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Dans ce second article sur le mentorat, nous tentons de clarifier ce qu’est le mentorat ainsi que de décrire ses conditions de succès. En complément, consultez le premier article Le mentorat : un acte de générativité

La confusion des genres

Malheureusement, il existe encore de la confusion entre les rôles respectifs que peuvent jouer un certain nombre d’acteurs dans la gestion du développement des talents dans les entreprises, particulièrement entre les rôles du coach, du mentor, du consultant et du conseiller.

Nous n’avons pas la prétention dans ce court article de résumer ce qui se retrouve dans des milliers de livres et d’articles. Mais pour simplifier, disons que le conseiller oriente et guide, le coach soutient le développement de compétences spécifiques, le consultant recommande des actions et le mentor partage son expérience dans le but de favoriser l’évolution de la carrière et le développement psychosocial des individus. Même si tous ces rôles sont reliés, ils sont différents en fonction de la perspective adoptée par chacun des intervenants.

La plus grande confusion existe surtout entre le coaching et le mentorat. Le tableau suivant décrit  les différences entre les principales caractéristiques du coaching et du mentorat (Guay, 2002).

Caractéristiques

Coaching

Mentorat

Type de relation

Relation fonctionnelle orientée vers la tâche à accomplir, les besoins à court terme.

But ultime : maîtrise de compétences liées à la fonction.

Relation personnelle orientée vers des objectifs de développement professionnel et personnel à moyen terme.
But ultime: autonomie, confiance en soi, capacité à agir sur son développement professionnel.

Durée de la relation

Perspectives à court terme : prend fin lorsque la personne a acquis les compétences visées.

Perspectives à moyen terme : prend fin lorsque le mentoré et le mentor jugent que les objectifs de développement ont été atteints.

Position hiérarchique du coach ou du mentor

Peut être le supérieur immédiat de l’employé ou un coach externe.

Ne doit pas être le supérieur immédiat du mentoré. Préférablement, le mentor doit encore occuper un poste de responsabilité à l’interne.

Type d’activités

Activités circonscrites autour de l’acquisition de compétences particulières liées à un rôle professionnel.

Activités dont l’influence s’exerce sur plusieurs plans (intégration professionnelle, relève, réalisation personnelle, etc.).

Que fait précisément le mentor?
En général, le mentor remplit plusieurs fonctions auprès du mentoré. Renée Houde (2010) en définit douze : accueillir, guider, enseigner, entraîner, répondre du mentoré, favoriser l’avancement, être un modèle, présenter des défis au mentoré et lui donner l’occasion de faire ses preuves, conseiller, donner de la rétroaction, soutenir moralement et sécuriser le mentoré.

Il est crucial de bien choisir les mentors qui feront partie du programme. En effet, ce ne sont pas tous les individus qui possèdent les qualités essentielles d’écoute et d’empathie pour être des personnes nourrissantes pour les mentorés. Comme il s’agit d’un rôle qui peut devenir complexe en raison de la relation de confiance qui s’établit, il est généralement très productif de leur donner une formation initiale. Dans certains cas, les mentors obtiennent même du coaching externe structuré afin de les accompagner dans leurs premières relations de mentorat, ce qui augmente significativement leur efficacité ainsi que leur motivation personnelle.

Le mentorat : un mode d’accompagnement en progression
Si on tente aujourd’hui d’élargir les applications du mentorat à d’autres formes de relations, comme un employé plus jeune qui accompagne une personne plus âgée dans l’apprentissage des nouvelles technologies, il faut sans doute d’abord s’en tenir à la conception originale du mentorat, soit une personne plus expérimentée et plus sage (mentor) qui agit comme un guide et un modèle pour une personne plus jeune et possédant moins d’expérience (mentoré). Les bons mentors prennent leur rôle au sérieux et investissent le temps qu’il faut pour bien connaître leur mentoré afin de lui être le plus utile possible (Johnson & Ridley,2004).

En conclusion de ces deux articles, voici une liste de conditions recommandées pour s’assurer qu’un programme de mentorat atteigne ses objectifs de développement des jeunes personnes talentueuses dans l’entreprise.

Quinze conditions de succès d'un programme de mentorat

  • Nommer une personne responsable de la coordination du programme. Sans une telle personne, le programme risque de dériver.
  • Se faire accompagner par un expert externe qui pourra guider le développement et l’implantation du programme. Cela sauvera du temps et réduira les risques d’erreur.
  • Dans les grandes entreprises, toujours commencer par une expérience pilote.
  • Recruter les mentors avec soin tout en tenant compte des sensibilités politiques reliées à leur sélection. Se souvenir que tout le monde ne peut pas être mentor. Le mentor doit être une personne nourrissante.
  • Pour les mentors, remplir leur rôle bénévolement et sans attendre de récompenses financières.
  • Préférablement, laisser les mentorés choisir leur mentor, mais permettre au coordonnateur de guider leur choix si les mentorés ont des doutes à cet égard.
  • Former les mentors et les mentorés afin qu’ils comprennent bien le processus de mentorat et puissent gérer efficacement leurs attentes respectives.
  • Être clair à propos des règles de confidentialité et d’éthique qui gouvernent la relation mentorale. S’occuper immédiatement de toute relation mentorale qui tourne mal ou de tout problème d’éthique ou de confidentialité.
  • Structurer le programme, mais pas trop. Trop de structures administratives démotivent les mentors et les mentorés, mais s’il n’y en a pas assez, l’entreprise risque de vivre des dérapages qui auraient pu être prévenus.
  • Donner aux mentors l’occasion d’échanger sur leur expérience et les défis qu’ils rencontrent avec leurs mentorés.
  • Limiter le nombre de mentorés que chaque mentor peut accompagner. Généralement, ce nombre ne devrait pas dépasser deux, si l’on tient compte du calendrier relativement chargé des cadres supérieurs.
  • Faire le suivi des dyades pour s’assurer que la relation se poursuit normalement, mais sans intervenir dans la relation.
  • Limiter la durée de la relation mentorale (6 à 12 mois environ) de manière à encourager la rotation des mentorés auprès des mentors.
  • S’assurer que le patron immédiat de la personne mentorée comprend bien le processus de mentorat et ne se sent pas mis de côté dans le développement de son employé par un gestionnaire d’un niveau plus élevé que le sien.
  • Et pour terminer, déterminer comment les résultats du programme de mentorat seront mesurés, ce qui veut dire que l’organisation devrait avoir des objectifs lors de l’implantation de son programme.

Références

  • Guay, M.-M. (2002). « Quelques précisions…le mentorat versus le coaching », Revue Échange, vol. 16, n° 3, p. 7-8.
  • Houde, R. (2010). Des mentors pour la relève, Montréal, Presses de l’Université du Québec.
  • Johnson, W.B. et C.R. Ridley (2004). The Elements of Mentoring, New York, Palgrave Macmillan.

Yvon Chouinard, CRHA et coach certifié, est coach exécutif chez Pauzé Coaching et président d’Isotope Conseil inc. À titre de consultant, il soutient les organisations dans l’implantation de leurs programmes de mentorat ainsi que dans la formation des mentors et des mentorés et le coaching des mentors. Il est membre de Mentorat Québec. On peut le joindre par téléphone [514) 861-0222] ou par courriel [ychouinard@isotopeconseil.com ou ychouinard@groupepauze.com].

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