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Danger d’accident! Intervention rapide nécessaire

Maxime Lelièvre, CRHA* est coordonnateur, santé et sécurité dans une entreprise manufacturière. En se rendant au bureau d’un superviseur, il est témoin d’une situation dangereuse qui pourrait causer de graves lésions à l’opérateur d’une machine. Il en parle avec l’employé qui lui répond que ce n’est pas si risqué que ça. Arrivé au bureau du superviseur, Maxime lui fait part de la situation, de la réponse de l’opérateur et des raisons qui justifient une intervention rapide. Le superviseur lui dit qu’il va voir l’opérateur immédiatement. Le lendemain, Maxime retourne à la station de travail, constate que la situation perdure. Que devrait-il faire?
* Nom fictif
 

9 octobre 2012
Fanie Dubuc, Josée Saint-Laurent, CRHA et Louise Neveu, CRHA

L’ÉCLAIRAGE DÉONTOLOGIQUE - User de son pouvoir de persuasion


Par Me Fanie Dubuc, coordonnatrice, normes professionnelles, Ordre des conseillers en ressources humaines agréés

À titre de CRHA, Maxime se trouve dans une position délicate où il doit arrimer le respect de ses obligations déontologiques et l’exercice de son rôle-conseil auprès de son employeur.

En vertu de son code de déontologie, le membre doit exposer à son employeur, d’une façon complète et objective, la nature et la portée du problème qui, à son avis, ressort de l’ensemble des faits dont il a connaissance. Dans un premier temps, Maxime doit donc informer la direction de la non-conformité de la pratique en place et des conséquences possibles.

Le CRHA ou le CRIA a l’obligation déontologique d’établir une relation de confiance mutuelle avec son client, ce qui implique de respecter les valeurs et convictions de ce dernier dans l’exécution du mandat. Par contre, être à l’écoute des besoins de son client ne signifie pas que le membre doit accepter de poser des gestes professionnels contraires à l’éthique de sa profession. Maxime peut donc évaluer avec la direction les objectifs de l’entreprise en lien avec la santé et la sécurité et proposer des pistes d’action concrètes qui respecteront l’obligation légale de l’employeur de prévenir les accidents du travail.

Par ailleurs, le membre doit sauvegarder en tout temps son indépendance professionnelle, notamment en ignorant toute intervention d’un tiers dans l’exécution de ses obligations professionnelles au préjudice d’un client. Maxime doit garder comme ligne de conduite que les situations contrevenant aux règles de sécurité doivent être déclarées et rectifiées, même si certains collègues ne partagent pas son analyse.

Dans l’exercice de ses fonctions, le membre est tenu de prendre en compte les mesures de sécurité nécessaires et la protection physique des personnes présentes dans l’entreprise et qu’il a sous sa responsabilité. L’intervention de Maxime ne peut se limiter à cette étape : il fera aussi des recommandations à son employeur et le conseillera sur la manière de rectifier une situation potentiellement très dangereuse pour la santé d’un employé.

Ainsi, Maxime ne peut demeurer passif, sachant que son employeur ne respecte pas ses obligations légales en matière de sécurité du travail. Il doit mettre en œuvre son jugement et user de persuasion pour influencer les responsables de la gestion des opérations.

En conclusion, Maxime, tout en respectant les besoins et la réalité de l’entreprise, doit exercer son rôle-conseil auprès de son employeur pour le convaincre de modifier et sécuriser rapidement l’environnement de travail. Guidé par les balises de son code de déontologie, il interviendra pour amener l’entreprise à adopter une pratique conforme aux règles de l’art en matière de santé et sécurité.

À retenir
  • Le membre doit tenir compte de la sécurité nécessaire dans son milieu de travail ainsi que de la protection de la santé mentale et physique des personnes sous son autorité ou sa responsabilité (art. 6, paragr. 2 et 3 du Code de déontologie).
  • Le membre doit respecter les valeurs de son client, mais sans accepter de poser des gestes contraires à l’éthique (art. 33 du Code).
  • Le membre doit informer son client de la non-conformité de la pratique et des conséquences néfastes pour l’organisation (art. 39 du Code).

Pour aller plus loin... Des lectures en lien avec cette chronique, les extraits pertinents du Code de déontologie et divers compléments d’information se trouvent dans le portail de l’Ordre [www.portailrh.org/dpo].

 

L’ÉCLAIRAGE DU PROFESSIONNEL - Une obligation de prévention
Par Josée Saint-Laurent, CRHA, directrice santé et sécurité, et Louise Neveu, CRHA, conseillère SST, IMAC inc.

Maxime doit faire quelque chose, mais quoi? La sécurité de l’employé est menacée et la situation présente un risque élevé.

Son intervention a bien commencé en parlant directement à l’employé et à son superviseur, mais la situation n’est toujours pas corrigée. Maxime, en tant que coordonnateur, santé et sécurité, a la responsabilité de s’assurer que le milieu de travail est sain et sécuritaire. Il doit exercer son rôle-conseil pour influencer les intervenants dans l’entreprise qui pourront appliquer les solutions. De plus, il doit tenir compte des mesures d’hygiène et de la sécurité nécessaire dans son environnement et faire preuve de diligence raisonnable en regard des dangers et des risques présents dans son milieu de travail.

Maxime aurait dû continuer son intervention le jour même, puisque la situation était critique même à très court terme. Devant la situation qui perdure, il doit revoir le superviseur et lui demander d’agir; il peut aussi lui offrir son aide pour trouver une solution acceptable pour tous, mais sécuritaire. Les interventions auprès de l’employé et du superviseur n’ayant pas porté fruit, il devient impérieux d’impliquer rapidement d’autres intervenants pouvant apporter leur soutien et user de leur influence pour la résolution de cette situation. Maxime doit aussi rencontrer rapidement le supérieur du superviseur pour lui faire part du problème, des démarches entreprises, de ses recommandations et de possibles accusations au criminel. Il doit aussi informer rapidement son supérieur immédiat afin que la direction soit au fait des situations pouvant compromettre la sécurité. Cette rencontre avec son supérieur devrait faire l’objet d’une communication écrite afin de l’officialiser; un courriel à son supérieur pourrait être suffisant. Si la situation présente un risque majeur et imminent, et que rien n’est fait à l’interne, aviser la CSST est le dernier recours de Maxime.

La prévention est une question de collaboration multidisciplinaire et d’implication de tous les niveaux hiérarchiques de l’organisation. Le coordonnateur en santé et sécurité doit acquérir des habiletés relationnelles et d’influence de façon à pouvoir actionner les leviers nécessaires pour convaincre les différents intervenants de s’impliquer avec lui dans la gestion des risques en milieu de travail.

Source : Effectif, volume 15, numéro 4, septembre/octobre 2012.


Fanie Dubuc, Josée Saint-Laurent, CRHA et Louise Neveu, CRHA