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Bonnes pratiques d’implantation et assainissement des aires ouvertes en milieu de travail

Les bureaux à aire ouverte peuvent représenter des économies importantes pour les employeurs. Il faut toutefois veiller à ce que les effets négatifs potentiels d’une telle configuration ne coûtent pas plus cher en définitive.
19 février 2019
Sonia D'Anjou, CRIA

Les coûts immobiliers représentent une portion de plus en plus importante des frais d’exploitation des employeurs. Il est légitime que ceux-ci cherchent à les réduire afin de rester compétitifs. Il n’est donc pas surprenant d’apprendre qu’un grand nombre d’entre eux optent pour la réduction des espaces de travail et une configuration à aire ouverte.

Selon la littérature, il y a sept effets directs principaux et bien documentés de cet aménagement sur les travailleurs : la réduction de l’espace personnel, les effets sur la communication, l’augmentation du bruit, l’augmentation du stress, les effets sur la santé, la baisse de productivité, ainsi que la baisse de la satisfaction au travail.

Ces changements dans les conditions de travail créant une dégradation du milieu de travail, il y aura aussi une altération de l’image de marque de l’employeur.

Est-il possible de minimiser ces nombreux impacts?

En 4 étapes, nous vous proposons des mesures bien documentées pour y parvenir :

1re étape. Investir judicieusement dans un aménagement de l’espace, afin de minimiser les sept effets directs du travail dans les espaces ouverts en respectant ces 15 consignes :

  1. Conserver suffisamment d’espace personnel et permettre aux employés de le personnaliser.
  2. Favoriser dans la configuration de l’espace : l’échange d’information entre les employés, la communication, la cohésion et le transfert de connaissances, en éliminant autant que possible les sources potentielles de conflit ou de compétition entre les employés.
  3. Il est souhaitable de créer quelques espaces ouverts où se retrouvent des équipes qui observent des règles de fonctionnement et de communication respectueuses, plutôt qu’un seul grand espace ouvert et bruyant.
  4. Configurer l’espace pour minimiser le bruit, surtout si les employés doivent beaucoup utiliser le téléphone dans leur travail. Les voix humaines sont largement identifiées comme la source la plus stressante de bruit, mais aussi la plus nuisible à la concentration des employés.
  5. Favoriser la lumière naturelle et abaisser la hauteur des paravents, s’il est nécessaire d’en faire usage.
  6. Opter pour l’emploi de couleurs stimulantes et ne pas hésiter à faire appel à un décorateur spécialisé dans l’aménagement commercial.
  7. Investir financièrement pour rendre attirant et stimulant l’espace de travail s’avérera payant, car cela contribuera non seulement à attirer de nouveaux employés, mais aussi à retenir les travailleurs déjà en poste, peu importe la génération à laquelle ils appartiennent.
  8. Favoriser un décor épuré et des espaces de rangement cachés pour un coup d’œil apaisant.
  9. Proposer aussi de petites salles de travail où les employés pourront s’isoler pour effectuer à l’occasion un travail seul ou en petit groupe, afin de permettre une meilleure concentration ou le respect de la confidentialité, lorsque requis.
  10. Conserver une salle de réunion fermée de bonne dimension permettant les échanges, à l’écart des employés qui ont besoin de quiétude pour leur travail.
  11. Si les employés ne travaillent pas activement au téléphone, leur permettre, si cela est possible, d’écouter de la musique avec des écouteurs pour pouvoir se soustraire au bruit ambiant.
  12. Proposer des aires de repos agréables.
  13. S’assurer que l’échangeur d’air est adéquat, que la qualité de l’air est bonne et prendre des mesures pour contrôler la propagation de virus.
  14. Tenir compte dans l’aménagement des espaces, des caractéristiques de certains employés, telles que le statut, la fonction et le rôle.
  15. Voir les possibilités d’avoir accès à des salles en location à la journée ou à l’heure à moindre coût à proximité des locaux de l’employeur pour des événements occasionnels.

2e étape. Bien gérer le changement, soit le planifier, l’implanter et le « monitorer ». L’usage de sondages ponctuels peut être une bonne façon de s’assurer du bien-être des employés travaillant en aire ouverte et d’apporter des modifications à l’aménagement si nécessaire.

3e étape. Offrir des mesures favorables à l’équilibre travail-vie personnelle pour permettre aux employés de ne pas être surexposés à des facteurs de stress liés au travail en aire ouverte. Cet équilibre travail-vie personnelle pourrait être par exemple une journée par semaine en télétravail.

4e étape. Rester à l’affût des baisses de productivité des employés en tenant par exemple des tableaux de bord avec indicateurs permettant aisément d’en faire le suivi.

Faire tomber les murs entre les employés représente un défi de taille. Peu importe les motivations qui incitent un employeur à faire ce choix (surtout si ses employés doivent travailler en utilisant souvent le téléphone), les conditions de travail de ses employés s’en trouveront modifiées de manière importante. Certes, il est possible de minimiser les effets négatifs, mais il est impossible de les éliminer tous. Il faut cependant garder à l’esprit que l’aménagement d’une aire ouverte joue un rôle crucial dans l’organisation du travail. Il vaut alors vraiment la peine de s’y attarder avec minutie pour rendre l’expérience plus stimulante, favoriser une communication saine et s’en servir comme atout pour attirer et retenir la main-d’œuvre en contexte de rareté.

À propos de l’auteure

Sonia d’Anjou, CRIA fait partie de l’Ordre CRHA depuis 2003. Elle a obtenu un baccalauréat en relations industrielles (UdeM) en 1993, jumelé à une maîtrise en analyse et développement organisationnel (ENAP) terminée en 2004 ainsi qu’un D3C, diplôme de 3e cycle en administration (UdeS). Son projet de recherche effectué en 2018 portait sur le profil performant de télétravailleurs basés à la maison. Elle contribue à l’entreprise DNA RH Évaluation inc. qui détient de nombreuses licences, certifications et plateformes chez plusieurs fournisseurs en tests psychométriques éprouvés, surtout à titre de conseillère en développement organisationnel (RI/RH) et consultante en psychométrie et sondages en organisation. On peut la joindre par téléphone au 514 567-3038 et par courriel à sonia_danjou@hotmail.com

Site web : www.dnarhevaluation.com


Pour en savoir plus

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  • Zalesny, D.M. and Farace R.F. (1987). « Traditional Versus Open Offices: a Comparison of Sociotechnical, Social relations, and Symbolic Meaning Perspectives ». Academy of Management Journal, vol. 30, no 2, p. 240-259.

Sonia D'Anjou, CRIA Conseillère CAAPIDM
Titulaire d'un baccalauréat en relations industrielles et d'une maîtrise de l’ÉNAP en analyse et développement des organisations, Sonia D'Anjou s'intéresse tout particulièrement au télétravail et aux équipes virtuelles, mode de travail qu'elle a elle-même expérimenté au cours de sa carrière. Elle a en effet travaillé plus de douze ans comme recruteur senior et responsable d’équipes de recrutement en informatique et ingénierie. Réputée en tant que communicatrice, elle possède aussi diverses expériences en tant que formatrice et elle a réalisé plusieurs mandats et interventions en développement organisationnel et gestion du changement.