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Milieux de travail : comment gérer une situation d’urgence

Étapes clés pour une gestion de crise réussie.

11 décembre 2016
Yohann Aubé, CRIA

« Au Québec, tous les 6 jours, un travailleur a perdu la vie à la suite d’un accident du travail ». Voici un des thèmes de la plus récente campagne publicitaire de la CNESST. Bien que tous les efforts soient mis en œuvre pour éviter que vos employés fassent partie de cette statistique, votre entreprise est-elle outillée pour faire face à une situation d’urgence? Que faut-il faire dans l’éventualité d’un événement grave dans votre entreprise?

Une situation d’urgence, par sa nature, survient de façon imprévue et soudaine. Le processus de mesures d’urgence peut être mis en place dès que des personnes sont blessées ou que des équipements sont endommagés.

Ainsi, la Loi sur la santé et la sécurité du travail oblige l’employeur à aviser la CNESST dans les 24 heures suivant la survenance d’un accident à l’une des conséquences suivantes : décès d’un travailleur; un travailleur qui perd l’usage total ou partiel d’un membre, qui est amputé ou qui subit un traumatisme grave; plusieurs (2 et plus) travailleurs subissent des blessures qui les empêcheront d’accomplir leurs fonctions pendant un jour ouvrable ou plus ou si les dommages matériels de 150 000 $ et plus.

Le succès de la démarche des mesures d’urgence réside essentiellement dans la rapidité de l’intervention. Néanmoins, il ne faut pas improviser, d’où l’importance d’agir de manière structurée.

Quoi faire?

Dans un premier temps, il est recommandé d’identifier et de former les membres de votre personnel qui sont prêts à agir à titre de secouristes ou de premiers répondants. Les conditions exceptionnelles, par définition, ne sont pas courantes et le comportement des secouristes doit être exemplaire. Lorsque ces personnes sont identifiées, affichez l’information à la vue de la majorité des travailleurs. 

Objectifs d’un plan d’intervention d’urgence

  • Prévenir les accidents mortels et les blessures.
  • Réduire les dommages causés aux bâtiments, aux stocks et à l'équipement.
  • Protéger l'environnement et la communauté.
  • Accélérer la reprise des activités normales.

Source : Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail

Dès que votre équipe d’intervention sera sur pied, il est suggéré de lui confier le mandat, en partenariat avec votre service des ressources humaines, de mettre en place un plan de mesures d’urgence (PMU). 

En matière de prévention des accidents du travail, c’est le développement d’un programme de prévention qui servira à identifier et à déterminer les mesures préventives à appliquer afin de contrôler et d’éliminer à la source les risques d’accident du travail. Ainsi, si un événement survient, vos employés sauront exactement vers qui se tourner pour être guidés dans l’application des procédures qui ont été préalablement établies. Néanmoins, voici un résumé des actions qui sont recommandées d’appliquer dès la survenance d’un événement grave :

  1. Contacter les services d’urgence

    Appeler le 911 et prévenir les secouristes.

    Ne jamais laisser un travailleur transporter un collègue blessé.

    Même si le travailleur insiste et que la situation a l’air d’être stabilisée, des dommages importants pourraient être présents chez le travailleur (foie, poumons, reins, côtes, commotion cérébrale, etc.).

    Sauf si des changements sont nécessaires pour empêcher une aggravation des effets de l’événement, vous ne devez jamais modifier une scène d’accident avant l’intervention de la CNESST. Les lieux doivent demeurer inchangés pendant tout le temps que dure l’enquête de l’inspecteur.

  2. Contacter la CNESST : 1 866 302-2778

    En cas de suspension des travaux par l’inspecteur de la CNESST, vous ne devez jamais reprendre le travail sans son autorisation.

  3. Aviser un membre de la direction

    Un membre de la direction doit se rendre le plus rapidement possible sur les lieux de l’événement. Il est également nécessaire de prendre en note le nom de tous les travailleurs qui étaient sur place au moment de l’événement. Aussi, si la situation le permet, prendre des photos.

  4. Communiquer avec la personne à contacter en cas d’urgence

    Considérant la gravité de la situation, la CNESST vous invite à communiquer avec la personne à contacter en cas d’urgence, que le travailleur a identifiée au moment de son embauche. Tentez d’établir le contact à intervalles réguliers et évitez de laisser des messages.

    Lorsque le contact est joint, décrivez brièvement la situation afin d’éviter de fausses images sur les circonstances et la gravité de l’accident. Assurez-vous de fournir les coordonnées de l’établissement de santé où le travailleur a été conduit. Un membre de la direction peut également se rendre à l’établissement de santé où a été conduit le travailleur. Cette personne doit toutefois être préparée à faire face à toutes les éventualités si elle rencontre la famille : colère, rancune, refus de parler, etc.

  5. Gérer la médiatisation de l’événement

    En cas d’événement spectaculaire, établir rapidement une rencontre avec les membres de la direction afin de déterminer qui sera le porte-parole de la compagnie auprès des médias. Vous pouvez prendre le temps de vous réunir pour écrire un bref communiqué contenant l’information qui pourrait être transmise aux médias. Essayez de recommander à vos travailleurs de ne pas parler aux médias tant que l’enquête n’est pas conclue. Il n’y a d’ailleurs aucune obligation de discuter avec les médias.

  6. Effectuer le suivi avec vos travailleurs

    Vérifiez auprès de vos travailleurs le besoin d’assistance médical/psychologique afin de limiter les effets du syndrome de choc post-traumatique. Vous pouvez intervenir rapidement en communiquant avec votre programme d’aide aux employés. Avisez vos travailleurs qu’ils doivent consulter un médecin s’ils se croient dans l’incapacité de poursuivre le travail au-delà de la journée de l’accident, et ce, afin qu’ils puissent justifier leur absence. Tous les documents devront être transmis à l’employeur dans les meilleurs délais afin de démarrer le processus de gestion de crise.

  7. Informer tous les membres de votre équipe

    Il est recommandé d’informer toutes les personnes en autorité de votre entreprise le plus rapidement possible à propos de l’événement qui vient de se produire. Elles pourront à leur tour informer leurs travailleurs lorsqu’elles jugeront le moment opportun.  Considérant la nature et la gravité de l’événement, prévoir, dans les meilleurs délais, une rencontre avec tous les travailleurs de votre entreprise pour exposer brièvement les prochaines étapes de la prise en charge du dossier (CNESST, police, etc.). Sans entrer dans les détails de l’événement, cette rencontre aura également pour effet de dissiper les rumeurs.

  8. Debriefing de direction

    Après ces quelques journées bien remplies, il s’avère important de faire le suivi avec les membres de la direction pour vérifier leur besoin d’assistance. Il ne faut pas sous-estimer la prise en charge d’un tel dossier, car il peut être très émotif et certains symptômes pourraient apparaître plusieurs jours plus tard.

    Bien que non souhaitable, aucune organisation n’est à l’abri d’une situation d’urgence. C’est pourquoi il est essentiel que l’ensemble des employés et des membres de la direction soient informé de la procédure à suivre. Cela pourrait faire toute la différence!

Un accident de travail n’est pas la seule raison pouvant mener à une situation d’urgence en matière de santé et de sécurité. Voici quelques éléments à considérer.

Risques technologiques

  • Incendie
  • Explosion
  • Effondrement de bâtiment
  • Défaillance structurelle majeure
  • Déversement de liquides inflammables
  • Libération accidentelle de substances toxiques
  • Libération intentionnelle d’agents biologiques dangereux ou de produits chimiques toxiques
  • Autres activités terroristes
  • Exposition à des rayonnements ionisants
  • Panne d’électricité
  • Coupure de l’alimentation en eau
  • Pannes du réseau de télécommunication

Risques naturels

  • Inondation
  • Tremblements de terre
  • Tornades
  • Autres tempête de vent
  • Tempêtes de neige ou de verglas
  • Périodes de froid ou de chaleur intense
  • Pandémies, comme la grippe

Références bibliographiques


Yohann Aubé, CRIA Chef de service santé sécurité environnement AIRBUS

Diplômé de l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, Yohann Aubé, CRIA est directeur des services professionnels chez GESTESS. Possédant plus de quatorze ans d’expérience en santé et sécurité du travail, il a la responsabilité des services de prévention, de formation, de gestion des réclamations ainsi que des services juridiques. Chaque année, plus de 2500 interventions en chantier et en entreprise sont effectuées par les membres de son équipe.


Source : Revue RH, volume 19, numéro 4, septembre/octobre 2016