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Médias sociaux et secret professionnel ne font pas toujours bon ménage!

Les médias sociaux font dorénavant partie de notre vie tant personnelle que professionnelle. Que ce soit pour recruter ou pour discuter de stratégies RH, les sites de réseautage professionnel ont désormais leur place. Sachez toutefois que, sur LinkedIn comme ailleurs, vous devez vous assurer de respecter votre code de déontologie, secret professionnel en tête!

6 mars 2012
Sarah Thibodeau, avocate

Il est très tentant de donner des exemples qui s’inspirent de notre pratique professionnelle. D’ailleurs, le Code de déontologie encourage le partage entre collègues CRHA et CRIA lorsqu’il énonce, à l’article 75, que le membre doit, dans la mesure de ses possibilités, « contribuer au développement de sa profession par l’échange de ses connaissances et de son expériences avec les autres membres de l’Ordre et les étudiants ».

Bien que ces échanges entre professionnels ou autres collègues soient souvent positifs, il est important de s’assurer en tout temps de respecter le secret professionnel et de ne jamais diffuser de renseignements confidentiels.

Même si vous ne mentionnez pas son nom, il peut être possible d’identifier une personne à partir de l’information fournie : nom de l’entreprise, profil du membre, description du problème, taille de l’entreprise, type de postes, etc. Une simple question peut donner assez d’éléments d’information pour permettre à des collègues de travail, à des amis ou à des parents de reconnaître la situation ou de savoir de qui il s’agit.

Bien que fictifs, les exemples suivants s’inspirent tout de même de quelques échanges réels dans les médias sociaux. Il y a de quoi vous persuader d’exercer la plus grande prudence lorsque vous partagez votre expérience ou cherchez des solutions à vos défis professionnelsdans les médias sociaux. 

Commentaire Impact
« Je suis en train de réorganiser la compagnie et nous nous apprêtons à couper plusieurs postes au marketing. Comment déterminer qui doit partir ou rester? L’équipe est en place depuis plusieurs années, alors je pensais y aller par ancienneté et conserver les plus expérimentés. Qu’en pensez-vous? » La personne mentionne que seuls les plus expérimentés vont demeurer dans l’entreprise; on peut deviner quels individus seront mis à pied (les plus jeunes). Ces employés peuvent se reconnaître. Aimeront-ils apprendre par les médias sociaux que leur poste est en jeu? De plus, des renseignements sur la situation financière de l’entreprise sont divulgués (postes coupés, pourquoi?)
« Avez-vous des noms de consultants qui font des enquêtes pour harcèlement psychologique à me suggérer? Nous vivons une situation problématique avec une de nos vice-présidentes et on m’a demandé de faire enquête. » On donne des indices sur l’identité d’une personne : il s’agit d’une vice-présidente dans une entreprise. S’il n’y en a qu’une ou deux, le lecteur peut savoir clairement de qui il s’agit. On révèle indirectement qu’il y a une potentielle situation de harcèlement psychologique dans l’entreprise. On associe une personne à cette situation : est-ce la victime? Est-ce la personne soupçonnée de harcèlement? Tant que l’enquête n’est pas terminée, on ne peut présumer qu’il s’agit de harcèlement. Il y a donc aussi un risque de nuire à la réputation d’une personne.
« Quel est le taux de roulement normal dans les entreprises manufacturières de fabrication de pièces d’automobile? Notre entreprise, située sur la Rive-Sud, a un très gros taux de roulement qui affecte notre production et notre performance financière et je veux nous comparer avec le marché. » On donne des indices sur la situation de l’entreprise, qui semble éprouver des difficultés que les clients et les concurrents ne devraient pas connaître!
« On vient de me demander de réaliser l’exercice d’équité salariale dans l’entreprise. Je n’ai jamais fait ça, je ne sais pas par où commencer. Des livres à me suggérer? Je dois agir rapidement, car l’entreprise est en retard à cet égard et risque des pénalités. » On publicise que l’entreprise est en défaut de respecter une loi. L’entreprise pourrait faire l’objet d’une enquête ou être soumise à des pénalités. De plus, sa réputation risque d’être entachée.
« Nous avons un agent de bureau qui s’apprête à faire un retour progressif au travail dans quelques semaines. Il est très fragile psychologiquement; alors nous voulons l’intégrer de la meilleure façon qui soit. Comme il a un nouveau patron, nous voulons que cela se passe le mieux possible, car avec l’ancien, ça ne fonctionnait pas vraiment. Avez-vous un plan de réintégration à me conseiller? » Des détails sur l’état de santé d’un employé sont donnés. En donnant le titre de son poste et en décrivant sa situation, on peut l’identifier. S’il est fragile psychologiquement, il ne souhaite probablement pas que l’on discute de sa situation sur un média social. De plus, on suggère qu’il y avait des problèmes avec un ancien patron, que l’on pourrait aussi identifier. On peut nuire à la réputation de ces personnes.

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Source : Espace professionnel, mars 2012


Sarah Thibodeau, avocate