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L’ombuds du personnel, vous connaissez?

Le rôle de l’ombuds du personnel est souvent méconnu. L’objectif de l’article est de démystifier ce rôle et démontrer qu’il contribue à la santé relationnelle au travail.
28 février 2024
Me Joëlle Thibault, CRHA

Qu’est-ce qu’un.e ombuds du personnel?

Il est important de bien cerner les limites du rôle de l’ombuds. Ce rôle est différent de celui de l’ombuds du domaine législatif (par ex., le Protecteur du citoyen, l'Ombudsman de la Ville de Montréal) ou du milieu collégial ou universitaire (par ex., ombudsman de l’Université de Montréal, ombudsman de l’UQAM)[1]

L’ombuds du personnel est une ressource indépendante, impartiale et confidentielle dont le mandat est d’être à l’écoute des préoccupations des employés et employées, et d’intervenir de manière informelle afin de faciliter la résolution des différends. L’ombuds formule des recommandations à l’organisation afin de corriger une iniquité ou de prévenir des tensions dans le futur.

D’entrée de jeu, il est important d’expliquer les principaux éléments de la définition ci-dessus : 

Indépendance. L’ombuds du personnel ne relève d’aucune division ni d’aucun groupe de l’organisation. Cette personne est habituellement nommée par le conseil d’administration ou la direction et fait rapport à l’instance l’ayant nommée. L’ombuds ne relève pas des ressources humaines et c’est cette indépendance qui est souvent une caractéristique importante pour le personnel.

L’ombuds est une ressource à laquelle l’ensemble du personnel a accès, ce qui comprend les gestionnaires, les personnes œuvrant au sein des ressources humaines et même les membres de la haute direction de l’organisation. 

Impartialité. L’ombuds ne représente ni l’organisation ni la personne qui soulève des préoccupations. Son impartialité doit être préservée et éviter de lui imputer des responsabilités organisationnelles aux fins d’éviter tout conflit d’intérêts. Ainsi, l’ombuds du personnel n’est responsable d’aucun processus RH. 

Confidentialité. La confidentialité des échanges entre l’ombuds et les personnes qui y ont recours est fondamentale. Sans une telle garantie de confidentialité, le rôle de l’ombuds est vain et perd de sa pertinence. Ainsi, sauf lorsque la loi l’exige ou que la personne concernée donne une autorisation expresse, l’ombuds du personnel préservera la confidentialité de l’information qui lui est confiée.

Préoccupations. Le personnel soulève une diversité de préoccupations et d’enjeux auprès de l’ombuds. Certaines personnes souhaitent, de manière confidentielle, discuter d’une situation conflictuelle qui les préoccupe et établir la meilleure approche ou connaître les options possibles pour y remédier. Cette démarche préliminaire peut les aider à s’orienter vers une ressource interne (par ex., RH, unité de gestion des plaintes, etc.). D’autres personnes ont le sentiment de subir une injustice ou une iniquité relative à un processus relevant des ressources humaines (recrutement, évaluation, rémunération. etc.), et souhaitent consulter l’ombuds à cet égard. Le cas échéant, pour évaluer la situation dans son ensemble, l’ombuds demande souvent la permission d’accéder au dossier de l’employé ou employée, ce qui lui permet d’évaluer la justesse d’une décision. 

Informalité. L’ombuds intervient de manière informelle et n’a aucun pouvoir décisionnel. Que ce soit en dernier recours ou à titre préventif, son rôle est de faciliter certains règlements et explorer des solutions à l’amiable dans l’optique de rétablir un sentiment de respect et d’équité. Selon le mandat, l’ombuds peut offrir une facilitation ou une médiation en cas de conflits relationnels. Le succès de sa démarche réside dans son approche et sa capacité à faciliter la résolution de situations complexes.

Recommandations. L’ombuds peut formuler des recommandations à la suite d’une analyse de l’interprétation ou de l’application d’un processus interne. Toutefois l’organisation demeure libre de suivre ou non ces recommandations. L’ombuds ne s’ingère pas dans l’interprétation ou l’application d’une convention collective.

Pourquoi une organisation voudrait-elle mettre en place cette ressource? 

Il arrive souvent que des organisations remettent en question la valeur ajoutée de l’ombuds. 

Cependant, celles qui optent pour cette avenue le font pour plusieurs raisons. Certaines souhaitent multiplier les options informelles qu’elles offrent à leur personnel afin d’agir de façon préventive et de réduire ainsi le recours à des processus formels (plaintes pour harcèlement, griefs, etc.) ou le recours à une résolution sur la place publique (médias, réseaux sociaux, etc.). 

La majorité des tensions sont prises en charge par les membres du personnel avec l’aide de ressources internes. Comme tout ne se règle pas, l’ombuds contribue alors de façon efficace à réduire l’escalade des tensions ainsi que les coûts humains et financiers liés à la gestion de conflits ou à l’image de l’organisation.

Pour diverses raisons, certaines personnes vivant une situation difficile sont craintives à l’égard des ressources humaines. La proximité qu’ont parfois les gestionnaires en ressources humaines vis-à-vis de la gestion et de la direction, ou encore le positionnement des RH à l’égard de certains dossiers peut alimenter ces craintes. L’intervention de l’ombuds permet alors d’offrir aux personnes travaillant au sein de l’organisation une opinion indépendante et des renseignements utiles qui rectifient ces perceptions et facilitent la résolution de la situation.

Les directions d’organisations, incluant celles des ressources humaines, sont particulièrement reconnaissantes de connaître l’opinion indépendante de l’ombuds du personnel sur une situation complexe, et de recevoir des pistes d’amélioration continue à l’égard de processus clés. 

À une époque où le bien-être individuel est un élément central des stratégies de rétention et d’attraction, l’ombuds est sans aucun doute une option utile et complémentaire aux mesures de soutien actuellement offertes par les ressources humaines. C’est une autre façon d’être à l’écoute des besoins du personnel et de réduire les angles morts au sein de l’organisation, tout en maintenant un climat de travail sain. 


Author
Me Joëlle Thibault, CRHA Avocate
Joëlle Thibault est avocate, CRHA, médiatrice accréditée et ombuds. Elle œuvre en prévention et résolution de différends au sein d’organisations variées depuis plus de 25 ans. Ses interventions comprennent un volet de rôle-conseil dans le cadre de conflits complexes, des médiations individuelles et de groupes, des analyses d’environnement de travail ainsi que des enquêtes en matière d’incivilité et de harcèlement. À l’heure actuelle, elle est l’ombuds désignée des employés et employées pour dix organisations. 

Source : Vigie RT, février 2024

1 Pour plus d’information sur les différents rôles d’ombuds au Canada, veuillez consulter le site du Forum canadien des ombudsmans (www.ombudsmanforum.ca).