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Miser sur la diversité et l’inclusion pour favoriser l’innovation – Le cas de Bombardier Aéronautique

Les preuves ne sont plus à faire : les entreprises dont l’équipe de direction est diversifiée et qui gèrent bien cette diversité ont en moyenne une meilleure performance financière que les autres.

3 juillet 2012
Élisabeth Bussé, CRHA, et Christyne Turcot, CRHA

Toutefois, la question ne se résume pas seulement à la diversité; la mise en place d’un environnement de travail qui favorise l’inclusion est tout aussi importante. En effet, la synergie entre les diverses équipes doit être l’objectif ultime si on désire encourager la créativité et l’innovation, en plus de parfaire la gestion mondiale des talents et d’attirer et de conserver ainsi les meilleurs candidats au sein de l’organisation.

Nouveau président, nouvelle vision
Tout a commencé à la fin de 2008... À la suite de la revue annuelle des talents, fort de son expérience au sein d’entreprises internationales, Guy C. Hachey, nouveau président et directeur de l’exploitation, prend alors connaissance des statistiques sur les postes de leadership. Il constate que les femmes susceptibles de prendre la relève aux postes supérieurs de l’entreprise ne comptent que pour un très faible pourcentage du bassin de talents. C’est à ce moment-là qu’il a décidé d’implanter une stratégie pour favoriser la diversité au sein de l’équipe de leadership.

En premier lieu, il a mandaté un comité directeur composé d’une douzaine de membres de la haute direction ainsi qu’un groupe de travail constitué d’employés et de gestionnaires de plusieurs secteurs et provenant des différentes régions géographiques de l’entreprise. Leur réflexion sera suivie de l’élaboration et de la mise en œuvre d’une stratégie évolutive. La première phase de cette stratégie a consisté à revoir la position des femmes aux fonctions supérieures, afin de pouvoir les former pour occuper ces postes.

Des actions concrètes
Au cours de l’année 2009, le comité de travail s’est concentré sur l’analyse de la rentabilité (business case) et la recherche exhaustive des meilleures pratiques en matière de diversité des genres au sein des entreprises. Un diagnostic organisationnel a suivi dans le but de mieux comprendre le positionnement des femmes dans l’entreprise. Une série d’entrevues structurées et une analyse démographique détaillée ont contribué à mieux comprendre la réalité de Bombardier et à prioriser les prochaines étapes.

C’est au début de 2010 qu’un Forum sur le leadership des femmes a été lancé à l’interne. Il rassemblait plusieurs femmes au potentiel élevé afin de favoriser le partage de leurs points de vue, de leurs besoins et de leurs idées sur cette dimension de la diversité. Leurs discussions ont permis d’adopter un plan d’action sur trois ans comportant une série d’activités favorisant le réseautage, l’accroissement de la visibilité des femmes et le développement de leurs compétences. De plus, des changements ont été apportés aux pratiques de gestion des talents pour favoriser l’accélération du développement des femmes à haut potentiel.

Un indicateur clé de performance (ICP) a été ajouté au tableau de bord de l’entreprise afin de mesurer la présence des femmes dans les postes de leadership. Cette initiative confirme l’engagement de la direction envers cette dimension de la diversité, engagement qui sera par la suite officiellement énoncé dans la politique de responsabilité sociale de l’entreprise.

La mise à jour de la stratégie sur la diversité, le suivi du plan d’action annuel et celui de l’ICP sont assurés par une gouvernance régulière des comités qui a été mise en place en 2009. Le comité directeur se rencontre quatre fois par année selon un calendrier préétabli pour revoir et approuver les orientations stratégiques. Le comité de travail qui pilote les initiatives variées prévues par plan d’action se réunit tous les mois pour s’ajuster aux orientations stratégiques de l’entreprise et assurer un suivi rigoureux du plan.

Apprendre des autres est une richesse
Puisque l’organisation mise sans cesse sur l’amélioration de ses résultats et façons de faire, elle a fait appel à des entreprises qui souhaitaient partager avec elle leurs meilleures pratiques et leurs services en matière de diversité. Ces échanges l’ont amenée à réfléchir aux multiples facettes de la diversité, sur le plan non seulement quantitatif (par exemple, le nombre de femmes aux postes de leadership), mais également qualitatif, en misant sur les comportements que l’organisation peut encourager et reconnaître afin de faire rayonner la richesse de ces différences.

C’est alors que l’entreprise a introduit un nouvel élément dans sa stratégie : l’inclusion. Elle ne parle plus donc seulement de diversité, mais aussi d’inclusion, termes qu’elle définit ainsi en 2011 : la diversité est cette variété des caractéristiques qui rend les gens uniques et l’inclusion s’exprime par les comportements qui contribuent à créer un environnement qui élève et maximise les divers talents, les expériences et perspectives. Ainsi, il doit s’établir une synergie entre la diversité et l’inclusion afin d’atteindre l’efficacité et l’innovation souhaitées au sein de l’entreprise.

Mais comme l’ICP ne démontrait pas les résultats espérés, un processus rigoureux de résolution de problèmes a été implanté au printemps 2011 afin d’en identifier les causes fondamentales. Un groupe multidisciplinaire, auquel près de deux cents gestionnaires et employés ont participé de près ou de loin, a été formé pour explorer ces causes et trouver des solutions. La stratégie a par la suite été adaptée afin de refléter ses découvertes.

Nouvelle stratégie globale : diversité et inclusion
Afin de peaufiner la stratégie globale et de la propager dans l’organisation, les principaux objectifs d’affaires sous-jacents ont été définis :

  • dépasser les besoins des clients;
  • s’ajuster aux marchés en évolution;
  • s’adapter aux employés et aux environnements de travail en évolution;
  • encourager l’innovation provenant de solutions et d’idées qui émergent de groupes divers;
  • améliorer l’efficience et la performance de l’organisation.

Avec toutes les informations recueillies à ce stade, la stratégie s’est déclinée sous trois angles :

  • poursuivre les initiatives quant au développement des femmes, et ce, en veillant à ce qu’elles soient alignées sur les résultats de l’exercice de résolution de problème, ce qui implique un plan annuel détaillé des différentes initiatives prises en charge par le comité de travail;
  • viser à atteindre un taux de 25 % de femmes aux postes de leadership d’ici 2014; toutefois, l’atteinte de ce résultat n’est plus la responsabilité du président seulement, mais aussi de tous les groupes de l’organisation; chaque équipe de direction des groupes définit ses propres objectifs annuels jusqu’en 2014, tout en respectant l’objectif global de 25 %; plus spécifiquement, les objectifs des groupes sont déterminés en considérant leur statut actuel (pourcentage de femmes dans des positions de leadership), leur bassin actuel de gestionnaires (hommes et femmes) et une augmentation de ce bassin en fonction des embauches annuelles planifiées;
  • faire connaître le pouvoir de la diversité et de l’inclusion à l’organisation, grâce à un plan de communication et de gestion du changement; en effet, afin de favoriser un alignement optimal au sein de l’organisation, il est essentiel de faire connaître aux employés la valeur ajoutée de la diversité et de l’inclusion tant pour eux-mêmes que pour l’entreprise.
Croire au pouvoir de la diversité et de l’inclusion
La conviction relative au pouvoir de la diversité et de l’inclusion doit d’abord être véhiculée par la haute direction. Le président de Bombardier y a adhéré depuis longtemps déjà. Il a d’ailleurs clairement communiqué son point de vue à ce sujet de même que ses objectifs pour l’entreprise. Toutefois, afin que l’entreprise dans son ensemble adhère aux principes de la diversité et de l’inclusion, il est d’abord essentiel d’en comprendre les multiples facettes. C’est une fois cette étape franchie qu’on pourra percevoir des changements de comportement. Pour cela, il est impératif de créer un environnement où les différences et caractéristiques uniques de chaque individu sont mises en commun et reconnues afin de générer cette capacité d’innovation qui est un avantage concurrentiel pour toute organisation.

Élisabeth Bussé, CRHA, directrice, gestion des talents et développement du leadership, et Christyne Turcot, CRHA, spécialiste principale, développement du leadership, Bombardier Aéronautique

Source : Effectif, volume 15, numéro 3, juin/juillet/août 2012.


Élisabeth Bussé, CRHA, et Christyne Turcot, CRHA