Vous lisez : Les programmes d’assurances collectives sont malades : quatre façons d’y remédier

Nos programmes d’assurances collectives sont malades. En 1994, un programme coûtait en moyenne 2 % à 3 % du salaire. En 2014, on en est à plus de 5 % du salaire. On a connu une croissance annuelle moyenne de 5 % en excédent de l’inflation salariale. Ce rythme d’augmentation ne peut être soutenu indéfiniment.

Les causes des augmentations  sont connues : vieillissement de la population, coupures et limites dans les programmes gouvernementaux, avènement de médicaments et de traitements de plus en plus chers et demande accrue de soins de santé. Rien de tout cela ne va changer.

Jusqu’à maintenant, les solutions utilisées par les employeurs, les fournisseurs et les intermédiaires ont souvent une visée limitée et à court terme : on ajuste un peu les protections offertes, on négocie de façon serrée avec les assureurs, on accepte de payer un peu plus cher pour ne pas enlever des acquis. On ne règlera pas le problème de cette manière. Il faut plutôt envisager les quatre façons suivantes de remédier à la situation.

Remède n° 1 – Cesser de mettre en opposition la « vraie » assurance et les avantages « budgétisables »
Oui, il faut inclure dans les programmes les protections d’assurance vie et d’assurance invalidité, et les protections pour les soins médicaux hors Canada et les dépenses élevées. Ce sont des éléments essentiels de « vraie » assurance, qui protègent les employés contre les risques financiers.

Cependant, il faut éviter de mettre ces éléments en opposition avec les avantages que les employés apprécient beaucoup, tels le remboursement des frais dentaires et des soins de la vue. Sinon, on a le résultat qu’on connaît : on ménage la chèvre et le chou. C’est-à-dire qu’on offre un peu des deux en négligeant une partie de ce qui est essentiel et en coupant une partie de ce qui est apprécié.

Il faut plutôt statuer sur le filet de sécurité financière qu’on veut offrir et gérer le reste  dans un budget de rémunération globale. Si les employés apprécient particulièrement de pouvoir passer un examen dentaire tous les six mois ou d’avoir accès à des services complets de soins paramédicaux et qu’en plus, c’est plus avantageux fiscalement que de leur verser du salaire, pourquoi pas? 

Remède n° 2 – Gérer et mesurer les programmes globalement
La plupart des employeurs font appel à des fournisseurs différents pour chacun des programmes qui touchent la santé des employés : assurances collectives, santé et sécurité du travail, programmes de prévention, programme d’aide aux employés (PAE), etc. Les fournisseurs sont tous des spécialistes de leur domaine et chaque programme est géré avec un budget distinct et parfois par une personne et/ou un service différent au sein de l’entreprise.

Il n’est donc pas étonnant que cette approche de gestion cloisonnée comporte plusieurs inefficacités. Par exemple :

  • on assure une gestion serrée du dossier de santé et sécurité du travail, pour voir ensuite les coûts d’assurance collective exploser;
  • on a une compréhension approximative de certaines problématiques complexes comme la santé mentale, puisque les diverses interventions (soutien du PAE, congés de maladie, assurance invalidité) ne sont pas coordonnées;
  • on n’arrive pas à libérer les sommes requises pour investir en prévention.

Une gestion globale des programmes qui touchent la santé des employés permet de remédier à ces problèmes et facilite l’adoption d’indicateurs de performance qui mesurent la santé et la productivité des employés et non uniquement le coût des programmes.

Remède n° 3 – Transformer les programmes de soins médicaux en programmes de santé
Environ 70 % des coûts de santé assumés par nos programmes sont associés à des conditions médicales qu’on peut prévenir ou contrôler par la prévention : une bonne alimentation, de l’exercice, une bonne gestion de stress… Mais on refuse souvent d’investir en prévention parce que le rendement de l’investissement n’a pas été démontré!

La gestion globale de la santé en entreprise doit inclure une stratégie de maintien de la santé et de gestion des conditions chroniques, pour prévenir les réclamations ou diminuer le coût des réclamations en cours. On doit agir dans un cadre structuré où on : (1) mesure le coût total de la « non-santé », (2) éduque les participants et (3) agit proactivement pour aider à changer les comportements. 

Ainsi on pourra transformer les programmes de soins médicaux en programmes de santé. Et le rendement de l’investissement sera au rendez-vous.

Remède no° 4 – Cesser de communiquer de la même manière en s’attendant à des résultats différents
Beaucoup d’employeurs font les mêmes commentaires : « Les avantages sociaux sont trop compliqués. Les employés n’y comprennent rien. Il n’est pas possible de changer les comportements. »

Mais combien communiquent les mêmes choses, de la même façon, depuis des années en s’attendent à des résultats différents?

Les attentes des employés sont celles qu’ils ont comme consommateurs. À l’ère de Google, Facebook, Twitter et autres médiaux sociaux, il est impératif de faire autrement, d’explorer de nouvelles façons de joindre les employés et de rendre l’information pertinente pour eux. 

On ne peut pas abandonner en se disant que ça ne sert à rien. Il faut expliquer quels traitements sont priorisés, quels fournisseurs sont les plus efficaces et comment un traitement doit être utilisé. Et surtout, on doit continuer d’aider les employés à comprendre l’impact qu’ils ont en tant que consommateurs des programmes.

Des résultats concrets
En appliquant ces quatre remèdes, on peut espérer guérir les programmes d’assurances collectives et voir à l’avenir :

  • des participants qui connaissent leur état de santé et participent activement à la bonne gestion de leurs soins;
  • des employeurs qui maximisent la productivité de leurs travailleurs, au lieu de simplement  gérer leurs coûts;
  • des programmes qui sont compris, appréciés et qui font partie de la culture d’entreprise.

Utopique? Pas du tout. Mais il faut passer à l’action!


Jean-Guy Gauthier, CRHA est actuaire et vice-président au sein du groupe de consultation en assurance collective de Aon Hewitt . On peut le rejoindre par téléphone [514-982-6358] ou par courriel [jean-guy.gauthier@aonhewitt.com].

Ajouté à votre librairie Retiré de votre librairie