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L’implication professionnelle : nécessaire et gratifiante!

S’impliquer dans sa communauté professionnelle, voilà qui est gratifiant! Effectif s’est entretenu avec des professionnels en ressources humaines engagés afin de découvrir non seulement ce qui les pousse à partager leur temps, leur expérience et leurs connaissances avec leurs pairs ou avec la relève, mais aussi ce qu’ils en retirent.

2 octobre 2013
Etienne Plamondon Emond

Donner au suivant
Geneviève Bich, CRHA, vice-présidente, ressources humaines chez Metro, déclare : « J’ai eu beaucoup de chance lors de moments clés dans ma vie, où justement quelqu’un m’a ouvert une porte. Il y a des gens qui m’ont aidée, qui m’ont présentée à d’autres, qui m’ont mise en relation avec leur réseau à un moment où j’en avais besoin. Je ne pouvais pas toujours rendre à ces personnes ce qu’elles avaient fait pour moi. Alors, j’ai toujours pensé que ce qui était important, c’était de donner au suivant. C’est un peu éculé comme expression, mais c’est tout de même valable. » Elle se fait un point d’honneur de discuter avec toute personne qui lui demande des conseils. Elle assure le faire au moins une fois par semaine. « Ma manière préférée de donner dans la communauté professionnelle, c’est de faire du réseautage et du mentorat informel avec des gens en ressources humaines, explique-t-elle. C’est sûr que je vais échanger avec n’importe quel membre de l’Ordre. »

Gagnant-gagnant
Geneviève Bich constate que cette attitude lui a permis de s’enrichir. « Avec le temps, je me suis rendu compte que j’étais en contact avec des gens intéressants et intelligents », dit-elle. Ses rencontres sont ainsi, à ses yeux, une « source d’innovation », en plus d’être une façon d’étendre son propre réseau. « Ça crée un contact professionnel additionnel et on ne sait jamais quand on va vouloir utiliser son réseau. »

Pour Geneviève Guité, CRHA, vice-présidente, ressources humaines chez Behaviour, donner de son temps à la communauté professionnelle, c’est gagnant-gagnant. Ainsi, quand elle présente des conférences sur la gestion du talent, au sein de PME notamment, elle donne des trucs très utiles à ses pairs, mais c’est aussi pour elle une manière de parfaire ses talents de communicatrice. Les habiletés ainsi développées lui servent ensuite à mieux articuler ses messages quand vient le temps d’exposer un projet aux employés ou à la direction de son entreprise. Elle affirme cependant qu’il faut décider comment on souhaite s’impliquer dans sa communauté professionnelle. « Il faut choisir les opportunités qui correspondent à ce qu’on veut faire, à ce qu’on veut apprendre et aux compétences qu’on veut acquérir, dit-elle. Moi, je veux être sur le terrain. Je pense qu’il est important de bien cibler les activités dans lesquelles on veut s’investir et de se faire un petit “plan de carrière” à cet égard. Parce que l’objectif, c’est d’apprendre des choses et de devenir meilleur comme professionnel. »

Paule Létourneau, CRHA, vice-présidente, ressources humaines chez Pfizer, croit, elle aussi, que l’implication dans la communauté professionnelle ne répond pas seulement à « un sentiment altruiste. C’est aussi un peu égoïste, dans la mesure où c’est important de rester connecté avec les professionnels de son métier. On apprend beaucoup en échangeant avec les gens, en comprenant un peu mieux comment les choses se font ailleurs ».

Rester à jour
D’une certaine façon, l’engagement constitue un moyen efficace de rester à niveau. Claude Bourdon, CRHA donne des formations à des professionnels en ressources humaines qui veulent devenir consultants. Lorsqu’on lui demande quelle est la meilleure façon de se mettre à jour, il répond que c’est d’enseigner. En prévision du séminaire qu’il donnera cet automne, il a décidé de réviser de A à Z le contenu de sa formation. « Pas parce que ce n’était pas bon, mais parce que je sais que je peux faire mieux, explique-t-il. Je suis en fin de carrière et je n’ai rien à gagner là-dedans. Je ne le fais pas pour la gloire ni pour l’argent. C’est un peu un défi permanent pour me renouveler. »

Ancien enseignant, il voit dans cette approche une bonne méthode pour rester à l’affût des dernières tendances, malgré l’évolution rapide de la profession. « C’est presque une question déontologique, mais un professionnel est toujours censé être à la fine pointe des connaissances dans son domaine, rappelle l’homme de 62 ans. Si l’on veut donner un bon cours, il faut travailler, apprendre, être au courant de ce qui se fait, des dernières publications, de ce qui s’écrit sur Internet. Je pense que les professionnels ont chacun leur moyen de se tenir à jour. Il y en a pour qui cela passe par des cours de formation. D’autres, comme moi, préfèrent donner de la formation continue. J’ai été chanceux dans ma vie et j’ai eu la chance de toucher à bien des choses. C’est peut-être le moment de retourner ça avant de finir ma carrière. »

Faire avancer la profession
Pour Paule Létourneau, s’impliquer est une manière de faire avancer les choses dans une profession qui la passionne. Elle a dernièrement travaillé sur la communication stratégique de l’Ordre, en plus d’avoir déjà siégé à son conseil d’administration. « Je crois qu’il y a encore beaucoup de travail à faire pour faire connaître la profession auprès des jeunes et auprès de la communauté des gens d’affaires. Il reste aussi du travail à faire pour différencier la profession », estime-t-elle.

C’est aussi ce qui motive Dyane Richer, CRIA, chef, ressources humaines à la Ville de Montréal, à s’impliquer dans la communauté RH. Elle fait beaucoup de coaching auprès de jeunes professionnels et enseigne à l’Université de Montréal. Dans ses cours, elle parle beaucoup de l’intégration dans la profession. « À partir du moment où j’ai compris les choses à travers le monde des relations industrielles, ce fut très important pour moi d’en faire la promotion. Un des moyens que j’utilise, c’est l’enseignement à l’université et ma disponibilité tout au long de ma carrière auprès de gens qui en avaient besoin. Encore aujourd’hui, tous les membres de mon réseau savent très bien qu’ils peuvent communiquer avec moi, quand bon leur semble, si je peux les aider à trouver des solutions à leur problème. »

Le déclic s’est produit lorsqu’une jeune professionnelle lui a demandé, alors qu’elle était au début de la quarantaine, de devenir son mentor. « J’ai réalisé que c’était une belle façon de partager ce que j’avais acquis dans la profession avec le temps », raconte madame Richer. Elle insiste pour dire qu’elle agit de cette façon naturellement et qu’elle y trouve du plaisir. « Je me suis rendu compte que c’était important de partager cette profonde conviction que j’avais et cette passion que j’ai pour ma profession avec les gens qui me suivaient ou qui étaient dans mon entourage, selon les étapes de ma carrière. »

Le tournoi 360
Depuis plus de vingt-cinq ans, l’Ordre organise un tournoi inter­universitaire (nouvelle formule en 2013) où s’affronte la crème de la relève de la profession. En 2013, le tournoi 360 a attiré une centaine d’étudiants de onze universités, expérience qui n’aurait pas pu exister sans le soutien de quatorze membres (six à la rédaction des trois épreuves, six comme jurés, deux dans le comité organisateur) qui y ont consacré chacun une bonne dizaine d’heures.

Aux yeux de Paule Létourneau, qui a été membre du jury cette année, le tournoi 360 contribue à ce que toutes les personnes reliées à la profession avancent dans un même élan. « Ça prend un forum pour rallier tout le monde et avoir un terrain de jeu où l’on est capable d’échanger et de se comparer. C’est essentiel, si l’on veut faire évoluer la profession et que toutes les parties prenantes, soit les étudiants, les écoles et les professionnels, puissent échanger afin qu’il n’y ait pas de clivage entre ce que les écoles enseignent et le marché du travail », estime-t-elle. La formule semble répondre à un besoin, non seulement chez les étudiants, mais aussi chez les professionnels, puisque Geneviève Guité, elle-même présidente du comité organisateur et du jury du cas final, assure que tous les jurés du tournoi de cette année ont adoré leur expérience.

Geneviève Bich a aussi été jurée au tournoi. Elle indique que les jeunes lui ont apporté « des idées nouvelles ou des questions » relatives à des aspects de la profession sur lesquels son opinion était « faite et ferme ». « Si quelqu’un ne m’avait pas forcée à me questionner, je ne l’aurais pas fait. » Elle y a vu une confrontation salutaire, même dans le cas où les solutions proposées par les étudiants ne lui convenaient pas. Elle a alors été forcée de justifier ses façons de faire plutôt que de les tenir pour acquises.

Pour sa part, Geneviève Guité admet que le tournoi 360 demande beaucoup d’énergie de la part des professionnels qui participent à son organisation. Mais elle insiste pour dire que, dans son cas, le jeu en vaut la chandelle. « C’est certain qu’on donne à la communauté quand on s’investit dans un projet comme celui-là. Mais j’en retire toujours plus que j’en donne. C’est pour ça que j’adore ça. » Elle voit notamment dans le rôle qu’elle assume une occasion de développer et d’améliorer son leadership. De plus, grâce au tournoi 360, elle est en contact avec les jeunes, ce qui est pertinent puisqu’elle travaille dans un milieu où plusieurs employés sont au début de la trentaine.

Conclusion
La communauté RH, comme tout autre groupe professionnel, a besoin de personnes d’envergure qui vont au-delà de ce qui est attendu d’elles, qui contribuent au rayonnement public et interne de leur profession, en inspirant les jeunes, en partageant avec leurs pairs, en encourageant le transfert d’expertise, le développement continu.

Chaque année, l’Ordre a la chance de compter sur la générosité de centaines de membres, qui contribuent à divers degrés à l’évolution de la profession, à la transmission intergénérationnelle des connaissances et à l’avancement des dossiers de l’Ordre. Ils sont bénévoles au congrès, membres d’un comité statutaire ou ad hoc, administrateurs, conférenciers, auteurs, scrutateurs à l’élection du conseil d’administration, etc.

Mais l’implication ne se limite pas à l’Ordre. Chacun peut trouver la façon qui lui convient de s’engager dans sa communauté professionnelle. Ainsi, de nombreux membres donnent du temps dans leur région, dans leur entreprise ou auprès de leurs pairs. Ils font ainsi avancer les choses et en retirent souvent autant qu’ils investissent. Bref, les possibilités d’implication – et donc d’enrichissement – sont infinies.

Etienne Plamondon-Emond, journaliste indépendant

Source : Effectif, volume 16, numéro 4, septembre/octobre 2013.


Etienne Plamondon Emond