Vous lisez : Croissance des entreprises vers les États-Unis : règles à suivre!

Les différents changements économiques mondiaux des dernières années ont permis aux entreprises canadiennes de saisir des occasions d’affaires sur le territoire américain. Dans le cadre de projets d’expansion, celles-ci doivent toutefois s’assurer de respecter les exigences du gouvernement américain en ce qui a trait à l’admission de travailleurs sur son territoire. Différentes options sont offertes pour faire les choses dans le bon ordre et certaines règles sont à suivre pour maximiser les chances de réussite. Il est, avant tout, important de déterminer si un visa ou une autorisation sont requis, ainsi que le but exact et les tâches proposées durant le séjour prévu aux États-Unis.

Le visa

En règle générale, toute personne doit avoir un visa pour entrer aux États-Unis à titre de touriste ou visiteur commercial. En sont exemptés, les citoyens et résidents américains, les ressortissants des pays étrangers qui font partie de la liste du Programme d’exemption de visa – le Visa Waiver Program[1] (VWP) – ainsi que les citoyens canadiens.

Le VWP permet aux ressortissants de 39 pays participants de voyager aux États-Unis, sans avoir besoin d’obtenir un visa, pour des séjours de 90 jours ou moins. Avant d’avoir recours au programme VWP et de faire leur demande d’admission aux États-Unis, ceux-ci doivent toutefois obtenir une autorisation électronique de voyage Electronic System for Travel Authorization[2] (ESTA) émise par le United States Customs and Border Protection (ci-après « CBP »), afin d’obtenir une autorisation valide pour une période de 5 ans.

Les citoyens de pays autres que le Canada et ceux participant au VWP doivent obtenir un visa de visiteur appelé « B1/B2 » auprès d’une ambassade ou d’un consulat américain, dans leur pays d’origine ou encore dans un pays où le citoyen étranger a été légalement admis. 

Une fois apposé au passeport, le visa permet à son titulaire de se rendre à un aéroport, un port maritime ou une frontière terrestre et d’y demander l’admission aux États-Unis directement auprès d’un agent d’immigration du CBP.

Le visa ne garantit pas en tant que telle l’admission aux États-Unis; il indique uniquement qu’un employé de l’ambassade ou du consulat américain a déterminé que le détenteur de ce passeport aurait la possibilité de demander l’admission aux États-Unis comme touriste ou travailleur, le cas échéant. L’agent d’immigration du CBP, à un point d’entrée terrestre, aéroportuaire ou encore maritime, rendra une décision quant à l’admissibilité, précisera le statut et confirmera la durée autorisée du séjour aux États-Unis.

Le but du voyage aux États-Unis

L’autre élément primordial pour respecter les critères d’admissibilité est de déterminer le but exact et les tâches proposées durant le voyage aux États-Unis avant de l’entamer, surtout dans un climat de « Buy American, Hire American »[3]. En effet, ce décret présidentiel à saveur protectionniste a engendré un ensemble de politiques au sein des services d’immigration américains qui ont durci les critères d’admissibilité pour les visiteurs et les travailleurs étrangers.

  1. Le visiteur commercial

    De façon générale, il est possible d’entrer aux États-Unis à titre de visiteur commercial pour accomplir un travail qui ne diminue pas réellement, pour les citoyens ou résidents permanents américains, les occasions d’obtenir un emploi ou de l’expérience sur le marché du travail américain.

    De plus, depuis quelques années, les agents du CBP posent de plus en plus des questions pertinentes, tel que « Gérez-vous des employées aux États-Unis? », chose qui n’est pas permise pour un visiteur commercial. Ainsi, les tâches réalisées ne doivent pas entrer en concurrence directe avec des activités que des citoyens ou résidents permanents américains pourraient réaliser aux États-Unis.

    De plus, une entreprise ou des opérations américaines ne peuvent tirer profit des activités prévues par le visiteur commercial. S’il existe un doute quelconque quant au caractère acceptable des tâches prévues lors de la visite aux États-Unis, il sera préférable de faire une demande de permis de travail, lequel accordera au travailleur l’autorisation de réaliser des activités qui bénéficieront des entreprises aux États-Unis.

  2. Entrer aux États-Unis avec un permis de travail : la procédure

    Le rôle du gouvernement américain est de protéger le marché du travail américain, y compris les citoyens et les résidents permanents. C’est pourquoi il demande aux employeurs du pays d’embaucher, avant tout, des travailleurs locaux.

    Le gouvernement américain a toutefois mis en place différents programmes permettant d’engager des travailleurs étrangers.

    Tout d’abord, la procédure connue sous le nom de H-1B, dont les 3 étapes mènent à l’obtention d’un permis d’un travail américain :

    • Le gouvernement américain exige une preuve attestant que l’entreprise américaine paiera un salaire adéquat au travailleur étranger, pour lequel il est nécessaire d’obtenir une approbation de l’agence United State Department of Labor;
    • Une fois le salaire considéré comme acceptable, l’entreprise doit déposer une requête pour travailleurs non immigrants à un Regional Service Center aux États-Unis; et
    • à la suite de l’approbation par le Regional Service Center, le travailleur doit généralement déposer une demande de visa auprès d’une ambassade ou d’un consulat américain à l’étranger, puis dans tous les cas faire une demande d’admission directement à un poste frontalier terrestre ou aéroportuaire. Le permis sera ensuite délivré pour une période allant jusqu’à 3 ans avec possibilité d’un renouvellement de 3 années additionnelles, soit pour un maximum de 6 ans.

    Ensuite, la procédure de transfert intracompagnie, connue sous le nom de L-1, est également fréquemment utilisée par des entreprises étrangères présentes aux États-Unis ou encore celles qui veulent percer le marché américain et implanter des installations aux États-Unis. 

    Les exigences principales qui s’appliquent à cette catégorie L-1 sont les suivantes : 

    • L’employeur étranger et l’entité américaine qui bénéficieront des services du travailleur étranger doivent entretenir une relation d’entreprises entre mère et filiale ou, de façon plus générale, avoir un lien de « contrôle commun »;
    • Le travailleur étranger doit avoir travaillé pour l’employeur étranger pendant au moins une année au cours des trois années précédant immédiatement la demande de permis de travail, à temps plein et sur une base continue, dans un poste soit de direction, de gestion, ou un poste spécialisé; et
    • le travailleur étranger travaillera aux États-Unis durant une période incluant deux renouvellements pouvant aller jusqu’à 7 ans (3+2+2) au total dans le cas d’un poste de direction ou gestion, ou une période incluant un renouvellement pouvant aller jusqu’à 5 ans (3+2) au total dans le cas d’un poste spécialisé. 

    L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), remplacé par l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ci-après « ACEUM »), lequel est en vigueur depuis le 1er juillet 2020, offre également certaines avenues supplémentaires qui visent à faciliter l’admission de travailleurs étrangers aux États-Unis. Les exigences de cette catégorie, aussi connue sous le nom de « TN », sont les suivantes :

    • Le demandeur doit être un ressortissant d’un des pays signataires de l’ACEUM;
    • La profession du demandeur doit figurer parmi celles énumérées au chapitre 16 de l’ACEUM;
    • Le demandeur doit satisfaire aux exigences relatives à la formation, spécifiques à chaque catégorie de professions, établies par l’ACEUM; et
    • le demandeur travaillera aux États-Unis dans cette profession, à plein temps ou temps partiel, pour une période pouvant aller jusqu’à 36 mois, et ce sans limitations cumulatives.

Le statut non immigrant basé sur un traité

Finalement, il peut exister des possibilités pour un travailleur dont le pays de citoyenneté participe à un traité de commerce ou de libre-échange avec les États-Unis, de déposer une demande en vertu de cet accord.

De façon générale, le but du voyage aux États-Unis doit être circonscrit à l’un de deux objectifs.

  • Le premier est celui d’exercer une activité de commerce substantiel, pour lequel le travailleur obtiendra un statut E-1.
  • Le second est celui de développer et de diriger les activités d’une entreprise dans laquelle un investissement substantiel et de bonne foi a récemment été fait.
    • Le travailleur obtiendra dans ce cas le statut E-2.

Il est à noter que les cadres de direction, les superviseurs ainsi que les personnes dont les services sont essentiels au maintien des activités de l’entreprise ont également droit aux statuts de non-immigrant E1 et E2.

Conclusion

Les entreprises intéressées à se tourner vers les États-Unis pour poursuivre leur croissance doivent s’assurer de suivre les exigences américaines en ce qui a trait à l’admission de travailleurs aux États-Unis. Il est donc important de déterminer si un visa ou une autorisation sont requis, le but exact ainsi que les tâches proposées durant le voyage prévu aux États-Unis. Le fait de ne pas procéder ainsi pourrait avoir de sérieuses conséquences y compris des amendes, une interdiction de voyager aux États-Unis ou même une détention[4].

À propos des auteurs

Jean-Philippe Brunet, CRHA, est avocat co-fondateur et associé directeur au sein du bureau Avocats Galileo Partners Inc., où il est responsable de l’équipe immigration des gens d’affaires et de mobilité internationale. Me Brunet conseille plusieurs sociétés de tailles et de secteurs variés, ainsi que leurs employés, sur les différents aspects de la législation et de la réglementation canadienne concernant la mobilité internationale, pour appuyer leurs démarches d’obtention de permis de travail temporaires et de statut de résident permanent. On peut le joindre par téléphone au 514-600-1212 poste 400, ou via son adresse courriel jpb@galileopartners.ca.

Roger Mensch est un avocat sénior membre du Barreau de l’État de Washington, et agit comme conseiller juridique étranger au sein du bureau Avocats Galileo Partners Inc. Les auteurs tiennent à remercier Monsieur Martin Racine, étudiant en droit à l'Université de Sherbrooke, pour sa contribution à la rédaction de cet article.

  1. Voir les liens suivants pour de plus amples détails sur l’application du programme, notamment la liste des pays admissibles : https://www.dhs.gov/visa-waiver-program  https://travel.state.gov/content/travel/en/us-visas/tourism-visit/visa-waiver-program.html 
  2. Voir les liens suivants pour de plus amples détails sur la façon d’obtenir une autorisation ESTA : https://esta.cbp.dhs.gov  https://www.cbp.gov/travel/international-visitors/esta 
  3. Le 18 avril 2017, le président américain Donald Trump a signé le décret présidentiel « Buy American, Hire American ». Le décret vise, entre autres, à protéger les intérêts économiques, à faire diminuer le taux de chômage et à provoquer une hausse des salaires des travailleurs américains. Bien qu’il n’accorde pas de pouvoirs spécifiques, il force les différents départements à adopter des politiques internes plus strictes pour contrer l’immigration illégale, ainsi qu’à tenir des enquêtes et présenter des rapports sur les effets de ces politiques. Voir le lien suivant pour consulter le décret dans son intégralité : https://www.whitehouse.gov/presidential-actions/presidential-executive-order-buy-american-hire-american/ 
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