Vous lisez : Gérer le rendement pour prévenir les ondes de choc

La gestion du rendement (ou l’appréciation des contributions individuelles) est un levier de mobilisation qui relève de l’exercice réel du leadership et qui s’impose comme une occasion privilégiée de transparence et de vérité. Toutefois, la démarche peut se révéler plus compliquée et produire parfois des blessures à l’estime de soi et aux relations. Pour prévenir les conflits contre-productifs, patrons et employés doivent établir une alliance efficace pour la satisfaction de leurs besoins respectifs.  

Pour ce faire, un dialogue ouvert et continu s’impose dans le cadre de l’appréciation des contributions de chacun; il est aussi utile lors de la communication des attentes, des rencontres de suivi et de la revue annuelle du rendement, permettant une compréhension juste et une adaptation progressive des points de vue des personnes concernées. En effet, dans la gestion du rendement, on ne peut jamais faire abstraction de tout ce qui importe aux personnes concernées : leurs rêves, leurs aspirations, leurs attentes et leurs exigences, les sources de leur motivation, leurs besoins de sécurité, d’identité, d’appartenance, de communication, d’autonomie, de réalisation, de valorisation et de reconnaissance.  

Un tel dialogue est fructueux sur trois plans :

  • il constitue l’occasion idéale pour le gestionnaire de manifester son soutien et sa volonté d’accompagner de façon continue;
  • il permet à l’employé de valider, auprès de son gestionnaire, le caractère approprié de son engagement et de ses réalisations ainsi que ses besoins de perfectionnement;
  • il fournit à l’organisation l’occasion d’harmoniser les besoins et le potentiel des employés avec ses propres objectifs généraux.  

Les exigences liées à l’appréciation des contributions individuelles posent de nombreux défis au gestionnaire, même si les efforts en valent la peine. Entre autres, cet exercice requiert :

  • une présence et une attention suivies pour évaluer le rendement de chaque employé et favoriser chez lui l’engagement conséquent;
  • la communication d’objectifs clairs;
  • un encadrement pertinent;
  • la capacité d’éveiller l’employé à ses compétences, de renforcer son estime de soi et d’encourager ses efforts par une rétroaction opportune et valorisante;
  • le soutien à son apprentissage.  

Quel que soit leur rendement, tous les employés cherchent et méritent de l’attention. Évidemment, la démarche de renforcement sera adaptée au rendement de chacun. Dans chaque entreprise, on peut classer la contribution des employés en trois grandes catégories. 

Le rendement exceptionnel

On trouve d’abord la catégorie des employés super performants qui comprend entre 10 % et 15 % des travailleurs. Le renforcement de leur motivation pour les maintenir productifs et les conserver est crucial, malgré la tendance bien naturelle et plus courante de porter plus d’attention aux salariés au rendement déficient. L’employé performant réclame aussi du soutien pour canaliser sa créativité, des défis à la mesure de ses talents, un degré accru de latitude, la valorisation de ses réalisations ainsi que des occasions d’apprentissage accéléré. La négligence ou le manque d’attention à cet égard peuvent malencontreusement créer un sentiment d’injustice et affaiblir son engagement en même temps que son lien de confiance avec le gestionnaire. 

Le rendement satisfaisant

La deuxième catégorie inclut entre 80 % et 85 % des employés, qui satisfont aux attentes générales. Pour les motiver davantage, il faut non seulement souligner leurs réussites et les éléments susceptibles de susciter une amélioration de leur rendement, mais surtout les sensibiliser à leurs compétences latentes qui méritent d’être cultivées. Le dialogue entre le gestionnaire et l’employé de cette catégorie leur permettra notamment de parler de ses aspirations, de ses inquiétudes concernant sa place, présente et éventuelle, au sein de l’entreprise et de son potentiel à exploiter. Plus le suivi sera régulier et constructif, plus l’employé sera touché par l’intérêt et la reconnaissance qu’on lui porte et sera motivé à maintenir ou à accroître sa contribution.  

Le rendement insuffisant

Enfin, on trouve dans les entreprises une catégorie d’employés moins performants, qui compte un faible pourcentage de travailleurs. Ils sont peu nombreux, mais on reconnaît généralement que les gestionnaires doivent leur consacrer un temps de gestion particulièrement important! Un échange direct et sans complaisance devient alors rapidement impératif dans ces situations fertiles en mésententes. Dans sa démarche visant à corriger le rendement de l’employé, le gestionnaire doit initialement chercher à le comprendre en se gardant d’un jugement trop hâtif. Sa tâche principale réside alors dans l’analyse du contexte. Une question clef doit être au cœur de sa réflexion : les causes du rendement déficient sont-elles liées exclusivement à l’employé, à l’organisation ou à l’exercice même des responsabilités de gestion? 

Pour éviter les conflits et réduire les demandes de révision du processus par les employés de ce groupe, le gestionnaire doit :

  • s’interroger sur l’exercice de son rôle en relation avec eux : comment qualifier sa présence auprès de ces employés pour les écouter, valoriser leurs progrès, les encadrer et les soutenir dans leur développement?
  • se demander si les causes du piètre rendement de ces employés relèvent de l’organisation : les attentes et les objectifs sont-ils précis et bien communiqués, les changements bien intégrés, les ressources appropriées et le milieu sécuritaire? 

Après cette analyse, le gestionnaire sera en mesure d’écouter objectivement et de comprendre les difficultés ou les demandes particulières de ces employés, d’évaluer avec plus de justesse et peut-être plus de justice leurs compétences et leur motivation, puis d’infirmer ou de confirmer ses attentes à leur égard.  

Conclusion

L’appréciation de la contribution de chacun n’est donc pas un exercice facile et elle peut se révéler risquée. De toute évidence, ce processus relève des habiletés relationnelles les plus fines du leader, à savoir :

  • une présence sensible et constante auprès des employés;
  • une écoute, une appréciation et un respect dynamique de leurs besoins particuliers et distincts;
  • une authenticité et le sens de la vérité. 

Avoir recours à cette recette permettra aux gestionnaires de diriger un plus grand nombre d’employés super performants. 

Applications pratiques

Comportements à privilégier par le gestionnaire

  • Garder en mémoire que tous les employés méritent présence, attention, respect et soutien.
  • Avoir l’humilité d’analyser ses comportements de gestion et de mettre un terme à ses jugements sur l’autre.
  • Cultiver la reconnaissance et l’appréciation des employés et avoir la capacité de construire sur les différences individuelles.
  • Avoir la générosité et la volonté de communiquer ce qui est vrai, juste et utile.

Comportements à privilégier par le professionnel de la gestion des ressources humaines

  • Sensibiliser, former, conseiller, accompagner et soutenir les gestionnaires dans une démarche d’habilitation globale en matière de communication.
  • Analyser les situations complexes de manière lucide, sensible et juste, en tenant compte de la variété des intérêts personnels et organisationnels en cause.

Pour aller plus loin : quelques suggestions de lecture

  • Optimiser la performance au travail – Un guide pratique par Claude Hotte, Éditions Stratégie.
  • Le Manager-Minute de Kenneth Blanchard et Spencer Johnson, Éditions d’Organisation.
  • Profession Gestionnaire par Guy Boucher, Paul-André Gagné et Jean-Guy Petitpas, Publications du Québec.
  • L’entretien d’évaluation par Jacques Teboul, Éditions Dunod.
  • Voir aussi la sélection de livres sur ce sujet dans la Librairie du portail de l’Ordre  

Fernand Bélair, CRHA, LL.M., est consultant en gestion des conflits. On peut le joindre par téléphone au 418 682-1193 ou par courriel fernand.belair@oricom.ca 

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