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Transformation organisationnelle : des principes qui ont fait leurs preuves

Le monde change, les entreprises aussi. Et pour être toujours plus compétitives, ces dernières n’ont pas d’autre choix que de se transformer si elles veulent rester en adéquation avec leur clientèle. Pour opérer une transformation à la hauteur de nos ambitions, voici quelques idées recueillies lors du premier Rendez-vous Transformation, qui a eu lieu le 20 juin 2018 à Montréal.
18 février 2019
Anne-Claire Dalmond

Comme les entreprises, les RH doivent se réinventer. Mais comment? « Une transformation n’est pas un chemin facile à emprunter, témoigne Manon St-Pierre, CRHA, vice-présidente des ressources humaines à la Banque Nationale. Pour que le changement soit une réussite, il faut s’y préparer pendant longtemps. »

Identifier les besoins

Quelle est notre mission? Quelle est notre démarche? Quelle expérience veut-on faire vivre à l’équipe? Dans quel contexte et dans quelles conditions?

Tout comme les gens responsables de mener à bien la transformation, les RH doivent se poser ces mêmes questions. « Ils ont un regard sur notre clientèle externe, et nous, un regard sur notre clientèle interne, qui a besoin d’appui et d’accompagnement », souligne Youni Shabah, directrice des projets de transformation à la Société Radio-Canada.

Se fixer des objectifs

Amélioration du taux de rendement, enjeux économiques, innovation technologique… Quel que soit le projet, il est important de le définir en amont et d’identifier les objectifs et les enjeux. Une fois ceux-ci fixés, il faut se demander quel impact aura ce projet dans le contexte d’une transformation organisationnelle.

« Il est important d’avoir la capacité de penser en termes d’enjeux et d’occasions d’affaires, dit Youni Shabah. Il faut être capable de parler business, mais aussi de rapidement être en mesure d’imaginer les occasions d’affaires potentielles et de travailler dans cette direction. »

Une gouvernance qui crée de la valeur

Qu’on le nomme « bureau de transformation », « bureau de projet » ou encore « laboratoire d’innovation », il est nécessaire d’instaurer un organe de gouvernance pour piloter le projet.

Un projet de transformation exige souvent de faire appel à un savoir-faire externe et pluridisciplinaire. Cela implique donc de créer un cadre organisationnel précis et des processus collaboratifs efficaces pour permettre à tous les acteurs de cohabiter. « Il ne faut pas avoir une gouvernance étouffante, mais plutôt une gouvernance qui créé de la valeur tout au long du processus et de la démarche d’accompagnement, précise Youni Shabah. Oui, il y a de l’adaptation et de la divergence, mais il faut faire confiance au système. Il faut pouvoir intervenir et amener une pression au bon moment, quand on souhaite faire avancer les choses. Une attitude constructive et beaucoup d’empathie sont nécessaires. »

Avoir une approche systémique

Avoir une vision d’ensemble du projet permet d’être plus efficace. « Il faut être capable de voir à quel moment il sera nécessaire de faire intervenir d’autres personnes dans l’organisation pour s’assurer de couvrir tous les angles morts, conseille Youni Shabah. C’est essentiel dans la démarche. »

Gérer les attentes

Il est nécessaire de gérer les attentes de chacun et d’accepter une période de tension créative et de cogitation. « Les zones tampons entre les équipes responsables du projet et la direction sont très importantes dans un contexte d’innovation, souligne Youni Shabah. Il faut se demander ce qu’il est important de faire remonter vers la direction. »

Viser l’agilité

La méthode agile, influence aujourd’hui l’ensemble des domaines et tous les niveaux de l’entreprise, y compris les ressources humaines. « Au lieu d’agir en silos, on veut des équipes alignées et agiles, qui ont réellement le pouvoir d’agir, explique Manon St-Pierre, CRHA. C’est un système basé sur la confiance et sur la responsabilisation. On ne leur dit plus quels sont les moyens à prendre, on leur dit seulement quel objectif atteindre et pourquoi. »

Ce virage, toutefois, n’est pas simple à faire. « La clé est dans la rétroaction, dit Chantale Paul, directrice principale de la planification et gestion de portefeuille de projets à la Banque Nationale. On a une planification, mais on se réajuste en continu. Cela peut être un véritable accélérateur. »

Pour Youni Shabah, dans un contexte d’innovation, ce n’est pas tant la connaissance de la méthodologie agile qui est importante, mais plutôt la manière d’utiliser ces outils, de s’en inspirer et de rendre la démarche d’accompagnement tellement transparente que les gens ne la sentent même pas. « Les mots, ça fait peur et ça peut être complexe lorsqu’on débarque avec nos concepts, explique-t-elle. Être transparent, c’est un art. Cela demande un engagement important! »

Savoir mobiliser

Mobiliser les employés en les intégrant au processus de transformation peut être fructueux. « Grâce au design thinking, qui consiste à identifier les irritants que vivent les personnes et à essayer de cocréer avec elles une solution, on peut faire avancer les choses », explique Chantale Paul. Cela peut, par exemple, passer par la mise en place de communautés volontaires d’utilisateurs qui alimenteront le processus. Quels sont les avantages d’une telle approche? Cela permet, lors du déploiement, de “ répondre parfaitement aux besoins ”. Mais il faut « être créatif par rapport aux moyens de maintenir la communauté mobilisée », prévient-elle.

Maintenir la cohérence entre les pratiques et la culture d’entreprise

« La culture d’entreprise, ce n’est pas seulement une “ patente ” RH! » lance Manon St-Pierre. Cela est capital lors d’une transformation, car si la culture de l’entreprise ne correspond plus aux valeurs des employés, il n’y aura plus de cohésion. Et tout au long de la transformation, il est important de garder une certaine cohérence entre ce qui est dit et ce qui se passe sur le terrain. « Avec le changement, l’incohérence n’est plus viable : il faut gérer la dissonance entre ce que les employés vivent et ce que l’on souhaite, et aligner nos pratiques en fonction de ça », prévient Manon St-Pierre.

Préserver l’impulsion de départ

L’un des éléments importants pour un accompagnement réussi est la proximité stratégique avec le terrain. « Il faut tisser des liens de confiance avec les équipes qu’on accompagne, explique Youni Shabah. Il faut qu’elles sentent qu’on est là pour les faire avancer, même s’il y a des défis, même si c’est complexe. »

« Accompagner, c’est aussi protéger la bulle au départ, pour éviter que les gens se fassent avaler par la machine », poursuit-elle. Aménager des espaces de création et de collaboration et fournir des outils adaptés permet d’offrir un environnement plus propice à la transformation organisationnelle.


Anne-Claire Dalmond

Source : Revue RH, volume 22, numéro 1, janvier/février/mars 2019.