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Gestion d’un dossier d’accident du travail et relations du travail : intrinsèquement liés?

Bien que non souhaitable, la gestion des dossiers d’accidents du travail fait partie intégrante du quotidien du professionnel en ressources humaines œuvrant en entreprise. Alors que la majorité des dossiers sont de gravité mineure et de courte durée, d’autres s’échelonnent sur plusieurs mois, voire années, entraînant des coûts considérables au dossier d’expérience de l’employeur, et pouvant même affecter ses activités économiques. Ainsi, l’établissement d’une stratégie est essentiel afin de favoriser un retour au travail et il devient avantageux pour l’employeur d’assigner temporairement son travailleur victime d’un accident de travail afin de réduire ses versements à la CSST.

14 octobre 2015
Valérie Gauthier, CRIA

Que ce soit dans le cadre d’une assignation temporaire, d’un retour progressif, ou d’un retour dans l’emploi prélésionnel du travailleur, cela est également bénéfique pour le travailleur : en plus de maintenir le lien avec son milieu de travail, il conserve l’intégralité de son salaire. Dans ces cas, il est préférable, même primordial, de s’assurer d’une collaboration de l’exécutif syndical lorsque l’organisation est encadrée par les dispositions d’une convention collective. D’abord, afin de demeurer en conformité avec la convention collective en vigueur (plusieurs d’entre elles comportent des articles encadrant la gestion de la santé et sécurité au travail, notamment en lien avec le paiement de l’indemnité de remplacement du revenu après la période des 14 premiers jours). Puis, afin de gagner la confiance de l’employé par l’entremise de son syndicat et de s’assurer de sa compréhension des étapes et des enjeux entourant la gestion de son dossier.

Voici quelques éléments de stratégie, afin de promouvoir et d’encourager la collaboration patronale-syndicale en milieu manufacturier dans la gestion des dossiers d’accidents du travail :

  1. Informer le comité paritaire de santé et sécurité des accidents survenus lors du dernier mois, principalement lorsqu’on retrouve des similitudes entre ceux-ci. Les représentants des employés pourront donc proposer des pistes de solution et porter une attention particulière aux gestes de leurs collègues sur le plancher afin de prévenir de nouvelles blessures.
  2. L’employeur devrait se doter d’une politique concernant l’assignation temporaire, notamment en créant une banque de postes convenables pour chaque type de blessures et en remettant cette liste au travailleur accidenté dès le premier rendez-vous médical. Impliquer le syndicat, mais également les gestionnaires de premier niveau, dans le choix des postes s’avère fort judicieux, car rien n’empêche que ces tâches contribuent activement à la productivité de l’entreprise.
  3. Rien de mieux que des ambassadeurs de la santé et sécurité parmi les employés pour promouvoir les bons comportements. Encouragez donc vos employés à s’impliquer dans les activités santé et sécurité de votre entreprise. Que ce soit en donnant de la formation aux nouveaux employés, en devenant secouristes en milieu de travail ou en participant au comité de santé et sécurité, aucune forme d’implication n’est à négliger et faites preuve d’ouverture lorsque vous recevez des propositions de la part de vos employés.
  4. Lorsque certains dossiers nécessitent une affectation en assignation temporaire d’un travail ou un retour progressif dans les tâches de leur emploi prélésionnel, informez les collègues de travail du contexte du retour ainsi que des modalités en lien avec l’horaire de travail ou les limitations fonctionnelles temporaires, tout en prenant soin de respecter la confidentialité du dossier du travailleur. Cela évitera qu’ils se sentent lésés en jugeant que leur collègue blessé accomplit une tâche plus facile ou que sa présence alourdit leur propre tâche.
  5. Dans le même ordre d’idées, lors d’un retour au travail à la suite d’une blessure, il est conseillé de porter une attention particulière au comportement des collègues du travailleur victime d’un accident du travail. En effet, l’échec d’un retour en assignation temporaire ou progressif est malheureusement souvent attribuable à l’intimidation subie par le travailleur de la part de ses collègues qui peut même aggraver le dossier en ajoutant une composante psychologique au diagnostic initial. En ce sens, soyez vigilant en informant bien les superviseurs de plancher ainsi que le chef d’équipe et en rencontrant vous-même le travailleur périodiquement afin de valider que tout se passe bien et de pouvoir intervenir lorsque le besoin s’en fait sentir.
  6. Plusieurs organisations syndicales offrent des services-conseils aux employés en matière de gestion de leur dossier d’accidents de travail, notamment un appui lors des dossiers nécessitant une contestation à la révision administrative ou à la CLP. En cas de questions ou d’incertitudes devant leur situation, n’hésitez pas à les diriger vers les ressources disponibles. Mieux vaut mettre le travailleur en confiance en l’orientant plutôt que de le rendre méfiant par la rétention d’informations.
  7. Finalement, en plus de travailler en étroite collaboration avec le bureau syndical présent au sein de votre entreprise, n’oubliez pas d’informer les responsables du dossier du travailleur à la CSST de toute information pouvant influencer le déroulement du dossier : un conflit avec le superviseur, un changement récent de poste, une mésentente entre collègues, etc. Une blessure ou un événement à potentiel de chronicité élevé a rarement une seule cause.

Conclusion
Bien que la gestion des accidents du travail soit un mal nécessaire, peu importe l’organisation dont vous faites partie, il n’en demeure pas moins que la prévention est la meilleure façon d’avoir un véritable impact sur vos coûts liés aux lésions professionnelles. Encore une fois, une étroite collaboration patronale-syndicale, combinée à une volonté marquée de la part de la direction de rendre son organisation performante en matière de santé et sécurité, est la clé du succès.

Source : VigieRT, octobre 2015.


Valérie Gauthier, CRIA