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Égalité hommes-femmes : à l’ordre du jour partout dans le monde

À l’ordre du jour de la Conférence internationale du Travail tenue à Genève en juin 2009 figurait l’égalité entre femmes et hommes. Pendant plusieurs jours, une Commission internationale de l’égalité a débattu des progrès accomplis dans le domaine de l’équité ainsi que du chemin qu’il reste à parcourir (plus ou moins long selon les pays). Mentionnons que la dernière fois où la question de l’égalité entre les femmes et les hommes était débattue au cours d’une Conférence internationale du Travail remonte à près de vingt-cinq ans.

24 novembre 2009
Denise Perron, CRHA

Les recommandations de la Commission de l’égalité ont été adoptées à l’unanimité par les représentants à la Conférence internationale du Travail à la suite de pourparlers entre les gouvernements, les employeurs et les travailleurs provenant des cent soixante-cinq États membres; elles réaffirment que l’égalité entre les femmes et les hommes est une valeur centrale et confirment l’importance du respect de ce droit fondamental. C’est donc sans surprise que la Commission de l’égalité exhorte à la ratification universelle des conventions concernant la discrimination (n˚ 111, 1958) et l’égalité de rémunération (n˚ 100, 1951).

Cependant, les concepts d’égalité varient selon les États. L’égalité de rémunération est définie et calibrée de façon fort particulière d’un pays à l’autre. Quant aux mesures pour atteindre l’équité en emploi, elles peuvent s’avérer essentielles pour un pays et contre-productives pour un autre. Par exemple, l’Arabie saoudite et la Chine semblent favorables au principe de quotas pour améliorer la représentation des femmes sur le marché du travail, alors que les États-Unis et la Nouvelle-Zélande y sont fortement opposés.

Fruits d’un consensus universel, les cinquante-huit résolutions adoptées par les États membres de la Conférence internationale du Travail mettent l’accent sur le rôle que doivent jouer les principaux acteurs du monde du travail (employeurs, travailleurs et gouvernements).

Ainsi, conscients de la contribution indispensable des femmes au développement économique mondial, les représentants des employeurs ont cerné leur contribution notamment en :

  • faisant valoir le point de vue des employeurs dans les discussions politiques concernant l’égalité entre les sexes et les réformes législatives;
  • stimulant l’entrepreneuriat féminin, en préconisant des politiques publiques qui permettent aux femmes de créer leur propre entreprise et en favorisant la création de réseaux de femmes chefs d’entreprise;
  • aidant leurs membres à mettre en place dans leurs entreprises des politiques et mesures qui tiennent compte des différences entre les sexes, grâce à la mise en commun des bonnes pratiques, à l’organisation de cours de formation et d’ateliers et à des plans d’action permettant d’améliorer l’accès des femmes aux ressources, aux connaissances et à l’information;
  • promouvant les principes et droits fondamentaux au travail auprès de leurs membres par la sensibilisation, la formation et l’apport d’une assistance technique concernant le droit à la non-discrimination et notamment celui de ne pas subir de discrimination fondée sur le sexe;
  • adoptant des codes librement consentis, en réalisant des travaux de recherche et en veillant à ce que les données soient ventilées par sexe.

De leur côté, les syndicats et représentants des travailleurs ont mis l’accent sur leur contribution à l’égalité femmes/hommes en :

  • renforçant la représentation des travailleurs informels, migrants, ruraux et domestiques, qui sont principalement des femmes;
  • prenant des mesures concrètes pour garantir la participation active des femmes en leur sein, à tous les niveaux, y compris dans leur fonctionnement et leurs activités;
  • veillant à ce que les négociations collectives soient abordées dans une perspective de genre;
  • faisant valoir dans une perspective de genre le point de vue des travailleurs dans les débats portant sur des questions comme la réforme législative, l’inspection du travail, les tribunaux et tribunaux du travail;
  • continuant à jouer leur rôle d’agent de changement pour l’égalité femmes/hommes, en diffusant des informations, en renforçant les capacités et les connaissances techniques sur l’égalité entre femmes et hommes dans des domaines tels que la politique de l’emploi, les programmes de formation, le soutien familial, les retraites et la sécurité sociale, l’égalité de rémunération, la protection de la maternité et le congé parental.

Quant aux gouvernements, ils entendent actualiser leur rôle, entre autres par :

  • la ratification des conventions internationales pertinentes à l’égalité femmes/hommes;
  • la cohérence de leurs actions concernant la discrimination fondée sur le sexe;
  • l’adoption de mesures pour formaliser l’économie informelle (travail au noir);
  • la mise en place de politiques d’équilibre vie personnelle/vie professionnelle (congés parentaux, garderies, etc.);
  • la création d’un environnement favorable au dialogue social en permettant aux partenaires sociaux de défendre leurs positions dans des conditions de liberté et de respect.

Le président de la Commission sur l’égalité, monsieur Fredrik Arthur, ambassadeur pour l’égalité en Norvège, faisait remarquer que les obstacles en matière d’égalité des chances et de traitement n’ont toutefois guère changé en vingt-cinq ans dans le monde.

À cet égard, le Canada et le Québec ne sont pas à la remorque au chapitre de la promotion de l’égalité des genres. Ils appliquent des lois sur l’équité salariale, sur l’équité en emploi, sur l’accès à l’égalité, sur la représentation des femmes à des instances de gouvernance, des programmes d’obligation contractuelle qui visent les entreprises faisant affaire avec les gouvernements, des programmes de garderie, des congés de maternité et de paternité, etc.

Les résolutions de la Conférence internationale du Travail de 2009 se veulent ancrées dans une logique d’efficience économique. De fait, se passer de l’apport des femmes, qui représentent la moitié de la population mondiale, n’a pas de sens ni d’un point de vue socio-économique, ni sur le plan des affaires.

Au Canada comme ailleurs dans le monde, il devient de plus en plus hasardeux de mettre en place de nouvelles initiatives sans penser à leur impact sous l’angle des possibilités de croissance et de reprise économique avec ou sans l’apport de la main-d’œuvre féminine.

Conclusion
Que l’on soit d’accord ou non avec les résolutions de la Conférence internationale du Travail, il serait téméraire de croire qu’elles ne sont que le reflet d’une tendance libérale passagère sans conséquence sur la gestion de la main-d’œuvre. Les conclusions des travaux réalisés auront sans doute une influence sur les programmes et politiques de gestion des ressources humaines. Au Québec par exemple, des entreprises veulent dépoussiérer et actualiser leurs programmes d’équité et d’accès à l’égalité en emploi, qu’elles soient soumises ou non à une obligation gouvernementale de le faire.

Bref, les conclusions adoptées cette année à Genève démontrent que le principe d’égalité femmes/hommes est maintenant au point de non-retour. À des degrés différents de réalisation certes, l’égalité entre les femmes et les hommes est définitivement à l’ordre du jour des milieux du travail du monde entier.

En marge de la Conférence : sommet sur la crise mondiale de l’emploi

Dans le but d’aider les travailleurs et les employeurs à surmonter la première crise systémique de l’économie mondialisée et de s’orienter vers une reprise et une croissance durable, un débat international s’est tenu en marge de la Conférence internationale du Travail de juin dernier. Il portait sur l’impact de la crise économique mondiale sur l’emploi et sur les moyens d’en contrer les effets négatifs.

Le directeur général de l’Organisation internationale du travail, monsieur Juan Somavia, a fait part de certaines estimations du Bureau international du Travail qui ne sont pas réjouissantes. Il a mentionné que, même si une reprise économique mondiale est imminente, une hausse du chômage est inévitable. Par conséquent, la crise mondiale de l’emploi peut encore durer au moins six à huit ans.

Des chefs d’État, dont monsieur Lula da Silva, président du Brésil, madame Tarja Halonen, présidente de la Finlande, et monsieur Nicolas Sarkozy, président de la France, ont aussi insisté sur la gravité de la situation de l’emploi.

Dans ce contexte, les acteurs du monde du travail se sont tous entendus pour mettre l’accent sur une série de moyens qui peuvent être adaptés par chaque pays. Ils ont adopté un Pacte mondial pour l’emploi qui comprend notamment les mesures suivantes :

  • promouvoir les normes fondamentales du travail et autres normes internationales du travail qui favorisent la relance de l’activité économique et le redressement de l’emploi et qui réduisent les inégalités entre les hommes et les femmes;
  • accroître l’aide aux femmes et aux hommes vulnérables durement touchés par la crise, notamment les jeunes à risque, les travailleurs mal rémunérés, les travailleurs sous-qualifiés, ceux de l’économie informelle et les travailleurs migrants;
  • accroître l’égalité d’accès et l’égalité des chances en ce qui concerne l’amélioration de la qualification, la formation et l’enseignement de qualité en vue de préparer la reprise;
  • investir dans l’amélioration de la qualification, le perfectionnement des compétences et la reconversion des travailleurs pour améliorer l’employabilité, en particulier pour ceux qui ont perdu leur emploi ou qui risquent de le perdre et les groupes vulnérables;
  • reconnaître la contribution des PME et des micro-entreprises à la création d’emplois et promouvoir des mesures, notamment un accès à un crédit abordable, qui assureraient un environnement favorable à leur développement;
  • assurer la création de synergies entre l’État et le marché ainsi qu’une réglementation efficace et efficiente des économies de marché, notamment un environnement juridique et réglementaire propice à la création d’entreprises, aux entreprises durables et favorisant la création d’emplois dans l’ensemble des secteurs.

Le Pacte mondial de l’emploi se veut un cadre général. Les mesures énoncées peuvent guider les employeurs, les travailleurs et les gouvernements dans la formulation de leurs actions au sein de leurs structures.

Denise Perron, CRHA, présidente, Groupe AEQUITAS

Source : Effectif, volume 12, numéro 5, novembre/décembre 2009.


Author
Denise Perron, CRHA Consultante et présidente Groupe AEQUITAS
Services-conseil dans les domaines de l'équité salariale, de l'égalité salariale, de l'équité en empoi principalement au Québec, en Ontario, au Canada (entreprises de juridiction fédérale), en Suisse, en France et au Royaume-Uni.