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Jouer ensemble : activités sociales entre collègues

Et si l’esprit d’équipe se développait plus facilement en dehors des heures ou des lieux de travail? En effet, en temps de crise ou en période de stress, partager des activités ludiques permet de créer une bonne ambiance entre collègues; c’est même une façon de faire qui gagne du terrain sur les épreuves de consolidation d’équipe.

5 mai 2010
Myriam Jezequel

Un verre après le travail, des jeux au bureau, une sortie en fin de semaine, la convivialité devient une activité sociale à part entière en milieu de travail. Voilà de quoi détendre l’atmosphère, renforcer les liens et voir ses collègues sous un nouveau jour. Les activités sociales et ludiques ont de nombreux avantages… pourvu qu’elles se passent sans accroc.  

Fous rires et défoulement
Rire aux éclats après une intense journée de travail : c’est bon pour le moral, c’est bon pour la santé et c’est bon pour l’ambiance au travail. Alors pourquoi s’en priver? De plus en plus d’entreprises ont compris que, pour relâcher la pression au travail, le rire et l’humour sont des atouts majeurs. En plus d’aider à combattre le stress, rire au bureau renforce les liens et stimule la créativité.

Par ailleurs, de nouveaux jeux sont apparus. Les « jeux guerriers » ont gagné plusieurs entreprises aux États-Unis et au Japon, notamment les agences de publicité et les sociétés de communication, surtout les hommes. Ainsi, après les heures de travail, des employés décompressent en se poursuivant en hélico, en s’envoyant des projectiles avec des lance-missile. Les activités de défoulement ne se concentrent plus dans une salle de sport. Des entreprises s’équipent d’une salle avec billard et jeux de société, accessible le midi pour relâcher la pression. D’autres recourent aux services d’une personne de l’extérieur pour réaliser une activité collective avec les employés. Le choix est vaste : réaliser une peinture murale, chanter en chœur, faire un stage de cuisine santé, jouer des jeux de rôles… autant de façons de réunir les employés autour du jeu et de l’émotion.

Convivialité recherchée
Pour combattre les comportements de repli ou les relations tendues au travail, rien de tel qu’une activité commune et conviviale. Les idées varient selon les préférences de chacun. Un verre après le travail pour bavarder avant de rentrer chez soi. Un déjeuner d’équipe dans un endroit agréable pour changer d’air. Une sortie familiale avec les collègues dans un site enchanteur. Une activité sportive suscitant une saine émulation. Une activité culturelle pour se ressourcer. Une journée ou une soirée à thème pour dynamiser l’équipe et sortir du quotidien. Il n’y a pas de recettes uniques. Mais l’interdiction de parler travail et l’esprit de convivialité comptent dans le résultat recherché. Les tensions entre collègues se dénouent. Les difficultés au bureau sont relativisées. Les échanges interpersonnels se font plus facilement et deviennent plus harmonieux. Un exemple d’antidote au stress? Réserver une salle de réunion et rassembler tous les employés intéressés à voir la finale de la coupe Stanley ou une épreuve des Jeux olympiques. Soutenir ensemble une même équipe contribue à créer une synergie entre collègues. Autre avantage : la productivité n’en devient que meilleure.

Toutes les occasions sont-elles bonnes?
Célébrer le démarrage d’une mission, la fin d’une mission, l’arrivée ou le départ à la retraite d’un collègue… Toutes les occasions sont-elles bonnes? Fêter régulièrement certains événements peut renforcer les liens ou en créer de nouveaux. Ces événements rassembleurs peuvent même contribuer à décloisonner les divers services de l’entreprise, permettant ainsi aux employés de mieux connaître leurs collègues plus éloignés. Mais ces activités collectives ne sont pas sans répercussions si elles mènent à certains écarts de conduite. Multiplier les fêtes et les tête-à-tête peut conduire à certains débordements. Il est bon de rire ensemble sans toujours renchérir ou en rajouter. Ainsi, rire avec un collègue est très différent de rire d’un collègue. Les activités sociales en dehors du bureau ont aussi leurs limites.

Amis ou collègues?
Amis en dehors du bureau, collègues au travail? Certains disent que cette équation favorise une plus grande confiance mutuelle et suscite une meilleure productivité. Personne ne souhaiterait décevoir un ami ou lui mettre des bâtons dans les roues. L’amitié établie à l’extérieur du bureau peut avoir des effets positifs sur les relations de travail. L’entraide est plus naturelle. L’esprit de collaboration est facilité. Le travail est davantage associé au plaisir de faire ensemble. Mais les commentaires et les critiques peuvent aussi être plus difficiles à accepter s’ils viennent d’un ami. Le collègue-ami peut être tenté de profiter des relations amicales pour obtenir plus de laisser-faire. D’où l’importance de bien délimiter les deux sphères : amitié ou relation professionnelle.

L’envers de la médaille
Certaines entreprises organisent des voyages de récompense et des voyages d’aventure pour remercier une équipe de ses bons résultats et partager ensemble des émotions. Certains travailleurs décident eux-mêmes de partir en vacances ensemble pour profiter de voyages de groupe attractifs. Mais ces séjours entre collègues ne sont pas sans risque. Les affinités entre les gens ne sont pas nécessairement les mêmes au bureau et dans la vie personnelle. Des collègues qui s’entendent bien au travail pourraient ne pas supporter les manies de l’autre dans un contexte différent. Partager le même bureau ou le même hôtel ne se compare pas. Ainsi, une personne ordonnée s’accommode plus facilement du désordre d’un bureau que des perpétuels changements de programme de son collègue pendant leurs vacances. Il arrive qu’une différence de valeurs personnelles génère plus de conflits qu’une divergence de vues professionnelle. Au retour des vacances, il faut encore savoir gérer les relations sans mélanger les souvenirs communs et les objectifs collectifs de travail.

Quelques règles d’or
Pour partager des activités sociales sans accroc et en tirer profit sans déchanter, certaines règles sont à respecter. Les activités sociales devraient être volontaires. Personne ne devrait être forcé à « jouer le jeu », si cela ne le tente pas. Après tout, l’objectif est d’avoir du plaisir ensemble. Pour éviter d’exacerber les tensions personnelles, il est préférable d’éviter les sujets litigieux au travail, les sujets émotifs ou de parler des collègues en leur absence.

Avant de partir ensemble ou de partager une activité en dehors du travail, il est préférable de se connaître suffisamment. Quelques déjeuners de travail peuvent permettre de briser la glace. Le fait de prendre un verre ou de passer une fin de semaine ensemble ne devrait pas mener jusqu’à toutes sortes de confidences que l’on pourrait regretter. La familiarité n’empêche pas une certaine retenue. Les activités sociales demandent du doigté, encore plus lorsque les relations au travail comportent une dimension hiérarchique. Il est plus facile de contredire un collègue qu’un supérieur hiérarchique. La désinvolture est donc à bannir.

Les activités sociales sont censées rassembler les personnes et faciliter les échanges. Ce serait une erreur de se tenir en petits groupes qui s’isolent des autres. C’est l’occasion ou jamais d’intégrer les nouveaux venus.

Et même si les activités sociales renforcent généralement les liens entre collègues, il faudrait pouvoir conserver une certaine distance. Par exemple, il est préférable de ne pas se servir des liens affectifs nouvellement créés pour tenter d’obtenir un avantage au travail. L’amitié au travail va rarement de pair avec la compétition dans l’entreprise.

Myriam Jézéquel, journaliste indépendante

Source : Effectif, volume 13, numéro 2, avril/mai 2010.


Myriam Jezequel Écrivaine, chroniqueuse et chercheuse