région de Québec en 2002.

Cohérence
Pour ses stratégies de gestion des ressources humaines, Yves Bouchard mise sur la philosophie du walk the talk : de la parole aux gestes. Par exemple, il raconte que « plusieurs personnes de la Rive-Nord qui venaient travailler à Lévis trouvaient la traversée des ponts pénible ». Au moment de choisir un nouvel emplacement, c’est au nord de Québec, à l'angle de l'autoroute Henri-IV et du boulevard Hamel, que DGAG a inauguré son nouveau centre d’appels le 16 octobre 2006. Le site a été retenu en fonction de la provenance des employés de la Rive-Nord.

Grâce à ces bureaux neufs, devenus nécessaires en raison de la croissance de l’entreprise, une centaine d’employés travaillent non loin de leur domicile. « Ils nous en parlent encore! C’était une bonne façon de leur démontrer que nous sommes à l’écoute et que nous faisons preuve de cohérence, s’enthousiasme Yves Bouchard. Nous pensons aussi que des gens qui travaillent chez la concurrence pouvaient être freinés à venir travailler sur la Rive-Sud; nous leur offrons maintenant une alternative », poursuit-il. Enfin, cette initiative répond non seulement à un besoin des employés, mais en rapprochant le travail du lieu de résidence des employés, elle est également cohérente avec le plan vert de DGAG, qui devrait être dévoilé sous peu. L’assureur offre déjà des primes à rabais à l’achat d’une police pour un véhicule hybride et davantage de projets seraient sur le point de voir le jour.

Confiance
Depuis l’implantation du programme d’aménagement du temps de travail, plus de mille employés de DGAG profitent désormais d’un horaire qui leur est propre. Horaire comprimé, semaine de quatre jours, temps partiel, horaire adapté à l’achalandage saisonnier, congé compensatoire… autant de formules pour répondre à une main-d’œuvre jeune, pour qui la conciliation de la carrière et de la vie privée est une priorité. « Au départ, en 2004, nous avions l’appui de la direction, mais les gestionnaires craignaient que ce soit compliqué de gérer autant d’horaires différents », rappelle Yves Bouchard. Aujourd’hui, un an après la mise en place, « les gestionnaires ne reculent plus; au contraire, ils veulent aller plus loin! »

« C’est le projet dont je suis le plus fier, confie avec passion monsieur Bouchard, car le niveau de difficulté et de défi était élevé. » Selon lui, la consultation et l’élaboration du programme par étapes, « surtout pas en vase clos », ont garanti le succès actuel. « Les employés sont reconnaissants de ce que leur équilibre travail/famille nous importe. Nous ne faisons pas de compromis pour autant sur la business ou sur le service à la clientèle, au contraire : nous recherchons les intérêts communs! » Les résultats récents confirment que « la capacité opérationnelle dans les grandes périodes d’achalandage a même augmenté, en partie grâce aux mesures d’encouragement pour des horaires moins intéressants comme le vendredi soir et le samedi ». Même le taux d’absentéisme a diminué!

Communication
Ses réussites, DGAG les importe dans les entreprises qu’elle a acquises hors Québec. De 40 %, le taux de roulement dans certaines d’entre elles est passé à 5 % une fois la culture de l’assureur implantée. « Le climat de travail a évolué et cela se fait sentir d’une visite à l’autre; les employés semblent passer de la méfiance à la convivialité. Ici, tout le monde se dit bonjour dans les couloirs », souligne Yves Bouchard. Les employés mobilisés sont par la suite les meilleurs ambassadeurs du recrutement. Comme le croit Jude Martineau, il faut pour cela miser sur la communication : « si les employés savent où nous nous en allons comme entreprise, ils ont le pied sur l’accélérateur ». La communication doit d’abord passer entre les deux collègues à la direction, qui harmonisent les stratégies de l’entreprise et les besoins en ressources humaines par leurs interactions étroites et fréquentes. « On s’assure que tout est en lien logique de part et d’autre », explique le président.

La règle des cinq C
Selon monsieur Martineau, son leitmotiv de gestion, la règle des cinq C, explique la mobilisation élevée des employés de DGAG. Communication, cohérence, collaboration, confiance et compétence, voilà la stratégie qu’il privilégie. Après avoir tracé un bilan de l’année terminée, l’entreprise informe annuellement tous ses employés de la pertinence des projets prioritaires, de ses objectifs à court et à moyen termes. DGAG encourage le travail en équipe et base la confiance qu’elle octroie à ses employés à la fois sur leur talent personnel et sur la formation qu’elle leur offre pour les appuyer. L’approche est toute simple et souvent véhiculée… Toutefois, ses bénéfices se présentent uniquement quand elle est concrètement mise en application.

Collaboration
Pour poursuivre sur sa lancée, DGAG devra aussi miser sur les jeunes. Quelque peu fastidieux, car « il y a un folklore difficile à casser qui entoure notre domaine, celui des vendeurs qui cognent de porte en porte », illustre Jude Martineau. Pour modifier cette perception et promouvoir les carrières en assurance, il s’allie avec ses concurrents, les collèges et les universités, par le truchement d’un groupe de promotion de l’industrie pour la région de Québec. Pour lui, « tout le monde y voit un intérêt commun, il faut d’abord amener l’étudiant à réaliser que l’assurance offre plusieurs débouchés intéressants dans la région. Ensuite, c’est à nous de l’attirer dans notre entreprise par notre offre et notre réputation comme employeur ».

Amélie Daoust-Boisvert, journaliste indépendante

Source : Effectif, volume 11, numéro 1, janvier/février/mars 2008.


Amélie Daoust-Boisvert