Vous lisez : La relève : l’identifiez-vous vraiment? (1 de 2)

Note : S’intéressant à la planification des ressources humaines et à la gestion de la relève, ce texte est le premier d’une série de deux articles. Il est consacré aux erreurs à éviter lors de l’identification de la relève. L’article suivant traitera des pièges dont il faut se méfier lors du développement de cette relève. 

Avec le départ à la retraite des baby-boomers et la pénurie de main-d’œuvre qualifiée et intéressée à occuper des fonctions de responsabilités, la gestion de la relève est l’un des risques majeurs auxquels font face la plupart des organisations. Elle constitue l’une des préoccupations prioritaires des conseils d’administration d’aujourd’hui, qui exigent des plans d’action solides pour parer aux risques en découlant. Le service des ressources humaines est donc de plus en plus sollicité et doit livrer des programmes performants.   

Le livrable attendu consiste essentiellement à :

avoir une relève prête au bon moment à occuper certains postes cruciaux ou à remplacer certaines personnes clés, et ce, avec le niveau de performance et de succès attendu.


Même au sein d’entreprises qui investissent beaucoup dans la gestion de la relève, il n’est pas rare d’observer soit :

  • qu’on n’identifie pas adéquatement les candidats ayant le meilleur potentiel de relève;
  • qu’on ne développe pas adéquatement cette relève, ce qui ralentit le rythme et la qualité de son développement;
  •  ou encore qu’on éprouve des difficultés à retenir les hauts potentiels. 

Que vous soyez un dirigeant, un gestionnaire opérationnel ou un professionnel de la gestion des ressources humaines, cet article devrait vous permettre de mettre en question vos manières de faire afin d’éviter cinq des pièges les plus courants lors de l’identification de la relève. 

1. Le « pifomètre » pour identifier les hauts potentiels
Beaucoup de gestionnaires sont convaincus qu’ils sont en mesure de reconnaître un hautpotentiel simplement en le « regardant aller ». On constate souvent l’absence d’un profil de compétences ou le recours à des critères qui ne sont pas discriminants. Par exemple, une excellente performance ou encore la maturité sont-elles des critères permettant d’identifier la relève? On peut être très performant et avoir beaucoup de maturité, sans être un candidat à la relève. Un profil de compétences et des critères d’identification discriminants sont donc essentiels afin d’identifier les ressources ayant réellement le potentiel d’accéder à des postes de niveau plus élevé. Une évaluation de potentiel de gestion externe peut être très utile afin de contribuer à objectiver le processus d’identification, en ne se fiant pas uniquement au jugement des supérieurs hiérarchiques. 

2.  Confondre « hauts performants » et « hauts potentiels »
Un haut potentiel est assurément un bon performant, sans nécessairement être, un haut performant. Il se distingue par son potentiel à gravir des échelons supérieurs. À l’inverse, un haut performant n’est pas nécessairement un haut potentiel. On souhaite bien évidemment retenir les deux types de talents au sein de nos organisations, mais il est essentiel de distinguer les deux, car on aura beau développer un haut performant, il n’aura pas le potentiel de gravir d’autres échelons avec le succès attendu.  

3. Négliger les intérêts et les aspirations
Dans ce contexte de pénurie de relève, plusieurs gestionnaires sont tellement soucieux d’investir dans leurs hautspotentiels qu’ils en oublient de considérer leurs intérêts et leurs aspirations. Le succès à des postes supérieurs est aussi dépendant de l’engagement des personnes dans leur développement et, pour ce faire, il est essentiel d’évaluer la compatibilité du cheminement convoité, avec les aspirations et les forces naturelles de l’individu.  

4. Le syndrome du « poulain »
Il arrive souvent qu’un gestionnaire senior prenne sous son aile un talent qu’il perçoit très prometteur. Bien que cette initiative soit en principe très positive, il arrive à l’occasion que l’individu en question n’ait pas les qualités nécessaires pour se qualifier à titre de relève. C’est parfois par exemple un excellent expert, mais qui n’a pas les qualités requises pour accéder à un rôle de gestionnaire. Ce peut être aussi un excellent cadre intermédiaire, mais qui n’a pas le potentiel nécessaire pour accéder à des niveaux plus stratégiques. Le défi consiste à rallier ce gestionnaire à une juste évaluation de la contribution de cet individu et à éviter les promesses irréalistes et leur lot de déception. Un jugement professionnel externe basé sur une juste évaluation du potentiel de l’individu peut être d’une grande aide pour créer un meilleur consensus. 

5. Démobiliser les bons soldats!
En donnant trop de visibilité aux hauts potentiels ou en leur octroyant un cheminement privilégié trop visible, on risque bien souvent de démobiliser les bons performants ou les hauts performants. Il est donc essentiel de communiquer avec nuance et finesse en s’assurant d’un traitement équilibré de l’ensemble des talents qu’ils soient hauts potentiels, hauts performants ou bons performants. À défaut de le faire, la rétention de plusieurs bons éléments pourraient en souffrir, au profit des compétiteurs… 

Conclusion

Le défi en matière de relève, c’est d’implanter un programme simple qui cible bien les individus possédant le meilleur potentiel de développement face à certains rôles ou postes à risque. Cependant, ceci ne peut se faire sans considérer aussi la compatibilité avec les motivations, les forces naturelles et les aspirations de ces individus. Seuls des critères d’identification objectifs et le recours à des sources d’information diversifiées pour bien cerner le potentiel des individus, pourront permettre d’éviter des erreurs d’identification coûteuses.  

Un partenariat d’affaires véritable entre les professionnels en ressources humaines et les gestionnaires opérationnels peut permettre de développer une vision commune et réaliste du bassin de relève : afin d’en accélérer le développement et de bien gérer le risque de relève.

Pour aller plus loin 

  • Codsi, J. (2010). « La gestion de la relève: secret bien gardé ou transparence… », Le coin de l’expert, portail de l’Ordre.
  • Corporate Leadership Council, 2011. The Disengaged Star: Four Imperatives to Re-engageHigh-potentialEmployees,CorporateExecutiveBoard.
  • Corporate Leadership Council, 2003. Hallmarks of Leadership Success: Strategies for Improving Leadership Quality and ExecutiveReadiness, Washington (D.C.), CorporateExecutiveBoard. 

Jacqueline Codsi, CRIA, M. Ps. org., ASC,est directrice principale, psychologie du travail et développement organisationnel chez Leader conseil et chargée de cours à l’ÉNAP. Elle a oeuvré tant à titre de gestionnaire en gestion des ressources humaines et développement organisationnel qu’à titre de consultante stratégique et coach dans des organisations de secteurs diversifiés. Elle s’est spécialisée ces dernières années en développement organisationnel, développement du leadership et de la relève ainsi qu’en gestion du changement. On peut la joindre par téléphone [514-235-0557] ou par courriel [j.codsi@jcleaderconseil.com].

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