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L’analytique RH : un potentiel énorme, mais la patience est de mise

Le domaine de l’intelligence d’affaires, axé sur des paramètres RH, offre aux professionnels des ressources humaines une opportunité inégalée d’améliorer la qualité de leurs interventions et de les lier de plus en plus aux réels enjeux d’affaires d’une entreprise. L’intérêt marqué et récent pour l’analytique RH (l’intelligence d’affaires spécifique au secteur des ressources humaines) s’explique, entre autres, par l’implantation de systèmes de gestion de ressources humaines de plus en plus intégrés. On peut donc imaginer explorer aujourd’hui des liens potentiellement causaux qui, autrefois, pouvaient seulement être imaginés.
7 novembre 2017
Antoine Devinat, CRHA

Champ exploratoire prometteur certes… Mais malheureusement, certains s’avancent trop rapidement dans ce nouveau domaine et font rapidement face à des défis largement sous-estimés. Afin d’éviter que l’analytique RH demeure au stade de mode, il faut donc bien gérer les attentes des entreprises qui souhaitent progresser dans ce domaine et s’assurer qu’elles se donnent les moyens à long terme pour y arriver.

Plusieurs défis à l’horizon

Explorer l’analytique RH est beaucoup plus complexe que de demander à une base de données d’employés de livrer ses secrets bien cachés. Des défis de taille peuvent freiner de façon brutale l’espoir naissant des services RH de se doter d’ancrages plus solides pour accompagner leurs interventions. En voici quelques-uns…

  1. TI : structure et validité des informations. Avoir des bases de données d’employés intégrées dans une seule et même structure constitue un défi énorme. Souvent, les systèmes et architectures TI très variés se sont progressivement imbriqués. De plus, les informations dans ces bases de données sont fréquemment incomplètes, voire fausses, par manque de rigueur dans l’entrée et la mise à jour des informations.
  2. Enjeux légaux : dès qu’une organisation commence à intégrer tous les renseignements sur ses employés dans une seule structure, des enjeux de confidentialité et d’accès à l’information émergent instantanément. Plusieurs voient aussi dans cette tendance une approche « Big Brother ».
  3. Expertise théorique : maîtriser les modèles et phénomènes RH et leurs interconnexions pour orienter les stratégies d’utilisation des données disponibles ou à rechercher est indispensable. Sans cette expertise, une organisation pourrait perdre un temps fou à colliger des données et développer des stratégies d’analyse exploratoire inutiles qui auraient peu ou pas de valeur ajoutée à court, moyen ou long termes.
  4. Expertise statistique : il s’agit là d’un champ d’expertise complexe, qu’il faut bien maîtriser pour éviter de conclure à des liens causaux ou à des interrelations inexistantes. En cherchant, on découvrira une corrélation quasi parfaite entre la consommation de fromages aux États-Unis et le nombre de gens morts étouffés dans leurs draps.
  5. Capacité à traduire des phénomènes observés sur le plan quantitatif en réelles stratégies d’intervention RH : une fois certaines observations faites à partir des données et des analyses effectuées, comment utiliser cette information de façon crédible et constructive auprès des unités d’affaires non seulement pour susciter un intérêt, mais aussi et surtout pour identifier des pistes de solutions concrètes et porteuses de changements à valeur ajoutée?

De fait, l’analytique RH n’en est qu’à ses débuts. Il faudra encore plusieurs années pour que les organisations puissent en tirer pleinement avantage. Elles devront se doter d’équipes pluridisciplinaires solides, dans une perspective initiale de recherche et développement. Mais au vu de ce que certaines entreprises comme Google font déjà à ce niveau, il est clair qu’on doit investir dans ce domaine afin d’identifier de nouveaux moyens d’améliorer l’expérience employé en entreprise et faire des choix plus judicieux concernant ceux qui existent déjà.

À propos de l’auteur

Antoine Devinat, CRHA, psychologue industriel et organisationnel et coach certifié PCC (Professional Certified Coach) par l’International Coach Federation, intervient à titre de consultant dans le domaine des ressources humaines depuis près de vingt ans. Ses champs d’expertise et d’intervention principaux sont l’évaluation et le développement des compétences de tous les niveaux de postes dans les organisations publiques, parapubliques et privées. On peut le joindre par courriel [adevinat@adnleadership.com].

Site web [www.adnleadership.com]


Author
Antoine Devinat, CRHA Président ADN Leadership
Fondateur d’ADN Leadership, Antoine Devinat est psychologue industriel et organisationnel, coach et conseiller en ressources humaines agréé; il intervient à titre de consultant dans le domaine des ressources humaines depuis près de 20 ans. Ses champs d’expertise et d’intervention principaux sont l’évaluation (plus de 3 000 candidats évalués à ce jour) et le développement des compétences pour tous les niveaux de postes dans les organisations publiques, parapubliques et privées. Coach certifié PCC (Professional Certified Coach) par l’International Coach Federation, il cumule près de 4 000 heures de coaching individuel et de groupe auprès de professionnels, gestionnaires et cadres supérieurs, dans des contextes de développement de leur leadership, d’intégration et de réflexion de carrière. Il a également œuvré en développement organisationnel, notamment dans des projets de diagnostic organisationnel, planification de la relève, audit, gestion de changement, amélioration et défense de pratiques de dotation ainsi qu’en développement, implantation et animation de programmes de formation en leadership.