Vous lisez : Pour optimiser le recrutement sans tout bouleverser…

Le principal défi dans le secteur du recrutement consistait jusqu’à tout récemment à choisir les meilleurs dans un bassin généralement important de candidats. À cette époque tout de même pas si éloignée, l’offre excédait la demande. En revanche, depuis quelques années, le contexte a changé; pour de nombreux recruteurs, le défi est désormais d’accroître le nombre de candidats qualifiés.

Avec la pénurie de main-d’œuvre appréhendée, l’enjeu sera d’attirer des candidats tout en s’assurant de conserver sa main-d’œuvre. Selon le type de candidats recherchés, le secteur industriel ou la région en cause, certains recruteurs font déjà face à cette pénurie, et ce, pour diverses raisons allant du manque de candidats bien formés à un contexte de plein emploi régional.

Le recrutement interne
La qualité des défis professionnels et la possibilité de se développer au sein d’une organisation font partie des cinq facteurs d’attraction et de fidélisation les plus importants pour tous les groupes d’âge (Gabriel Bouchard, Monster.ca, 2007). Sans grande surprise, le fait d’avoir une possibilité de carrière dans une entreprise revêt une plus grande importance pour les moins de trente ans. En parler aux candidats devient donc une bonne stratégie d’attraction. Mais encore faut-il passer des paroles aux actes, par exemple en planifiant le développement de l’ensemble du personnel et, en particulier, des employés à potentiel élevé, en offrant des possibilités d’affectation ou en instaurant des plans de développement de la relève. Ces mesures auront en plus un impact sur la fidélisation des travailleurs, toutes générations confondues.

Voici un exemple de pratique gagnante. Chez TELUS, une directrice du marketing talentueuse termine actuellement un mandat d’un an à titre de directrice générale de l’équipe des ressources humaines. À cet égard, l’entreprise a pris un risque calculé et l’expérience s’avère positive de part et d’autre.

Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, une gestion des talents fondée sur une vision intégrée de l’attraction, du développement et de la fidélisation est plus que jamais nécessaire. Sur ce plan, la technologie permet maintenant l’intégration des processus de gestion des ressources humaines, dont le recrutement, le développement et la gestion de la performance. Plusieurs grandes entreprises ont d’ailleurs implanté ce type de système de gestion du personnel. Désormais, il revient aux gestionnaires des ressources humaines de travailler à faire évoluer les perceptions parfois non fondées de certains gestionnaires à l’égard des ressources internes. En effet, aux yeux de plusieurs, l’expérience acquise dans d’autres organisations est généralement plus valorisée que celle qui a été obtenue à l’interne. Plusieurs éléments plaident en faveur du candidat interne : il connaît l’entreprise et sa culture, ce qui lui permet d’être plus rapidement efficace, il existe un accord entre l’individu et l’entreprise, il a déjà un réseau informel essentiel au succès de plusieurs projets. De plus, le fait de privilégier un employé augmentera sa loyauté et celle de ses collègues qui constateront que l’entreprise offre réellement des possibilités d’avancement.

Cela dit, le choix de candidats internes peut poser un certain nombre de problèmes, comme du ressentiment si les employés perçoivent un manque d’équité ou l’effet domino (ouvertures en cascade d’autres postes à la suite de ce mouvement interne) qui doit être géré pour éviter qu’il devienne un obstacle au développement de la main-d’œuvre.

La marque employeur
Sujet d’actualité, la marque employeur permet à une organisation d’augmenter sa visibilité auprès d’un grand bassin de candidats, grâce à une combinaison de marketing, de communication et de technologie. Google est l’une de ces organisations qui ont su définir leur marque employeur de manière exceptionnelle. Beaucoup de gens reconnaissent et apprécient les produits et les services ainsi que l’image de Google. Plusieurs sont aussi tentés d’y travailler, car Google a largement diffusé sa marque employeur.

La marque employeur présente de nombreux avantages, dont la croissance de la qualité et de la quantité des candidatures et des recommandations de candidats, l’augmentation du pourcentage d’acceptation des offres d’emploi et le renforcement de la culture d’entreprise. Nous insisterons surtout sur ce dernier aspect, car si la marque a un impact externe évident, elle a aussi un impact interne important. En identifiant ce que représente la réalité du travail au sein de l’entreprise, en renforçant les valeurs et en guidant les comportements, la marque soutient la culture organisationnelle et favorise la fidélisation. Elle facilite le recrutement tout en ayant des répercussions internes extrêmement positives. Un des défis consiste à définir et à maintenir cette marque employeur, ce qui nécessite un investissement de ressources de la part des services des ressources humaines, du marketing et de la gestion.

Définir une stratégie…
Le manque d’analyse des besoins et le peu d’énergie investie pour se doter d’une stratégie à court et à moyen termes – disons sur une période de trois ans – constituent un autre enjeu de taille. Dans le feu de l’action, entre les nombreuses réquisitions, les courriels et les appels téléphoniques, la prise d’un certain recul et la collecte d’information sur les besoins actuels et anticipés de ressources semblent trop souvent difficiles. Il semblerait que les recruteurs passent moins de 5 % de leur temps à discuter des besoins de recrutement avec les gestionnaires embaucheurs. A priori, cette statistique peut paraître surprenante, mais à bien y regarder, elle représente bien la réalité de nos entreprises. Bien sûr, il existe d’autres moyens de recueillir de l’information, mais la répartition actuelle du temps n’est probablement pas optimale.

Une fois les besoins identifiés, on peut élaborer une stratégie – c’est-à-dire établir des priorités, des approches et des moyens à privilégier. Trop souvent, le besoin urgent d’attirer plus de candidats pousse l’organisation à adopter rapidement de nouvelles méthodes de repérage. Dans certains cas, de telles solutions produisent des résultats à court terme, mais probablement pas aussi bons que si une analyse fondée sur la règle du 80/20 avait été faite. Dans d’autres cas, la recette peut être la bonne pour un groupe donné ou dans une région en particulier, mais ne pas être efficace à tout coup. Pour le savoir, il faut mesurer. L’importance de la stratégie fait en toute hypothèse consensus. En revanche, le défi est d’en élaborer une… À cet égard, une macro-stratégie déterminant des orientations et des approches vaut probablement mieux que rien du tout!

Quelques pistes pour optimiser les résultats du recrutement
Tenant pour acquis que l’analyse des besoins est complétée et que la stratégie est établie, le résultat du processus de recrutement dépendra de chacune des étapes de ce processus. Le repérage de talent n’est que l’une de ces étapes, et ce, même si ce repérage est souvent tenu responsable des délais ou de la piètre qualité des candidats. Selon Lou Adler (2008), environ 50 % des problèmes de recrutement seraient liés à de mauvaises descriptions, à des évaluations de candidature bâclées, à des gestionnaires mal outillés, à des recruteurs éprouvant de la difficulté à conclure des ententes avec des candidats clés. Les 50 % restants seraient attribuables à une mauvaise utilisation de l’affichage, du marketing et de la technologie pour repérer les talents. Cette évaluation le pousse à suggérer de régler les autres problèmes avant d’investir davantage dans le repérage des talents – opération parfois coûteuse et nécessitant beaucoup de temps.

Le tableau suivant indique certains de ces problèmes et quelques solutions simples à implanter.

Zone d’amélioration Ce qu’on voit
généralement
Ce qui permettrait d’attirer
les meilleurs candidats
Impact potentiel
Description
de l’emploi
Description factuelle du poste, de la qualification et des expériences recherchées.
Utilisation de vocabulaire propre à l’entreprise.
Affichage préparé en fonction des besoins du gestionnaire embaucheur.
Décrire les défis, les projets, l’impact de la personne dans le poste et les opportunités de développement.
Utiliser une approche marketing.
Préparer l’affichage en fonction des besoins d’information et du profil générationnel du candidat.
Permet d’attirer un bassin de candidats plus large en évitant d’éliminer a priori les candidats aux expériences non traditionnelles.
Rejoint les préoccupations des meilleurs candidats.
Annonce
Conçue pour chacun des postes à pourvoir à partir d’un modèle standard.
Difficile à trouver pour les candidats parce qu’elle n’est pas affichée rapidement par les moteurs de recherche.
A pour objectif d’informer le candidat afin qu’il pose sa candidature.
Adapter l’annonce en fonction de la clientèle visée.
Regrouper les besoins de plusieurs postes de la même famille en fournissant des informations sur les opportunités et sur l’organisation, des possibilités d’échange et e rester en contact.
Augmenter la facilité à la trouver à partir de différentes sources.
Donner la possibilité au chercheur passif de simplement s’informer en gardant le contact.
Augmente la visibilité.
Permet à l’entreprise d’établir une banque de candidats intéressants.
Programme de
recommandation
Populaire lors de l’implantation.
Les gestionnaires sous-estiment son efficacité et décident souvent de ne pas l’utiliser (pour économiser?).
Besoins peu diffusés à l’interne.
Rendre le programme proactif en stimulant régulièrement son utilisation.
Établir une culture où chaque employé est un recruteur.
Diminution des coûts associés au repérage des talents.
Processus de recrutement plus rapide.
Suivi des résultats
(mesure)
Peu de mesures en général.
Mesures liées au processus, comme le temps pour pourvoir un poste.
Essayer de nouvelles approches et en mesurer l’efficacité afin d’adapter rapidement les façons de faire.
Mesurer l’efficacité des moyens utilisés de manière spécifique.
Mesurer la qualité de l’embauche en utilisant des indicateurs
de performance.
Obtention d’informations spécifiques permettant de prendre rapidement des décisions éclairées.
Processus
Long processus d’évaluation.
Le candidat doit répéter la même information à plusieurs personnes.
Le candidat constate un écart entre la marque de l’employeur et la réalité.
Mettre en place un processus d’évaluation adapté au type de poste en optimisant le temps des gestionnaires et des candidats.
Démontrer aux candidats que les intervenants rencontrés se sont concertés et que chaque étape a des objectifs différents.
Moins de candidats performants se retireront du processus.
Les candidats termineront
le processus avec une bonne impression de l’organisation.

La plupart des éléments présentés dans ce tableau n’impliquent pas d’investissements financiers ou humains importants. Puisque dans le contexte économique actuel, plusieurs organisations limiteront le plus possible les activités de recrutement, les équipes de dotation auront peut-être la marge de manœuvre nécessaire pour prendre du recul et identifier quelques mesures à mettre en place dès maintenant ou lorsque les activités reprendront. Après tout Rome ne s’est pas construite en un jour.

Julie Blanchet, CRHA, directrice, gestion des talents, TELUS

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