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Pour contrer l’intimidation et la violence en milieu de travail

Traduit par Danièle Veillette, traductrice agréée. Reproduit avec l'autorisation de la Society for Human Resource Management (SHRM)

12 décembre 2011
Beth Mirza

Un adulte américain sur deux dit avoir subi, ou observé, de l’intimidation en milieu de travail, selon un sondage mené en 2010 par Zogby. Lors d’un séminaire organisé par le cabinet d’avocats Epstein Becker Green de Washington, des conférenciers ont donné aux professionnels de la gestion des ressources humaines des conseils sur la façon de mettre efficacement un terme à l’intimidation et à la violence en milieu de travail. Regards sur la réalité américaine.

Selon l’avocate Kara Maciel, l’intimidation consiste à maltraiter et à blesser une personne délibérément et à répétition, d’une façon qui l’empêche de faire son travail. L’employé qui intimide tente souvent de contrôler ou de manipuler la personne. L’intimidation peut prendre diverses formes :

  • calomnie
  • injure
  • cri
  • commentaires sur l’apparence ou le mode de vie
  • moqueries
  • menaces ou harcèlement
  • critique injuste
  • exclusion
  • agressivité
  • agression
  • attribution de tâches déraisonnables
  • attribution de tâches serviles
  • commérages

L’intimidation peut être le fait d’un employé, d’un fournisseur ou d’un client et se produire pendant ou après le travail, expliquait Heidi Hayden, SPHR, directrice principale des ressources humaines du cabinet. Elle peut se produire en vis-à-vis ou par courriel, par cellulaire, lors de séances de clavardage et par l’entremise de sites web.

Ce comportement ne consiste généralement pas dans le harcèlement d’un groupe ou d’une personne protégés, parce qu’il n’est pas axé sur la race ou le genre, notait Kara Maciel, de sorte que c’est un comportement légal en théorie. Il est néanmoins perturbateur et inapproprié et devrait être interdit.

Les dirigeants et les superviseurs ne doivent cependant pas craindre de faire part aux employés de leurs critiques et commentaires sur leur rendement. Selon Kara Maciel, les responsables des ressources humaines et les gestionnaires peuvent en toute légitimité exercer un contrôle sur le travail des autres. L’encadrement, la consultation, la discipline, les évaluations, les normes et les objectifs, respectueux et conformes aux politiques et procédures, sont acceptables.

L’intimidation coûte cher aux employeurs. En 2008, la Cour suprême de l’Indiana a imposé une amende de 325 000 $ à un chirurgien qui avait engueulé une infirmière pendant une opération. Le tribunal a accueilli la demande de l’infirmière qui invoquait l’infliction intentionnelle d’une détresse psychologique.

Les coûts devraient continuer à augmenter avec l’adoption du projet de loi sur un milieu de travail sain, envisagée par dix-sept États américains. « La loi rendrait illégale l’exposition d’un employé à un contexte de travail malsain, expliquait Kara Maciel. Les superviseurs, et non pas seulement l’employeur, pourraient être tenus responsables de leurs actions, et les causes seraient directement entendues par les tribunaux. Aucun organisme d’État ne se pencherait sur le cas avant que les parties ne comparaissent devant un juge. »

Responsabilité de l’employeur
Selon Thomas Cox Jr., avocat du cabinet, les employeurs pourraient être tenus responsables en vertu d’une disposition de la loi sur la santé et la sécurité du travail concernant l’obligation de procurer un environnement de travail sécuritaire. Ils pourraient être tenus responsables de recrutement négligent, s’ils ont engagé une personne dont ils savaient, ou auraient dû savoir, qu’elle était susceptible de causer des problèmes, ou de recommandation négligente s’ils n’informent pas d’autres employeurs des antécédents de violence d’un ancien employé.

Il a ajouté qu’un employeur qui garde un employé menaçant ou au comportement violent pourrait être coupable de supervision et de rétention négligentes. Il importe donc plus que jamais de consigner en dossier toutes les mesures prises en matière de discipline pour tous les employés.

Selon Thomas Cox, les employés pourraient avoir gain de cause contre leur employeur en vertu de lois contre la discrimination. Dans un cas précis, les collègues d’un employé ne cessaient de lui répéter qu’il n’était pas « viril ». Certains tribunaux fédéraux ont déjà jugé que le fait de véhiculer des stéréotypes sexuels crée un milieu de travail hostile.

Comment éviter d’engager un employé brutal ou violent
Heidi Hayden croit qu’il faut bien examiner les antécédents pour ne pas recruter une personne violente. Les employeurs doivent avoir une politique pour l’examen des antécédents et la politique doit « être suivie et appliquée avec constance ».

Pendant le processus de recrutement, on doit :

  • vérifier toutes les déclarations figurant sur la demande d’emploi et le curriculum vitæ et celles qui sont faites lors des entrevues; demander des précisions sur ce qui s’est passé dans la période entre deux emplois;
  • vérifier auprès d’anciens employeurs les dates d’emploi et les postes occupés ainsi que les recommandations;
  • poser à l’employeur précédent des questions précises au sujet de menaces ou d’actes de violence;
  • effectuer des vérifications conformes aux autorisations légales, y compris la loi sur un dossier de crédit juste et les lois des États sur les rapports d’arrestation;
  • ne pas se fier uniquement à l’internet pour les contrôles et vérifications, car on ne peut être certain que l’information est exacte;
  • consigner en dossier toutes les questions posées et les réponses reçues, le nom de la personne à laquelle on a parlé et les sources consultées;
  • indiquer aux candidats que toute fausse information signifierait leur renvoi;
  • si le candidat est engagé, conserver toute la documentation rassemblée, pendant toute la durée de l’emploi.
Examiner l’environnement
Heidi Hayden recommandait que les responsables des ressources humaines examinent minutieusement leur environnement. Se préoccupe-t-on des comportements inappropriés? Le taux de roulement est-il plus élevé dans un service donné? Les politiques sont-elles respectées?

Les sondages auprès des employés peuvent mettre au jour certains problèmes, mais il importe surtout que les responsables des ressources humaines agissent si c’est le cas.

Il faut enquêter et régler un problème immédiatement pour éviter qu’il ne se reproduise. Les enquêtes doivent porter sur les faits et non sur les opinions et elles devraient être minutieuses, froides et objectives. On doit comparer les déclarations des témoins et les preuves, comme les principales cartes-fiches et les données de l’horloge enregistreuse, et noter en dossier tout ce qu’on fait.

On doit déterminer les mesures à prendre en tenant compte des questions suivantes :

  • Quels sont les faits?
  • Quelle est la gravité de l’infraction?
  • L’employé connaissait-il les attentes?
  • Comment l’employé était-il au courant?
  • L’employé a-t-il été provoqué?
  • A-t-on mené une enquête approfondie?
  • A-t-on parlé du problème à l’employé?
  • Les politiques ont-elles été appliquées avec constance? (Le service des ressources humaines devrait prendre part à toutes les enquêtes pour s’en assurer.)
  • La réaction envisagée est-elle appropriée compte tenu de l’incident et de la position de l’employé dans l’entreprise?

Enfin, il faut informer l’employé concerné des mesures prises au sujet du problème pour qu’il sache que sa plainte a été prise au sérieux.

La formation permet de contrer l’intimidation et la violence. Elle devrait être obligatoire dans l’ensemble de l’organisation et aborder la politique de l’entreprise sur le signalement des incidents et la façon de reconnaître les signes d’intimidation et de violence et d’y réagir efficacement, de résoudre les conflits et les situations de crise et d’urgence (par exemple avec un plan d’intervention en cas de crise) et d’utiliser les programmes d’aide aux employés. Il faut enfin s’assurer que la formation sur la prévention de l’intimidation et de la violence correspond à la formation sur la prévention du harcèlement.

Enfin, Heidi Hayden recommande que toutes les activités relatives aux ressources humaines soient axées sur la prévention de l’intimidation et de la violence. Les processus de recrutement comprennent-ils une vérification des antécédents? Les activités d’orientation et de formation abordent-elles la prévention de la violence? La rémunération et les avantages sociaux incitent-ils par inadvertance les employés à se livrer à une concurrence trop vive? Les évaluations abordent-elles le comportement que les employés adoptent les uns envers les autres?

La mise en garde de Heidi Hayden : il faut veiller à ne pas récompenser par mégarde un comportement indésirable.

Adopter des politiques
Thomas Cox et Kara Maciel conseillent vivement aux professionnels de la gestion des ressources humaines de réviser leurs politiques sur l’intimidation, la violence et le comportement en milieu de travail pour qu’elles respectent les lois et les changements apportés dans l’organisation. Ils devraient ensuite soumettre ces politiques à un conseiller juridique pour s’assurer qu’elles sont conformes à la réglementation de l’État et à la réglementation fédérale.

Il faut établir des politiques écrites sur les questions suivantes :

  • vérification des antécédents;
  • vérification des recommandations;
  • comportement approprié (notamment tolérance zéro à l’égard de comportements inacceptables, interdiction d’apporter des armes en milieu de travail et définition des comportements inacceptables);
  • signalement des incidents;
  • plaintes;
  • mesures disciplinaires;
  • résolution de conflits;
  • formation.

« Si vous n’avez pas de plan pour contrer la violence en milieu de travail, c’est déjà presque de la négligence, affirme Kara Maciel. Il vous faut un plan qui fasse intervenir le service des ressources humaines ainsi que les services juridiques, de la sécurité et de la TI. Ce plan peut changer la donne. »

Beth Mirza, rédactrice principale, HR News.

Source : Effectif, volume 14, numéro 5, novembre/décembre 2011.


Beth Mirza