ressources / developpement-competences-releve

La psychologie du coaching : décidément positive!

Le coaching est un moyen privilégié employé pour que les gestionnaires réalisent leur plein potentiel individuel et puissent offrir une performance optimale à leur organisation. Sa popularité dans les entreprises ayant beaucoup augmenté au cours des dix dernières années, on peut se demander si le coaching est une mode passagère ou si c’est un moyen éprouvé pour appuyer et consolider sa pratique sur des bases théoriques et empiriques solides.

21 janvier 2009
Yvon Chouinard, CRHA, Distinction Fellow

De manière à mieux délimiter le cadre professionnel de l’exercice du coaching exécutif, il peut être utile de faire avancer la réflexion sur le sujet. Nous suggérons que cette réflexion se fasse en examinant l’évolution du coaching dans la continuité de la recherche scientifique en psychologie de l’être humain et des organisations.

Ses particularités

La principale particularité du coaching de gestionnaires est que le programme d’accompagnement suit un modèle d’entraînement professionnel dans lequel il y a quelque chose de nouveau à construire, à améliorer ou à transformer. Il n’y a rien à soigner ou à guérir. Les clients sont généralement en bonne santé mentale et ont envie de passer à un degré de fonctionnement plus élevé afin de se sentir mieux dans leur vie professionnelle et privée. C’est un partenariat d’égalité dans lequel le coach écoute le langage utilisé (Chicaud et Marès, 2005) dans l’expression des besoins et reconnaît « les valeurs qui sont des indices pour identifier comment le client se met ou ne se met pas en action. »

Chicaud et Marès indiquent également que le coach utilise des fondements psychologiques pour comprendre le fonctionnement du client et s’il s’intéresse au passé de son client, c’est essentiellement « pour évaluer ses comportements du présent. »

L’influence du sport

L’accompagnement de gestionnaires fut d’abord influencé par les méthodes des grands coachs sportifs. Dès 1928, Coleman R. Griffith faisait des observations de nature psychologique concernant le coaching au football et au basketball (Palmer et Whybrow, 2005). Il semble qu’il soit celui qui ait utilisé le terme « psychologie du coaching » pour la première fois dans son livre Psychology of Coaching dans lequel il étudie les méthodes d’accompagnement d’un point de vue psychologique.

Plus tard, Gallwey (1974, 1999) a élaboré des principes et des méthodes de coaching individuel pour le tennis qui ont par la suite été appliqués largement au monde des affaires et de l’éducation.

La démarche corrective versus la démarche de développement

Au début, le coaching de gestionnaires a eu mauvaise réputation auprès des cadres supérieurs, car il était surtout employé à des fins correctives, c’est-à-dire pour redresser des comportements jugés inadéquats par l’organisation. Toutefois, les entreprises ont graduellement compris que le coaching pouvait également être utilisé pour atteindre d’autres objectifs, surtout à la lumière du constat que la formation n’est pas idéale lorsqu’il est temps de développer des habiletés relationnelles, sociales ou politiques (Grant, 2006).

Les fondements psychologiques du coaching de gestionnaires

Toutefois, la pratique de l’accompagnement de gestionnaires découle surtout de plusieurs grands courants de la psychologie du dernier siècle, de la théorie psychanalytique de Freud en passant par la psychologie comportementale, la psychologie cognitive, la psychologie sociale et, plus récemment, les psychologies existentialistes et humanistes ainsi que la psychologie positive (de la Vega, 2005).

La psychologie positive

Depuis quelques années, le coaching de gestionnaires s’alimente surtout à la psychologie positive. Celle-ci est une descendante directe de la pensée de Carl Jung, dont le concept d’individuation s’exprimait dans l’idée des gens devenant tout ce qu’ils peuvent être. Seligman (2002), l’un des fondateurs de la psychologie positive, décrit le coaching comme un véhicule naturel pour la psychologie positive. À cet égard, Kauffman (2004, 2006), qui est elle-même coach et psychologue à l’école médicale de Harvard, affirme que la psychologie positive, en étant centrée sur les forces de la personne, donc en prenant une approche positive de développement, s’harmonise logiquement avec une démarche de coaching, en plus de lui donner des bases scientifiques. Kauffman estime aussi que la philosophie du coaching et la psychologie positive sont étroitement appariées, car toutes les deux s’intéressent à ce qui fonctionne chez un gestionnaire, plutôt que d’essayer de réparer ce qui est défectueux (faiblesses, pathologies).

Vers une psychologie du coaching de gestionnaires

Si l’accompagnement de gestionnaires a émergé du champ de la croissance humaine et du changement, en prenant ses racines dans la psychologie, la consultation et la philosophie, les praticiens pensent que le temps est venu de consolider sa crédibilité et de lui fournir un cadre opérationnel qui permette de mesurer plus précisément son efficacité (Williams et Offley, 2005).

Une psychologie des forces

Il nous semble donc qu’une psychologie du coaching est plausible et qu’elle devrait être associée à une psychologie des forces, donc positive. Jusqu’à maintenant, la psychologie s’est peu intéressée aux forces des individus, ses préoccupations étant davantage du domaine des problèmes et des faiblesses (Linley et Harrington, 2006). Or, la psychologie du coaching ne peut qu’être orientée vers les forces, dans un cadre d’intervention basé sur l’hypothèse que la personne normale est caractérisée par une tendance psychodynamique interne qui l’incite à se développer et à se réaliser pleinement (Roberts et Brunning, 2007).

Une psychologie de développement personnel

Si le coaching de gestionnaires semble trouver sa place dans l’univers de la psychologie positive, c’est que cette dernière transfère à l’individu la responsabilité de son fonctionnement. Selon Seligman (2002), la psychologie positive n’a pas pour but d’indiquer les forces et les qualités que nous devons adopter, mais plutôt les conséquences de nos choix; cela est tout à fait cohérent avec le processus de l’accompagnement de gestionnaires où la personne doit identifier elle-même les forces qui la définissent le mieux pour ensuite les appliquer volontairement dans les parties importantes de sa vie, dont son travail.

Il semble donc que sont en place tous les éléments – les fondements théoriques, la recherche et les résultats – permettant d’envisager que le coaching de gestionnaires puisse se pratiquer selon sa propre psychologie, une psychologie décidément positive.

Yvon Chouinard, CRHA, est coach exécutif pour la firme CDC Coaching depuis 2004. Il possède également sa propre firme de consultation, Isotope Conseil inc., et remplit des mandats de planification stratégique, de diagnostic organisationnel et de développement d’équipes de direction. On peut le joindre par courriel à l’adresse ychouinard@cdccoaching.com.


Author
Yvon Chouinard, CRHA, Distinction Fellow Conseiller en mentorat Yvon Chouinard

Yvon Chouinard, CRHA, Distinction Fellow, est conseiller en mentorat. Il œuvre activement comme bénévole à Mentorat Québec au sein de son comité Veille et Recherche. Il est en particulier rédacteur en chef de La Sentinelle mentorale qui est publiée en janvier lors du Mois du mentorat.